Stand-​up : "Les Autres", le spec­tacle ten­dre­ment misan­thrope de Tania Dutel

Révélée dès son pre­mier spec­tacle en 2018, l'humoriste tren­te­naire remonte sur scène avec Les Autres, une séance de rire col­lec­tif qui envoie du lourd… Et une bonne dose de pun­chlines féministes.

Tania Dutel 025 @Patrick Fouque
Tania Dutel © Patrick Fouque

Pour cause d'urgences au tra­vail, on est arri­vée en retard d'un bon quart d'heure dans la salle de L'Européen, ce mar­di soir à Paris, et elle ne nous a pas lou­pée. Alors qu'on tente de se faire dis­crète pour trou­ver notre siège, elle nous apos­trophe en nous deman­dant si on connait la dif­fé­rence entre « pénis de sang » et « pénis de chair », parce que c'est indis­pen­sable à notre com­pré­hen­sion de la suite du spec­tacle. Pendant qu'elle enchaîne en expli­quant pré­fé­rer les pénis de sang qui triplent de volume sous l'effet d'une érec­tion, on tente de faire bonne figure. On dit qu'on est ravie de l'apprendre et on se mau­dit secrè­te­ment de se faire subir avec ce retard la han­tise de tout·e spectateur·rice qui n'a aucun talent par­ti­cu­lier pour l'impro : devoir durant des secondes qui paraissent des heures s'improviser spar­ring part­ner d'une meuf douée de ses punch(lines). Finalement, cette entrée en matière nous plonge direc­te­ment au cœur du pro­pos du spec­tacle. Avec Les Autres, Tania Dutel entend décor­ti­quer les normes sociales de bien­séance, les codi­fi­ca­tions qui nous obligent et notre rela­tion à autrui. « Tout le monde vit pour les autres et moi, ces autres me pour­rissent la vie. J'en ai fait un spectacle. »

La gros­sie­re­té avec grâce

Pendant une heure donc, Tania Dutel évoque en vrac et avec un franc-​parler mor­dant la pres­sion sociale à deve­nir mère, la curio­si­té mal pla­cée à pro­pos d'une rela­tion les­bienne ou encore l'épisode où elle s'est sen­tie obli­gée de dire oui à un pre­mier ren­card dans les cata­combes inter­dites de la capi­tale. On retrouve dans la verve et l'expressivité du jeu de scène de la comé­dienne le talent qu'on avait per­çu en 2018 dans son pre­mier spec­tacle, qui por­tait son nom. On retrouve aus­si – c'est sa marque de fabrique – la même gouaille mali­cieuse qui manie la gros­siè­re­té et les mots crus avec grâce et aplomb. Surtout, on retrouve l'engagement fémi­niste de Tania qui nous avait sai­sie lorsqu'elle s'était faite connaître. 

Cette fois, Tania Dutel raconte entre deux blagues le viol dont elle a été vic­time de la part d'un humo­riste qu'elle pré­sente comme avoir fait car­rière aujourd'hui. Avec une assu­rance com­bat­tive, elle décrit l'effet de sidé­ra­tion, la honte et le che­mi­ne­ment pour com­prendre que ce n'est pas à la vic­time de se cacher. Dans le public, sou­dain, une atmo­sphère de com­pas­sion col­lec­tive. Le rire reprend lorsque, juste après, Tania Dutel narre l'absolu ridi­cule du type qui, confron­té à ses actes, dira com­prendre « parce qu'il s'est fait sif­fler par des hommes dans le Marais ». Avec Les Autres, Tania Dutel nous montre la voie d'une jeune femme qui s'est répa­rée par le rire.

Les Autres, de Tania Dutel. À L'Européen (Paris XVII) les mar­dis 22 et 29 mars puis en tour­née dans plu­sieurs villes.

Lire aus­si l Tania Dutel : « J'habite un stu­dio à Paris donc dans ma chambre, il y a autant mon lit que mon micro-onde »

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