Commissariat central du 5e arrdt de Paris
Un commissariat à Paris © Wikipédia

Violences sexistes et sexuelles : selon une enquête Nous Toutes, 66% des femmes ayant dépo­sé plainte ont été mal reçues par la police

Le col­lec­tif Nous Toutes vient de publier les résul­tats d’une enquête décla­ra­tive sur la façon dont sont récep­tion­nées dans les com­mis­sa­riats les demandes de plaintes dans le cadre de vio­lences sexistes et sexuelles. 66% des répondant·es ont fait face à une mau­vaise prise en charge.

C’est un chiffre qui en avait éton­né plus d’un·e. Au début du mois de mars, le minis­tère de l’Intérieur avait annon­cé que “90% des femmes ayant por­té plainte en 2020 pour des faits de vio­lences conju­gales étaient satis­faites de l’accueil en com­mis­sa­riats et gen­dar­me­ries.” Il faut dire que pour tom­ber sur ce chiffre digne de résul­tats de réélec­tion d’un dic­ta­teur, le minis­tère de l’Intérieur se basait sur une enquête de satis­fac­tion à l’issue de 2072 dépôts de plainte (une méthode pro­blé­ma­tique puisqu’en réa­li­sant elles-​mêmes l’étude, les forces de l’ordre ont été juges et par­ties). #NousToutes a donc déci­dé dans la fou­lée de le prendre au mot et de réa­li­ser sa propre étude, élar­gis­sant le champ non plus seule­ment aux vio­lences conju­gales mais à toutes formes de vio­lences sexistes et sexuelles. 

Vingt jours plus tard, le résul­tat est sans appel : sur les 3 500 per­sonnes de toute la France et des Outre-​Mer ayant répon­du au ques­tion­naire #NousToutes dif­fu­sé sur les réseaux sociaux du col­lec­tif fémi­niste, 40% révèlent avoir fait face à une mau­vaise prise en charge et 26% estiment à la fois avoir été bien et mal prises en charge, en fonc­tion des dif­fé­rentes per­sonnes à qui elles ont dû s’adresser durant leur démarche. En tout, cela fait donc 66% des répondant.es (dont l’écrasante majo­ri­té, 97,3%, sont des femmes) à avoir donc ren­con­tré au moins un pro­blème face aux forces de l’ordre qu’ils et elles ont ren­con­tré au cours de leur dépôt de plainte. Certes, le fait qu’il s’agisse d’une enquête en ligne créé un biais de résul­tats, car les per­sonnes ayant subi un mau­vais trai­te­ment de la part des policier·ères ou gen­darmes pour­raient être plus ten­tées de répondre que celles pour qui cela s’est dérou­lé nor­ma­le­ment. Mais ce biais exis­tait tout autant si ce n’est plus, puisque les col­lec­teurs de don­nées (les com­mis­sa­riats eux-​mêmes) étaient à la fois juges et par­ties, dans l’enquête menée par le minis­tère lui-même.

Dans le détail, les mau­vais com­por­te­ments des policier.ères et gen­darmes relèvent pre­miè­re­ment de la bana­li­sa­tion des vio­lences subies (67,8%), puis du refus de prendre la plainte ou du décou­ra­ge­ment de por­ter plainte (56,5%), de la culpa­bi­li­sa­tion de la vic­time (55,2%), de moque­ries ou de sexisme (29,8%) et même, d’une forme de soli­da­ri­té avec la per­sonne mise en cause (26,2%). "Votre plainte, ça va rui­ner sa vie", s’est ain­si vu rétor­quer une vic­time à Paris en 2019. "Physiquement, vous allez bien non ? C'est bon alors, les mots et insultes, c'est pas grave, tout le monde s'est déjà fait insul­ter y a pas mort d'homme !", a enten­du une autre, à Strasbourg, en 2020. Ou encore celle-​ci qui témoigne avoir été décou­ra­gée de por­ter plainte quand elle s’est ren­due au com­mis­sa­riat de Boulogne Billancourt en 2017 : "Il m'a dit qu'en l'absence d'atteinte à mon inté­gri­té phy­sique, il n'y avait pas lieu de por­ter plainte." Et cette autre encore, à Witttenheim, en 2020 : "Les poli­ciers m'ont dit que je l'avais cher­ché en res­tant avec cette personne."

Face à cet impla­cable constat de défaillance de l’institution dans la prise en charge des vic­times, on se conso­le­ra d’un (mince) signe d’espoir. D’après l’enquête de #NousToutes, en 2021, la mau­vaise prise en charge est pas­sée sous la barre des 50% : à 46% très pré­ci­sé­ment (contrai­re­ment à 2020 où elle était à 58,1% et 2019 où elle était à 61,2%). Signe que plus les forces de l’ordre sont for­mées, plus l’accueil et la prise en charge des vic­times s'améliorent ? Dans ce cas là, il est urgent de redou­bler d’ardeur en la matière, les for­ma­tions pro­po­sées par les asso­cia­tions étant encore loin d’être géné­ra­li­sées dans les com­mis­sa­riats et gen­dar­me­ries. Pour mobi­li­ser sur le sujet, #NousToutes vient de lan­cer le hash­tag #PrendsMaPlainte sur Twitter.

Lire aus­si : Violences faites aux femmes : le com­bat continue !

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