Alors que le déficit public de la France a atteint des sommets et que le gouvernement annonce des coupes budgétaires pour l’éponger, l’ONG Oxfam enjoint la France à suivre le Brésil dans son appel à organiser au niveau mondial la taxation des nanti·es.
Tax the Rich. En 2021, c’était une robe portée à un gala par l’élue américaine démocrate Alexandria Ocasio-Cortez. En 2024, c’est, pêle-mêle, une proposition de la gauche au Parlement européen, une banderole d’Attac déployée fin février sur l’immeuble Vuitton (propriété de Bernard Arnault) des Champs-Élysées à l’origine de gardes à vue et, désormais, un plaidoyer du président brésilien Luiz Inacio Lula da Silva pour coordonner une fiscalisation internationale des ultrariches.
Pour l’ONG Oxfam, il est du devoir du président français Emmanuel Macron, en visite au Brésil mardi, de répondre favorablement à l’appel de son homologue brésilien. “Emmanuel Macron serait bien inspiré de soutenir la proposition brésilienne au G20 Finances en février”, a exhorté la présidente d’Oxfam France, Cécile Duflot, citée dans un communiqué de l’ONG, en référence à la proposition du Brésil de taxer les “super-riches” au niveau international. Après une visite en Guyane lundi et mardi, le président français se rend au Brésil pour tenter de renforcer le partenariat bilatéral avec Lula, qui a repris la présidence du pays en 2023.
"Éradiquer la faim dans le monde"
Une taxation minimale des grandes fortunes est une des priorités du Brésil. Au cours du dernier G20 Finances à Sao Paulo, en février, le ministre des Finances, Fernando Haddad, a déclaré espérer un accord sur une déclaration commune d’ici à la prochaine réunion ministérielle de cette organisation, qui rassemble les pays les plus puissants au monde. De son côté, la France, par l’intermédiaire du ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, s’est dite, à l’occasion de ce G20 Finances, favorable à “une taxation minimale des individus afin de combattre toute forme d’optimisation fiscale des personnes à travers le monde”. Ce débat survient au moment où la France cherche de l’argent frais après avoir subi un dérapage de ses comptes publics, mais veut en priorité réduire ses dépenses plutôt que d’augmenter les impôts.
Les contours d’une potentielle position commune pour une imposition accrue des plus fortuné·es sont pour le moment très flous. L’idée d’une taxation accrue des plus riches se heurte depuis des années à l’absence d’une ambition internationale et aux difficultés d’accorder des systèmes fiscaux très différents. Or, selon Oxfam, un impôt annuel sur la fortune allant jusqu’à 5 % sur les multimillionnaires et les milliardaires des pays du G20 pourrait rapporter près de 1 500 milliards de dollars par an. Cette somme “suffirait pour éradiquer la faim dans le monde, aider les pays à revenu faible et intermédiaire à s’adapter aux changements climatiques et remettre le monde sur la voie de la réalisation des objectifs de développement durable (ODD) des Nations unies”, estime Oxfam. Car, finalement, attendre le “ruissellement des richesses” naturel théorisé par les néolibéraux, c’est un peu comme attendre la pluie à Perpignan, et Godot avec elle.