La mère de Nahel M., l'adolescent de 17 ans tué par un tir de policier mardi matin à Nanterre, appelle à une marche blanche en hommage à son fils jeudi à 14h devant la préfecture des Hauts-de-Seine.
Une marche blanche qui sera également une « marche de la révolte ». Mounia M., la mère de Nahel, l’adolescent de 17 ans tué par un policier mardi matin à Nanterre (Hauts-de-Seine), appelle à une marche blanche en hommage à son fils. « Rendez-vous jeudi à la préfecture à 14h, marche blanche, venez tous », dit-elle dans une vidéo postée sur TikTok. Le lieu de rendez-vous, la préfecture des Hauts-de-Seine, se trouve juste en face de l'endroit où Nahel a perdu la vie, touché par un tir de policier à bout pourtant au thorax, alors qu'il était au volant d'un véhicule. « C’est une marche de la révolte pour mon fils », ajoute-t-elle très émue.
Car la mort de Nahel a provoqué une vague d’émotion puis de colère en France. La nuit qui a suivi sa mort a en effet été marquée par de vives tensions dans plusieurs villes de la banlieue parisienne, qui ont abouti à une trentaine d'interpellations. Plus de 24 heures après la mort de l'adolescent, la colère est d’ailleurs toujours vive dans le quartier du Vieux-Pont à Nanterre où vivait le jeune homme avec sa mère. « Il faut dire et répéter que c’est la faute de la police, que tuer un enfant de 17 ans, ça ne doit plus être possible en France », a par exemple réagi une habitante du quartier auprès de 20 Minutes.
Une première version contredite
« Mon fils, c’était tout pour moi. J’ai perdu un enfant de 17 ans, j’étais toute seule avec lui, ils m’ont enlevé un bébé. C’était encore un enfant, il avait besoin de sa mère », a raconté Mounia M. à Assa Traoré dans une vidéo publiée sur le compte Instagram de la militante contre les violences policières. Très émue, la mère de Nahel a confié sa douleur : « Ce matin, il m’a fait un gros bisou, il m’a dit : "Maman je t’aime". Je lui ai dit, "je t’aime, fais attention à toi”. Une heure après, on me dit quoi ? Qu’on a tiré sur mon fils. Je vais faire quoi ? Je suis désolée, j’en ai qu’un. C'était ma vie. C’était mon meilleur ami, c’était tout pour moi. On était complices comme pas possible ».
Les faits se sont produits entre 8 heures et 8h30 aux abords de la station de RER, Nanterre-Préfecture. Dans un premier temps, les médias relaient la version policière, la seule disponible. Celle d’une voiture refusant de se soustraire à un contrôle de police avant de foncer sur un policier qui n’aurait eu d’autre choix que d’ouvrir le feu sur le conducteur. Une version des faits contredite quelques heures plus tard par une vidéo filmée par un passant et diffusée massivement depuis sur les réseaux sociaux. Sur les images, on voit deux policiers placés sur le côté gauche de la voiture conduite par Nahel où se trouve aussi deux autres jeunes. L’un des policiers tient le jeune homme en joue. Dans la vidéo, on entend cette phrase : « Tu vas te prendre une balle dans la tête », sans que l’on puisse à ce stade l’attribuer à quelqu’un en particulier. Puis la voiture de Nahel redémarre et quelques instants plus tard, le jeune homme décède après avoir été atteint d’une balle au thorax.
Plainte pour « faux en écriture publique »
Placé en garde à vue dès mardi après-midi, le policier qui a tiré sur Nahel est actuellement interrogé par l’Inspection générale de la police nationale (IGPN) dans le cadre de l’enquête pour homicide volontaire par personne dépositaire de l'autorité publique ouverte par le parquet de Nanterre. Me Jennifer Cambla, l'une des avocates de la famille de Nahel a annoncé ce matin sur franceinfo vouloir déposer plainte pour « faux en écriture publique » estimant que les deux policiers ont menti en affirmant que le conducteur leur avait délibérément foncé dessus. Elle souhaite également porter plainte pour « complicité » contre le deuxième policier, qui se trouvait à côté de celui qui a tiré.
Selon les premiers éléments de l'enquête, le conducteur du véhicule avait commis plusieurs infractions au code de la route, mais « il n'en demeure pas moins que ça reste des contraventions et que ça ne justifie pas le geste qui a été fait par le policier et le fait de l'avoir abattu de sang-froid », condamne l'avocate.
Le gouvernement assure que des réponses seront prises contre le policier
Interpellé cet après-midi au Sénat, le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin a assuré que « des sanctions seront prises contre un policier », dont l'intervention, « d'après les images et les premiers éléments de l'enquête », n'était « manifestement pas conforme à la législation et à la déontologie de la police nationale ». Également interpellée au Sénat, la première ministre Élisabeth Borne a également assuré que « la justice passera, personne ne doit en douter ». « Je souhaite que la vérité soit faite le plus rapidement possible » sur ce drame, qui s'est produit lors d'« une intervention qui ne semble manifestement pas conforme aux règles d'engagement » de la police, a affirmé la première ministre.
Emmanuel Macron s’est également exprimé ce midi depuis Marseille, où il est actuellement en déplacement. « Un adolescent tué c'est inexplicable, inexcusable », a déclaré le président de la République. La Défénseure des droits, Claire Hédon, s’est aussi saisie après la mort de Nahel. Une décision motivée « au regard de l'issue tragique de cette intervention de police – le décès d'une personne -, de l'âge de la personne décédée, mineure, du déroulement de cette intervention, au cours de laquelle une arme à feu a été utilisée », a‑t-elle dit à BFM-TV. Elle va mener une enquête pour examiner les faits au regard du respect des règles de déontologie et de la sécurité et des droits de l’enfant. Elle pourra notamment demander à la justice d’avoir accès à certains documents, certaines vidéos, et mener des auditions.