En 2011, le premier tome de Cinquante nuances de Grey déboulait dans les librairies françaises et dopait le marché du livre érotique. Dix ans plus tard, les pratiques de lecture ont évolué avec l’avènement du numérique, mais le désir pour la new romance, le genre le plus en vogue, ne s’éteint pas, surtout auprès du public féminin. Pourtant, l’image de la sexualité dépeinte dans ces ouvrages peine souvent à sortir des clichés. Heureusement, de jeunes autrices tentent de faire rimer égalité avec prendre son pied.

Le site officiel de l’écrivaine britannique E. L. James est d’un rose intense. Intense comme la relation entre les deux protagonistes de Cinquante nuances de Grey, la saga qu’elle écrit depuis dix ans et dont elle a déjà écoulé 150 millions d’exemplaires dans le monde. Intense comme les scènes de sexe, très explicites, qui ont fait le succès de ses ouvrages où se mêlent grands sentiments et petits coups de cravache. Intense, surtout, comme le suspense qu’entretient la papesse de la Provocative Romance – c’est écrit tel quel sur la page d’accueil – depuis quelques semaines avec la sortie, le 16 juin en France, du sixième et dernier volet de Cinquante nuances de Grey.
Ce tome conclusif intitulé More Grey est raconté du point de vue de Christian Grey, magnat des télécoms tourmenté et passionné de domination. Pour celles qui feraient semblant de ne pas savoir de quoi il retourne, on résume : Cinquante nuances, ou Fifty Shades en VO, narre avec moult rebondissements l’histoire d’amour et de bondage qui unit Anastasia Steele, jeune étudiante en littérature, et Christian Grey, un homme puissant, très riche et branché SM. Et, à propos d’union – attention, roulements de tambour –, More Grey débute par l’annonce du mariage de Christian et Anastasia !
Sur la couverture, la photo en noir et blanc d’une main avec une alliance à l’annulaire donne le ton. Voilà qui contraste avec les menottes et le masque vénitien des livres précédents. Ils se marièrent et eurent beaucoup d’enfants ? Ouhhh, ça décoiffe ! Pourtant, cette fin traditionnelle et convenue ne semble pas décourager les aficionadas. Dans son bureau des éditions Jean-Claude Lattès, la maison qui publie les livres d’E. L. James, déjà vendus à près de 8 millions d’exemplaires en France, Véronique Cardi, la grande patronne, se frotte déjà les mains. « Nous allons tirer à 150 000 exemplaires, en fonction des commandes des libraires, ce qui s’annonce vraiment très bien. Il y a une attente autour de ce livre et je suis curieuse de voir comment il va être reçu, commente-t-elle. Il faut se souvenir du phénomène planétaire que ça a représenté il y a dix ans. Ce succès a donné naissance à un segment éditorial à part entière : la romance ou new romance. »
Cinquante nuances a effectivement fait plein de bébés et ouvert la voie à toute une série d’ouvrages, souvent écrits par des femmes, qui reprennent le même schéma narratif : une demoiselle inexpérimentée rencontre un homme charismatique ou[…]