Le projet de loi inscrivant l'interruption volontaire de grossesse (IVG) dans la Constitution est présenté mardi en Conseil des ministres, une mesure réclamée de longue date par les associations féministes qui saluent l'initiative mais regrettent la formulation retenue.
Selon l'exposé des motifs du projet de loi constitutionnelle (PJLC), ce sera in fine la "liberté garantie" aux femmes de recourir à l'avortement qui figurera dans la loi fondamentale, plutôt que le "droit à l'IVG" qui avait les faveurs des militant·es des droits des femmes. "La loi détermine les conditions dans lesquelles s'exerce la liberté de la femme, qui lui est garantie, d'avoir recours à une interruption volontaire de grossesse", peut-on lire dans le texte.
Demande de longue date des associations féministes et de la gauche, la question de l'inscription du droit à l'avortement dans la Constitution a ressurgi en 2022 après l'annulation de l'arrêt garantissant aux États-Unis le droit d'avorter sur tout le territoire. Cette mesure a fait l'effet d'un électrochoc dans de nombreux pays, notamment en France où des voix se sont élevées pour réclamer des actions fortes afin d'éviter une telle régression en matière de droits des femmes dans l'Hexagone.
"Les libertés reconnues aux femmes, que l'on pensait en quelque sorte impossible de faire reculer, sont remises en cause par des mouvements politiques, parfois par des dirigeants qui arrivent au pouvoir, par des jurisprudences qui changent, en fonction d'équilibre politique", a souligné Emmanuel Macron dimanche à l'occasion du 75ème anniversaire de la Déclaration des Droits de l'Homme. "C'est pourquoi la France se félicite de montrer l'exemple en inscrivant dans sa constitution la liberté de la femme de recourir à l'interruption volontaire de grossesse", a ajouté le chef de l'État. "Cette liberté sera inscrite dans notre constitution, et le texte, suite à son passage au Conseil d'État arrivera dans les prochains jours sur la table du Conseil des ministres pour que nous puissions l'adopter, et qu'il fasse ensuite son chemin législatif puis constitutionnel."
Dans les faits, l'inscription du recours à l'IVG dans la Constitution – recours à l'heure actuelle reconnu dans une loi ordinaire – est avant tout symbolique. Sa mention dans la loi fondamentale compliquerait les tentatives de le supprimer ou de lui porter gravement atteinte, mais il pourrait toujours être abrogé par une nouvelle révision constitutionnelle. "C'est symbolique", reconnait-on à l'Élysée, "mais c'est extrêmement fort. C'est un combat qui a énormément de valeur aussi dans le débat international".
Pour les féministes, un compromis
Dans les rangs des associations féministes, on salue un "symbole fort". L'inscription dans la Constitution "ne va pas changer la manière dont, aujourd'hui, les femmes ont recours à l'avortement en France, ce n'est pas suffisant pour améliorer les choses", souligne la présidente de la Fondation des femmes Anne-Cécile Mailfert, citant notamment les problèmes d'accès à l'IVG liés à la fermeture de maternités. "Néanmoins ça nous paraît nécessaire dans le contexte international d'une grande violence et d'attaques coordonnées de mouvements anti-avortement, c'est important de réaffirmer le caractère fondamental de ce droit et de réaffirmer dans quel camp se situe la France", ajoute-t-elle. "On est dans une situation qui fait que la meilleure écriture est celle qui sera votée le plus rapidement possible et c'est un compromis", abonde la présidente du Planning familial, Sarah Durocher.
À l'inverse, l'association d'extrême-droite Alliance Vita voit dans l'inscription de l'IVG dans la Constitution un "non-sens" et juge la mise en place d'une vraie "politique de prévention de l'avortement plus que jamais nécessaire".
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