Selon une nouvelle étude Ifop, 4 millions de femmes et jeunes filles seraient aujourd'hui confrontées à la précarité menstruelle. Les Français·es sont par ailleurs de plus en plus nombreux·euses à faire l’impasse sur des produits d’hygiène pour des raisons économiques.
“Dans un contexte inflationniste de plus en plus difficile, les Français sont obligés de repenser leur consommation, jusqu’à supprimer l’achat de certains produits et notamment les produits d’hygiène de base tels que les déodorants, les couches et les serviettes hygiéniques”, affirme le troisième baromètre “Hygiène & Précarité en France” de l’Ifop pour Dons solidaires. Cette nouvelle étude met en lumière la progression de la précarité hygiénique en France, qui impacte aujourd’hui de près ou de loin 34 % des Français·es. Les femmes et jeunes filles sont par ailleurs de plus en plus nombreuses à manquer de protections périodiques, faute de moyens.
La précarité menstruelle progresse de 6% en deux ans
La précarité menstruelle connaît une “progression alarmante”, selon cette nouvelle étude Ifop. Ainsi, “4 millions de femmes (31 %) ont déjà manqué de protections périodiques par manque de moyens”, tandis que “2,8 millions [déclarent] ne pas en disposer suffisamment de façon régulière, contre 1,7 million en 2021”. Des chiffres qui révèlent une progression de 6 % en deux ans. Le manque d’accès à des protections périodiques touche plus particulièrement les jeunes femmes (20 % des 18–24 ans) et les personnes précarisées.
De nombreuses femmes font l’impasse sur ce produit essentiel pour des raisons économiques et recourent à des alternatives dégradantes ; 11 % des Français·es utilisent “des produits de substitution tels que des mouchoirs ou du papier toilette. Une proportion qui est encore en progression par rapport à 2021 (6 %)”, poursuit l’étude. “On met du papier toilette, surtout moi, je me prive pour laisser plus de protections à mes filles”, témoigne dans le cadre de cette enquête une maman solo de 6 enfants, bénéficiaire d’une association à Asnières. Les mères et parents renoncent par ailleurs aussi à l’achat de couches (13 % de Français·es) pour leurs enfants, “victimes collatérales de la précarité hygiénique grandissante en France”.
Les populations précarisées, mais pas que
Cette étude s’appuie sur deux panels de répondant·es : une première enquête a été réalisée sur “un échantillon représentatif de la population française” et une seconde a été “administrée à des bénéficiaires d’associations”. Une méthodologie qui permet d’une part de souligner l’impact de ces restrictions hygiéniques suscitées par l’inflation sur les populations d’ores et déjà défavorisées, toujours plus touchées par l’augmentation du coût de la vie (56 % des bénéficiaires d’associations disent par exemple contrôler la consommation de gel douche et de shampoing pour leurs enfants). Et, d’autre part, de révéler la progression de la précarité hygiénique au sein d’une quantité grandissante de foyers français. “Le renoncement aux produits d’hygiène ne concerne plus seulement les bénéficiaires d’associations, mais près d’un tiers de la population”, déclare l’Ifop.
Autres points d’orgue de cette étude, la dégradation de l’estime de soi et l’isolement causés par ces restrictions hygiéniques augmentent également. “1 Français sur 10 se sent mal à l’aise en raison de son hygiène personnelle, et près d’un quart d’entre eux a peur d’être jugé du fait d’une mauvaise présentation de soi”, révèle l’enquête de l’Ifop. Dans l’incapacité de se procurer des produits d’hygiène de base, de plus en plus de Français·es souffrent d’une maigre estime d’eux·elles-mêmes et s’isolent, particulièrement les jeunes. Par peur d’être jugé·es, ce sont donc “près de 4 jeunes de ‑25 ans sur 10 [qui] préfèrent éviter les sorties (37 %) ou ignorer des connaissances (38 %)”, rapporte cette étude. Cette dernière insiste ainsi sur “le manque d’accès aux produits d’hygiène de base” en tant que facteur massif d’exclusion sociale.