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Maryse Condé @Wikipédia

Mort de l’écrivaine Maryse Condé, grande figure de la lit­té­ra­ture francophone

La grande écri­vaine fran­çaise née en Guadeloupe Maryse Condé est morte dans la nuit de lun­di à mar­di à l’âge de 90 ans, après une vie de com­bat pour sa liber­té et d’exploration des iden­ti­tés antillaise et noire.

Voix recon­nue de la lit­té­ra­ture fran­co­phone, elle s'est éteinte dans son som­meil à l'hôpital d'Apt (Vaucluse), a indi­qué son mari, le Britannique Richard Philcox.

Née à Pointe-​à-​Pitre le 11 février 1934, Maryse Condé a trai­té dans une tren­taine de livres, prin­ci­pa­le­ment des fic­tions, l’histoire de l’Afrique et de sa dia­spo­ra, l’héritage de l’esclavage et les iden­ti­tés noires. “J’ai tou­jours tra­vaillé avec elle dans ses dif­fé­rentes mai­sons d’édition et j’étais pro­fon­dé­ment admi­ra­tif de son rayon­ne­ment, de son cou­rage. Elle a don­né l’envie à énor­mé­ment d’écrivains de se lan­cer et de com­battre avec elle”, a décla­ré son édi­teur, Laurent Laffont.

"La Grande Dame des Lettres mon­diales, Maryse Condé, tire sa révé­rence, nous léguant une œuvre por­tée par la quête d’un huma­nisme fon­dé sur les rami­fi­ca­tions de nos iden­ti­tés et les fêlures de l'Histoire", a quant à lui écrit sur X l'écrivain franco-​congolais Alain Mabanckou.

"Aucune rai­son d'être fier"

Pour avoir vécu dans plu­sieurs pays d’Afrique (Côte d’Ivoire, Ghana, Guinée et Sénégal), Maryse Condé cri­ti­quait les limites du concept de “négri­tude” pro­po­sé par le Martiniquais Aimé Césaire et le Sénégalais Léopold Sédar Senghor. “Il n’y a cepen­dant aucune rai­son d’être fier d’appartenir à telle ou telle race. Je remets en ques­tion le fait que la négri­tude per­pé­tue la notion que tous les Noirs sont pareils. C’est une atti­tude tota­le­ment raciste héri­tée en fait des Blancs qui croient que tous les nègres se res­semblent”, disait-​elle dans un entre­tien avec la revue Callaloo en 1989.

Ayant tou­jours eu le désir d'écrire, elle n'a pu s'y consa­crer véri­ta­ble­ment qu'à l'approche de la qua­ran­taine. Avant cela, cette fille de la classe moyenne de Guadeloupe, qui se décri­vait comme une enfant gâtée par ses parents, a tra­ver­sé de nom­breuses épreuves à par­tir de son arri­vée à Paris pour ses études, en 1953.

La perte de sa mère, en 1956, à qui elle n'a pas pu dire au revoir, le racisme, l'échec de son mariage avec le Guinéen Mamadou Condé, les condi­tions rudi­men­taires dans les­quelles elle a éle­vé ses quatre enfants l'ont marquée.

Indépendantiste

Grâce à son nou­veau com­pa­gnon ren­con­tré au Sénégal, Richard Philcox, qui devien­dra son mari et tra­duc­teur, elle réa­lise sa voca­tion, l’écriture, en quit­tant l’Afrique en 1970. Elle se lance aus­si dans un doc­to­rat de lettres à Paris. Sa thèse, sou­te­nue en 1976, s’intitule “Stéréotype du noir dans la lit­té­ra­ture antillaise Guadeloupe-Martinique”.

Après des pièces de théâtre, elle obtient la consé­cra­tion comme roman­cière grâce à Hérémakhonon en 1976, où la nar­ra­trice antillaise ne trouve que la dés­illu­sion en Afrique.

Son grand suc­cès en librai­rie est Ségou, fresque en deux tomes (1984 et 1985) sur le déclin de l’empire bam­ba­ra, au Mali, du XVIIIe siècle jusqu’à l’arrivée des colo­ni­sa­teurs français.

Elle retourne ensuite vivre en Guadeloupe, où elle est indé­pen­dan­tiste. De là, elle est recru­tée par plu­sieurs uni­ver­si­tés amé­ri­caines, pour les­quelles elle ensei­gne­ra la lit­té­ra­ture fran­çaise, tout en publiant régulièrement.

De 1995 à 2005, elle dirige le Centre d’études fran­co­phones de l’université de Columbia, à New York. Elle devient alors une figure intel­lec­tuelle aux États-​Unis, pays qu’elle quitte défi­ni­ti­ve­ment en 2013, pour pas­ser sa retraite à Gordes, un vil­lage du Luberon.

Son œuvre en a fait l'une des pré­ten­dantes au prix Nobel de lit­té­ra­ture, qu'elle n'obtiendra pas. En 2018, on lui décerne à Stockholm le "nou­veau prix de lit­té­ra­ture", remis cette année-​là par une "Nouvelle Académie" qui prend la place de l'Académie sué­doise, engluée dans un scan­dale de vio­lences sexuelles non dénoncées.

Lire aus­si I « L'Évangile du Nouveau Monde » de Maryse Condé : l’autre divin enfant

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