ÉDITO. D'un côté, le fiel des gens aux passions tristes, du type : « On dirait une dinde de chez Père Dodu enveloppée dans son filet » ; « Tu ne devrais pas mettre ce genre de tenue avec ses jambes ». De l'autre, des commentaires bienveillants mais montrant le poids ravageur des diktats de beauté, comme « Merci d'oser dévoiler tes jambes avec cette silhouette hors norme », alors que la jeune femme à laquelle s'adressent ces propos fait à vue de nez un petit 40, soit la taille moyenne des Françaises.
Ces manifestations de la grossophobie ordinaire, qu'elle soit haineuse ou compatissante, ont amené la concernée à réagir avec courage : « J’ai toujours été plus ou moins à l’aise avec mon corps, jusqu’à ces derniers mois. J’ai pris du poids, j’en suis consciente. Ma morphologie a changé, j’en suis consciente, mais Internet s’en est rendu compte avant moi et souhaite le partager », a écrit l'influenceuse Léna Mahfouf sur son compte Instagram.
Resplandissante dans la robe Vivienne Westwood vintage qui lui a valu ce cyberharcèlement lorsqu'elle l'a portée lors d'une soirée au Festival de Cannes, la jeune femme a osé confier les conséquences très concrètes sur sa santé mentale que lui procure son engagement à ne pas montrer une image idéalisée de son corps sur les réseaux sociaux : « Depuis deux ans, j’ai fait le choix de ne plus utiliser de filtre afin de montrer une image honnête et non modifiée, quelque chose de vrai. J’essaie de faire de mes plateformes un lieu où je me sens assez en confiance pour partager avec quatre millions de personnes mes facettes avec lesquelles je ne suis pas 100 % en paix.(…) Depuis jeunes, on nous projette dans un corps idéal, un style idéal que dès que je ne rentre plus dans une taille 36, je reçois des “ tu manges bien à la cantine ” ou des “ félicitations pour le bébé ”. »
C'est dire à quel point nos corps et nos vêtements sont politiques. C'est dire aussi le courage qu'il faut à ces femmes qui décident, contre vent et marée et alors même que leur corps est tout à fait dans la norme, d'épouser une éthique bodypositive par responsabilité vis-à-vis de leur public. Merci donc à Léna – régulièrement victime de vagues haineuses en ligne – de s'exposer pour notre droit à toutes à simplement… Avoir des cuisses parfaitement normales. Merci, tant qu'on y est, à celles qui font de même tout en sortant de la norme, qu'elles soient grosses ou trop minces, petites ou trop grandes, poilues ou victimes d'alopécie. Merci les filles !
Et si vous perdez espoir, prenez exemple sur Léna : plutôt que de se recroqueviller et laisser les rageux·euses gagner, elle a rivalisé (avec elle-même !) de splendeur en portant quelques jours après rien moins que l'iconique robe jungle signée Versace et vêtue par JLo qui avait, en 2000 lors de la cérémonie des Grammy awards, cassé internet… Et mené à la création de Google image pour notre plus grand plaisir scopique.
Lire aussi l Pourquoi l'affaire de cyberharcèlement à l'encontre de Léna Mahfouf nous concerne toutes et tous