Édito. Ça commence à sentir un peu la rentrée. Bientôt, vous regarderez les photos de vos dernières vacances en famille avec une émotion somme toute teintée de nostalgie. Alors, ce sera l’évidence. Sur la myriade de clichés, vous, jeunes mamans, daronnes confirmées ou belles-mères « recomposées », vous n’apparaissez pas ou très peu. Et pour cause. Qui prenait les photos ? En plus d’avoir programmé et organisé les vacances de toute votre smala, vous vous êtes aussi assurées de créer, de mettre en scène, et de garder en boîte ces moments précieux. Tout ça c’est le boulot des mères et c’est une charge émotionnelle de plus. Encore une.
Bien sûr, ce n’est pas une science exacte. Évidemment – et encore heureux –, qu’il existe des pères qui adorent prendre des photos, mais ce constat en dit beaucoup sur la place de chacun·e dans la famille et de qui fait quoi dans le couple hétérosexuel. Car oui, c’est bien de lui dont il s’agit lorsqu’on parle des charges mentales qui incombent aux femmes.
La place de chacun·e, mais surtout l’absence des mères donc. Une absence du récit familial révélée avec éclat début janvier lorsque Laura Vallet, bibliothécaire spécialisée en littérature jeunesse, publie sur Twitter cette question laconique « Mères de famille : on vous prend en photo, vous ? » Près de 400 réponses plus tard, et presque autant de « moi non plus », le constat est bien là. Un constat ensuite rapporté par le média en ligne Madmoizelle.
Ce n’est pas juste une simple et banale histoire de photos. L’absence des mères sur les clichés de familles en vient à les faire disparaître du récit familial. À alimenter une vision faussée de la famille, où seuls les pères seraient finalement témoins des moments passés. « Ce n’est pas rien. C’est de la mémoire familiale qu’il s’agit. Ce qui va passer à la génération qui suit. Pour que les pères prennent des photos, il faut souvent le leur demander. Alors que les mères le font spontanément, car elles ont à l’esprit l’idée de la préservation de la mémoire familiale », explique Illana Weizman, sociologue et autrice de Ceci est mon post-partum (Marabout, 2021) sur son compte Instagram.
Une disparition photographique qui s’accentue en effet avec le temps qui passe. Dans dix, vingt, trente ans, quelles traces auront les mères de famille de ces instants de vacances ? Pour beaucoup, il ne restera que des souvenirs, enfouis dans leur mémoire, pour voyager dans le temps. Alors si vous avez la chance d’être encore en vacances, tendez votre appareil photo à votre conjoint, envoyez bouler la charge mentale, prenez vos proches par les épaules et… souriez !