Une question de môme embarrassante ? Des éléments de réponse, à destination des parents… et de leurs marmots.
![Les dents, pipi et au lit ! 2 Capture d’écran 2020 02 03 à 16.59.58](https://www.causette.fr/wp-content/uploads/2020/02/Capture-d’écran-2020-02-03-à-16.59.58.jpg)
1. Le sommeil, c'est la vie
Tu sais, on a tous et toutes besoin de dormir. Ce n’est pas pour rien si le sommeil occupe un tiers de la vie des adultes et la moitié de celle des enfants ! C’est essentiel pour que notre organisme puisse fonctionner. Et plus on est petit, plus on a besoin d’avoir sa dose : entre 6 et 12 ans, un·e enfant doit dormir de 10 à 11 heures pour être en bonne santé. Pourtant, vous dormez de moins en moins, les marmots. En 2017, trois chercheur·ses français·es ont mené une enquête auprès de 778 enfants âgé·es de 5 à 10 ans. Leur constat est qu’en quinze ans les enfants ont perdu, en moyenne, 20 minutes de sommeil par nuit.
Le sujet préoccupe de plus en plus les spécialistes, qui évoquent aujourd’hui un « problème
de santé publique ». Pas étonnant, donc, que tes parents veuillent que tu te couches tôt.
2. Dur dur d'aller au lit
Bon, entre nous, tu es loin d’être la seule à râler quand il est l’heure d’aller au lit… C’est même un grand classique. « Globalement, les enfants n’ont pas envie de se coucher tôt, surtout lorsqu’ils arrivent en primaire, qu’ils commencent à prendre goût à la vie sociale, familiale… Eux auraient envie de partager ce moment d’échange et ils vivent souvent cette injonction comme une exclusion », confirme la psychiatre Marie Rose Moro. Alors oui, je sais, ce n’est pas toujours simple de quitter le monde du jour pour celui de la nuit et on aimerait repousser ce moment (c’est pareil pour plein d’adultes, hein). Mais si tu allais te coucher un jour à 20 h 30, un autre à minuit et le suivant à 22 heures, tu finirais par avoir bien du mal à t’endormir. C’est pour ça que tes parents t’imposent une heure de coucher. Et puis, soyons honnêtes : on a beau vous aimer énormément, le soir, on a aussi besoin de souffler et de se retrouver entre adultes.
3. Une obsession française
Il faut quand même que je te dise un truc : si tous les enfants ont besoin de dormir, tous et toutes ne sont pas obligé·es d’aller au lit avec les poules. « Coucher les enfants tôt n’est pas du tout une règle universelle. Avec les États-Unis, la France est sans doute l’un des endroits dans le monde où l’on couche les enfants le plus tôt », explique Marie Rose Moro, qui a notamment écrit Aimer ses enfants ici et ailleurs. Histoires transculturelles*. Pas de bol, hein ? Chez nous, coucher les enfants tôt est non seulement une habitude culturelle, mais aussi une norme sociale très forte. Et c’est en partie lié à l’organisation de notre société, où l’école commence à 8 h 30. « Les institutions ne s’adaptent pas forcément au rythme des enfants. En fait, on adapte les enfants aux institutions », observe Marie Rose Moro. Tu connais la chanson : « Demain, y a école ! »
* Éd. Odile Jacob, 2007.
4. Oiseaux de nuit
Ailleurs, on trouve normal que les enfants veillent aussi tard que leurs aîné·es. En 2002, deux anthropologues américaines ont rapporté que, chez les Efe, des chasseurs-cueilleurs de la République démocratique
du Congo, petits et grands « restent éveillés aussi longtemps que quelque chose d’intéressant – une conversation, de la musique, de la danse – se passe ». Chez
les Balinais (Philippines), lors de certaines fêtes, les enfants doivent même « apprendre à rester éveillés comme les adultes ». Lorsqu’elle vivait en Argentine, la journaliste américaine Mei-Ling Hopgood n’en revenait pas de croiser tant d’enfants le soir dans les rues et les restos (qui n’ouvrent pas avant 21 heures). « Quand il y a école, [ils] se couchent plus tôt, quoiqu’à des heures impensables ailleurs », souligne-t-elle dans un livre*. Et les petit·es Argentin·es ne s’en portent pas plus mal.
* Comment les Eskimos gardent les bébés au chaud, Mei-Ling Hopgood. Éd. Marabout, 2015.
5. Précieux dodo
S’il y a une chose sur laquelle les parents sont d’accord à travers le monde, c’est que le sommeil des enfants, c’est important. Même si, d’une culture à l’autre, ce n’est pas forcément pour les mêmes raisons. C’est ce
qu’explique la psychiatre Marie Rose Moro, qui est spécialiste des questions interculturelles : « En Occident, on voit le sommeil comme un besoin physiologique des enfants. Mais dans plein d’autres endroits, on considère avant tout la nuit comme un moment un peu sacré, où l’enfant est en relation avec le monde invisible. » Quelle que soit leur culture, les parents apprennent donc à leurs enfants à apprivoiser les nuits (ici en leur racontant des histoires, ailleurs en faisant des veillées, des prières ou des petits rituels) et on protège leur sommeil. « Partout, finalement, on considère que le sommeil des enfants est précieux, poursuit Marie Rose Moro. C’est ça, au fond, la composante universelle. » Allez, maintenant… au lit !