"La Forêt", l'enquête touf­fue de Claire Braud, figure de la BD indépendante

Figure de la BD indé­pen­dante, Claire Braud était en mal de nature lorsqu’elle a déci­dé de reve­nir dans sa Touraine natale. Sur place, un garde-​forestier lui raconte com­ment la chasse déré­gu­lée est en train d’attaquer tout un éco­sys­tème. Et voi­là l’autrice de Mambo (éd. L’Association, 2011) qui se met à inves­ti­guer sur la forêt, bien au-​delà de sa lisière. Le début d’une enquête touf­fue, au cours de laquelle l’illustratrice se perd par­fois (de son propre aveu), entre détours his­to­riques ou phi­lo­so­phiques et paren­thèses intimes. Mais ces che­mins buis­son­niers nour­rissent la réflexion éco­fé­mi­niste qui tra­verse l’album, pour mettre en avant les liens entre domi­na­tion de classe, viri­li­té toxique et écra­se­ment de la nature. Infiltrée inco­gni­to dans un ban­quet de chas­seurs orga­ni­sé par le sosie de Pétain, reti­rée auprès d’un moine grand­mon­tain ou sus­pen­due aux récits des gitans sur la forêt, Claire Braud construit sa BD sur des ren­contres de ter­rain. Nées d’humeurs et de hasards, celles-​ci donnent à l’album une sin­cé­ri­té brute, atta­chante. Les des­sins pris sur le vif et les col­lages pho­to accen­tuent cette dimen­sion per­son­nelle, proche du car­net de route, por­tée par un humour ravageur. 

La Forêt. Une enquête buis­son­nière, Claire Braud, Éd. Casterman, 208 pages, 22 euros