Des joueurs de Guingamp, Nantes ou encore Toulouse ont refusé ce week-end de porter le maillot arc-en-ciel dans le cadre de la campagne annuelle « Homos ou hétéros, on porte tous le même maillot » organisé par la Ligue de football pour lutter contre l'homophobie. Les associations s’insurgent.
![Football : des joueurs de Ligue 1 et Ligue 2 refusent de porter le maillot arc-en-ciel contre l’homophobie 1 Capture d’écran 2023 05 15 à 11.57.52](https://www.causette.fr/wp-content/uploads/2023/05/Capture-d’écran-2023-05-15-à-11.57.52.jpg)
de Zakaria Aboukhlal
Ce week-end du 13 et 14 mai, sur toutes les pelouses de Ligue 1 et Ligue 2, les joueurs de foot devaient porter des maillots arborant les couleurs de l'arc-en-ciel, symbole LGBTQ+. Une initiative de la Ligue de football professionnel (LFP) mise en place depuis trois saisons dans le cadre de la journée mondiale de lutte contre l’homophobie (qui aura lieu le 17 mai). Or, d'après Libération, certains footballeurs des clubs de Guingamp, Nantes ou encore Toulouse ont dû être retirés des feuilles de match à cause de leur refus de soutenir la communauté LGBTQ +.
Dimanche, les joueurs du Toulouse football club (TFC) et du Football club de Nantes (FCN), Zakaria Aboukhlal et Mostafa Mohamed n'ont pas participé à la rencontre entre leurs deux clubs à l’occasion de la 35e journée de Ligue 1. Zakaria Aboukhlal, titulaire régulier, n’a pas joué car il refusait de porter le maillot floqué aux couleurs de la communauté LGBTQ + soulignant qu’il n’était pas « la personne la plus adéquate pour participer à cette campagne ». Selon la Dépêche du Midi, les joueurs Logan Costa et Farès Chaïbi ne voulaient pas non plus porter le maillot, alors qu’eux figuraient bien sur la feuille de match.
Du côté des Nantais, Mostafa Mohamed qui n’a pas non plus souhaité porter ce maillot aux couleurs LGBTQ+, a expliqué ses raisons sur les réseaux sociaux : « Je respecte toutes les différences. Je respecte toutes les croyances et toutes les convictions. Ce respect s’étend aux autres, mais comprend également le respect de mes croyances personnelles. Vu mes racines, ma culture, l’importance de mes convictions et croyances, il n’était pas possible pour moi de participer à cette campagne. J’espère que ma décision sera respectée », a écrit le joueur de foot égyptien.
Samedi, c'était le défenseur de Guingamp Donatien Gomis qui a préféré déclarer forfait pour le match de Ligue 2 à Sochaux, qui a eu lieu dans la soirée, pour ne pas participer à la campagne de lutte contre l’homophobie, a confirmé le club de foot de Guingamp, après une information du Télégramme. Le club en a « pris acte » et le président Fred Le Grand doit revoir le joueur de 28 ans la semaine prochaine.
C'est à l’occasion de la campagne annuelle « Homos ou hétéros, on porte tous le même maillot » que tous les joueurs de Ligue 1 et Ligue 2 devaient porter ce week-end un maillot aux couleurs de l’arc-en-ciel, qui ornent aussi les brassards des capitaines. Ces maillots doivent ensuite être vendus aux enchères au profit des associations Foot Ensemble, PanamBoyz & Girlz United et SOS Homophobie, selon Libération.
Des réactions dans la ville rose
À Toulouse, les refus des joueurs n’a pas tardé à faire réagir. Dans un communiqué dimanche après-midi, le TFC a confirmé que des « joueurs de l’effectif professionnel ont exprimé leur désaccord concernant l’association de leur image aux couleurs arc-en-ciel représentant le mouvement LGBT » mais a précisé que le club a par conséquent « choisi d’écarter lesdits joueurs pour la rencontre prévue ce dimanche à 15 heures au Stadium de Toulouse », faisant valoir « son engagement de longue date dans la lutte contre l’homophobie et toutes les formes de discriminations ».
L’adjointe au sport de la ville rose, Laurence Arribagé, s'est également exprimée sur la situation : « Le sport rassemble dans un esprit de tolérance et de respect de la diversité. S’unir dans la diversité, c’est refuser toutes les discriminations, y compris celles fondées sur l’orientation sexuelle. Nous déplorons le choix des quelques joueurs qui ne font pas honneur à ces valeurs », a‑t-elle regretté sur Twitter.
« Le football français est décidément un grand corps malade »
L’association PanamBoyz & Girlz United a, quant à elle, salué sur Twitter « les réactions sans ambiguïté de nombreux supporters toulousains », choqués comme elle par le refus des joueurs de participer à la journée de lutte contre l’homophobie dans le football.
Catherine Michaud, présidente de l’association GayLib, également élue Radicale de Paris et conseillère régionale d’Ile de France, a, elle, condamné ces refus de jouer ce dimanche dans un communiqué : « L’homophobie n’est pas une opinion, mais un délit. Elle ne peut pas être cautionnée ni par le club employeur ni par les autorités encadrant les sports en France. »
L’association en a d’ailleurs profité pour rappeler que les joueurs de foot sont des salariés comme les autres. « Un joueur ne peut pas se soustraire à une action de lutte contre les discriminations à laquelle participe son club, son employeur, en raison de croyances personnelles ou religieuses », insiste l’avocat et membre de l’association Yann-Mael Larher, cité dans le communiqué de l'association. GayLib appelle les clubs en question à « sanctionner fermement » ces joueurs.
Le collectif de lutte contre l’homophobie dans le sport amateur comme professionnel Rouge Direct s'est joint à ces interpellations, réclamant dans un communiqué une « vraie politique de lutte contre l’homophobie dans le football, comme en Angleterre ou en Allemagne entre autres ». Le collectif dénonce l’ « inaction des instances du football » et écrit : « Le football français est décidément un grand corps malade, l’homophobie en est un des principaux foyers d’infection. Il est plus que temps de passer à des paroles ambitieuses et à des actions concrètes, à grande échelle. »
La ministre des sports demande des sanctions
Invitée de Stade 2 dimanche soir, la ministre des Sports, Amélie Oudéa-Castéra a réagi à ces refus de porter le maillot arc-en-ciel. « Je regrette vivement qu’on n’ait pas 100 % des joueurs en France qui se retrouvent dans ce message de non-discrimination. On est dans un pays qui a toujours promu le respect des autres, des droits de l’Homme. C’est essentiel qu’on puisse tous se retrouver dans un message aussi basique de vivre ensemble », a‑t-elle précisé. La ministre a notamment insisté sur la « responsabilité des clubs », et a réclamé un dialogue et des sanctions contre ces joueurs.
C’est l’international Idrissa Gana Gueye, alors milieu de terrain du PSG et aujourd’hui à Everton qui avait ouvert la marche à ces actes homophobes l'année dernière après avoir déclaré forfait, sur fond de blessure, pour ne pas porter le maillot aux couleurs arc-en-ciel. Le Sénégalais avait été sommé de s’expliquer par le conseil national de l’éthique (CNE) de la Fédération française de football (FFF), un organe qui n’a néanmoins pas de pouvoir contraignant, mais avait reçu un large soutien du Sénégal, selon Libération.