Le député girondin a comparu le jeudi 24 mars devant le tribunal correctionnel de Bordeaux pour une quarantaine de faits de harcèlement à l’encontre de son ex-épouse. Il a réfuté les accusations portées contre lui.
![Harcèlement envers son ex-compagne : 18 mois avec sursis et 3 ans d'inéligibilité requis contre le député Benoît Simian 1 Benoit Simian salle 4 colonnes 19323](https://www.causette.fr/wp-content/uploads/2022/03/Benoit_Simian_salle_4_colonnes_19323-910x1024.jpg)
©G. Garitan
C’était une audience attendue qui s’est tenue jeudi 24 mars devant le tribunal judiciaire correctionnel de Bordeaux où le député de la Gironde, Benoît Simian (ex-LREM, désormais sous l’étiquette Libertés et Territoires) comparaissait pour des faits de harcèlement sur son ex-femme, Soraya Simian. Au terme de cinq heures de débat, la vice-procureure de la République de Bordeaux, Rachel Bray, a requis à l’encontre de l’élu une peine de dix-huit mois d’emprisonnement assortie d’un sursis probatoire de trois ans. Elle a aussi demandé une inéligibilité de trois ans avec une interdiction de rentrer en contact et de paraître à son domicile.
Benoît Simian, costume bleu et verbe long, s’est montré très sûr de lui devant les juges, saluant même de ça et là des connaissances, selon France 3 Nouvelle-Aquitaine. À la barre, le député s'est montré bavard. Trop même parfois. Il s'est d'ailleurs fait recadrer par son avocat à plusieurs reprises selon France 3. « Je suis un homme de dialogue », a‑t-il tenté de justifier. Puis il s'est posé en victime. « Je suis parasité par mon profil de personnage public dans cette affaire. Mon image est abîmée. »
Une quarantaine d’actes malveillants
Contrairement à son mari, l'ex-compagne s’est montrée « prostrée, repliée, tête basse », selon France 3. « N'importe quel citoyen ferait 1% de ce qu'il a fait, il finirait en garde à vue. Parce qu'il n'a pas fini en garde à vue, il a considéré qu'il pouvait se permettre de faire ce qu'il voulait », analysait à la barre Maître Ghalima Blal-Zenasni qui défend Soraya Simian.
La procureure lui reproche des agissements répétés, une quarantaine, « parfois 2 ou 3 fois par jour », commis du 1er juillet 2020 au 19 novembre 2020 à Ludon-Médoc (Gironde), où vivait le couple, dans un contexte de procédure de divorce houleuse. Les époux se séparent au courant du printemps 2020. Après avoir quitté le domicile conjugal, le député de 38 ans s’est servi de son bureau de parlementaire installé dans le jardin pour multiplier les actes malveillants à l’encontre de son ex-épouse et de ses enfants. « Il a tagué la boîte aux lettres, volé les poubelles, cassé des caméras, témoignait ainsi son ex-femme au micro de RTL en octobre 2020. Il nous [ses enfants et elle, ndlr] écoutait, il nous observait, il était tout le temps-là, du matin au soir. »
Mesures de protection
Pas un jour ne passe sans un énième rebondissement, si bien que Soraya Simian décide de porter plainte contre son ex-compagnon, également ancien maire de Ludon-Médoc. Dès le 3 août 2020, elle a fait l’objet d’une ordonnance de protection, interdisant à Benoît Simian de l’approcher et d’entrer au domicile. Puis, le 10 septembre, elle s’est vue confier un « téléphone grave danger », destiné à donner l’alerte aux forces de l’ordre en cas d’urgence. Et pour cause, Benoît Simian continue de se rendre chez son ex-femme, malgré l’interdiction de s’y présenter. « On se sent surveillé. On se demande ce qui va arriver. Du coup, ça nous pourrit la vie parce que j’arrive le soir et je ne peux pas faire à manger aux enfants ou les laver parce qu’il coupait le gaz, je n'avais plus d’eau chaude », avait détaillé Soraya Simian chez RTL. Le Monde révélait en janvier 2021 que Benoît Simian s’était même fait passer pour un représentant de commerce venu vendre des pots de miel, devant les gendarmes de Ludon-Médoc, pour justifier sa présence au domicile conjugal. Puis avait changé de stratégie en arguant souffrir d’amnésie depuis une séance d’hypnose.
Une procédure avait alors été ouverte pour harcèlement moral par conjoint. Un médecin avait établi pour son épouse une « incapacité temporaire de travail » (ITT) supérieure à huit jours, qui a provoqué la « dégradation des conditions de vie altérant la santé ». Mais l’Assemblée nationale ayant refusé, le 9 décembre 2020, la demande de la procureure de Bordeaux de lever l’immunité du parlementaire, l’affaire s’était enlisée de nombreux mois. Avec ce refus, Benoît Simian ne pouvait en effet ni être placé en garde à vue ni faire l’objet d’une perquisition. Un refus qui avait néanmoins suscité de vives réactions d’élues et associations féministes.
Lire aussi : Clémentine Autain dénonce la passivité de l’Assemblée nationale dans l’affaire Benoît Simian
Tentative de soustraction
Il avait fallu attendre une entrevue sous le régime de l’audition libre (non contraignante) pour qu’en novembre 2021, Benoît Simian soit renvoyé devant le tribunal correctionnel de Bordeaux, avait révélé à l’époque Mediapart. Selon les informations du site, les forces de l’ordre ont plusieurs fois déploré l’attitude de l’élu pendant l’enquête. Benoît Simian n’a pas hésité à faire valoir ses relations (réelles ou supposées) glissant par exemple au cours d’un échange qu’il avait des contacts haut placés « au ministère de l’Intérieur ». Ou prétextant avoir un « dîner important » pour tenter de se soustraire aux questions des gendarmes alors qu’il s’agissait d’un repas chez sa mère, comme le révélait Le Monde.
« Il est là, il rôde, il gêne, il marque son territoire. Le problème, c'est l'omniprésence de Monsieur Simian. Il a décidé de lui pourrir la vie », a soutenu la vice-procureure lors du procès ce 24 mars. De son côté, Benoît Simian a toujours nié les faits de harcèlement et a même déposé plainte contre son ex-femme pour violence. L'avocat de l'élu, Me Olivier Couleau, a dénoncé « une mise à mort politique ». Le jugement a été mis en délibéré au 23 juin. Le député est également visé depuis février dans une deuxième enquête pour des faits de harcèlement, cette fois à l'encontre d'une de ses collaboratrices à l'Assemblée.