Nos coups de coeur musique de jan­vier 2021

Mesparrow : Le fil harmonique

mesparrow credits fabien tijou 1 a

Marion Gaume, alias Mesparrow, n’est plus tout à fait la même, mais peut-​être pas encore vrai­ment une autre. Son troi­sième album la sai­sit en pleine trans­for­ma­tion per­son­nelle pro­fonde. Sans doute faut-​il par­ler d’une libé­ra­tion exis­ten­tielle. Gracile et dia­phane, la voix de Mesparrow tour­noie au milieu des pul­sa­tions, entre eupho­rie et mélan­co­lie – cette der­nière por­tant chez la Tourangelle le nom de Saudade ou d’Humeur cho­co­lat. « Je suis trop pas assez/​mais tou­jours différente/​et ça gêne les autres/​mais je me sens vivante », confesse Mesparrow dans Différente. Dans un tour­billon syn­thé­tique et orga­nique enivrant, la chan­teuse exprime la néces­si­té de syn­chro­ni­ser le monde exté­rieur et son for inté­rieur. S’appuyant sur ce nou­vel élan, Danse four­bit alors des armes pour un lâcher-​prise sal­va­teur. L’ancienne étu­diante des Beaux-​Arts, désor­mais mère, a pris la gomme et esquisse les contours d’une nou­velle vie où son cœur, sa tête et son corps sont ali­gnés en har­mo­nie. J.B.

Monde sen­sible, de Mesparrow. Yotanka Records. Sortie le 15 jan­vier 2021

Sons d’hiver, du swing qui réchauffe

Le jazz accueille tou­jours avec plai­sir l’improvisation, mais on prend les paris que les orga­ni­sa­teurs de Sons d’hiver pré­fé­re­raient que le soliste Covid-​19 se désiste et ne per­turbe pas la par­ti­tion de cette tren­tième édi­tion. Fidèle à sa sin­gu­la­ri­té, le fes­ti­val du Val-​de-​Marne favo­rise à nou­veau les téles­co­pages inter­na­tio­naux sub­tils en pro­gram­mant vingt-​neuf concerts dans douze salles du dépar­te­ment, deux lieux pari­siens et au cœur du Mac Val, le musée d’art contem­po­rain de Vitry-sur-Seine. 

Le public de cette édi­tion anni­ver­saire, excep­tion­nelle à plus d’un titre, assis­te­ra notam­ment aux retrou­vailles du trio mythique for­mé par le pia­niste alle­mand Joachim Kühn, l’oudiste maro­cain Majid Bekkas et le bat­teur espa­gnol Ramon Lopez, avec en invi­té le trom­pet­tiste ita­lien Enrico Rava. Autres temps forts, une carte blanche au saxo­pho­niste Émile Parisien, figure emblé­ma­tique du jazz made in France, et une ren­contre entre le vété­ran Archie Shepp et celui qui pour­rait être son petit-​fils, Jason Moran. Parmi les seize créa­tions inédites, il ne fau­dra pas rater l’hommage à Alice Coltrane, ryth­mé par le per­cus­sion­niste Hamid Drake. J.B.

Festival Sons d’hiver. Du 22 jan­vier au 13 février 2021, dans le Val-​de-​Marne et à Paris.
Programme sur : Sonsdhiver.org.

Théo Charaf : hors du temps

Ex-​barman dans les salles de concert lyon­naises ou musi­cien dans des groupes locaux, Théo Charaf cultive depuis des années sa pas­sion pour le folk blues, les racines du rock. Avec force et per­son­na­li­té, dans ce pre­mier album, le jeune homme se sai­sit de l’esprit cabos­sé par la route de ses illustres aîné·es. Mais il dépasse l’imitation. Entièrement acous­tique, inter­pré­té par sa voix rugueuse et cha­leu­reuse, cha­cun des dix titres prend aux tripes. Au cœur du disque, avec l’enchaînement des clas­siques Devil Got My Woman (Skip James), Oh Sister (Dylan) et Wander Boy – une de ses com­po­si­tions per­son­nelles –, on se rend compte qu’on est bien au-​delà d’un simple hom­mage aux ancêtres. Ses propres com­po­si­tions prennent joli­ment place au sein de l’illustre voi­si­nage. Théo Charaf n’a certes que 27 ans, mais il est né quelque part au début des 50’s, hors du temps. C.K.

Théo Charaf. Wita Records/​Dangerhouse Skylab/​Baco Distrib. Sortie le 22 jan­vier 2021

Goat Girl : Good Girls

En anglais, goat signi­fie « chèvre », c’est aus­si l’acronyme de « grea­test of all time ». On n’ira sans doute pas jusque-​là, mais les quatre Londoniennes de Goat Girl se situent du second côté de la bar­rière avec un deuxième album très réus­si, peut-​être l’un des meilleurs de l’année. Derrière leurs pseu­dos de bon­bons aci­du­lés, Lottie Cream, LED, Naima Jelly et Rosy Bones fusionnent les saveurs, à l’instar du single Sad Cowboy qui aspire l’auditeur dans un tour­billon syn­thé­tique. Le psyché-​rock de Goat Girl s’exprime tout en gui­tares étranges, cla­viers esso­rés et ryth­miques déca­lées. Le chant est juste assez désa­bu­sé pour deve­nir hyp­no­tique. Sous la sur­face cha­toyante four­millent des mes­sages sur l’anxiété contem­po­raine de notre socié­té. Si le disque s’intitule On All Fours (à quatre pattes), le qua­tuor, lui, se tient debout au milieu des ruines. J.B.

On All Fours, de Goat Girl. Rough Trade/​Beggars. Sortie le 21 jan­vier 2021.

Dom La Nena : le bon Tempo

Naître, gran­dir, aimer, avan­cer, vieillir, mou­rir… Les com­po­si­tions du troi­sième album de Dom La Nena, chanteuse-​compositrice vio­lon­cel­liste bré­si­lienne basée à Paris, accom­pagnent le rou­lis du temps avec une grâce rêveuse et une élé­gance atten­dris­sante. La jeune musi­cienne, moi­tié du duo Birds on a Wire (deux albums en com­pa­gnie de Rosemary Standley, voix du groupe Moriarty), trans­forme son vio­lon­celle en une malle aux tré­sors dont elle extrait une grande varié­té de sons. La grande maî­trise de cette ins­tru­men­ta­tion mini­ma­liste, rehaus­sée de per­cus­sions et de notes de pia­no, est divi­ne­ment contre­ba­lan­cée par une voix à l’innocence enfan­tine qui valse entre le por­tu­gais, l’espagnol et le fran­çais. Qu’il est Doux de rêver, confie Dom La Nena. Qu’il est doux de prendre le temps d’écouter ce déli­cieux Tempo. J.B.

Tempo, de Dom La Nena. Six Degrees Records/​InGrooves.

Arlo Parks : comète deve­nue étoile

Apparue telle une comète avec un pre­mier EP il y a deux ans, Arlo Parks a géné­ré un énorme buzz qui lui a d’ores et déjà per­mis de comp­ter par­mi ses fans Michelle Obama, Billie Eilish ou Florence Welch. La jeune fille d’origine franco-​tchadienne et nigé­riane a gran­di à Londres dans un bouillon­nant mélange de cultures inter­gé­né­ra­tion­nelles. Adolescente, elle se nour­ris­sait autant de poé­sie de la beat gene­ra­tion des 60’s que de ciné­ma d’animation japo­nais, des der­niers sons de rap US, de Fela Kuti, de soul, ou de chan­son fran­çaise, écou­tant Piaf ou Aznavour. Les pièces de cet opu­lent puzzle contem­po­rain se sont assem­blées dans son pre­mier album. Sur des mélo­dies soul, colo­rée de hip-​hop et de folk, elle aborde avec poé­sie les ques­tion­ne­ments et les angoisses de la géné­ra­tion ultra-​connectée d’aujourd’hui. Avec Collapsed In Sunbeams, la comète devient étoile. C.K.

Collapsed in Sunbeams, d’Arlo Parks. Trangressive/​Pias.
Sortie le 29 jan­vier 2021.

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