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Aidant·es : un congé désor­mais rému­né­ré, mais tou­jours pas de répit

Depuis le 1er octobre, le congé de proche aidant est rému­né­ré. Les aidant·es salarié·es pour­ront désor­mais prendre des jours de congés rému­né­rés par l’État afin de prendre soin de leurs proches. De leur côté, en cette jour­née du 6 octobre qui est la leur, les aidant·es ont pré­fé­ré axer leurs reven­di­ca­tions sur le thème du répit. Une demande urgente et criante pour les 11 mil­lions de Français·es qui accom­pagnent un proche en perte d’autonomie ou vic­time de patho­lo­gies lourdes.

Bonne nou­velle pour les per­sonnes qui s’occupent d’un parent malade ou han­di­ca­pé : depuis le 1er octobre, le « congé de proche aidant » est désor­mais rému­né­ré, à la suite d’une déci­sion du gou­ver­ne­ment, qui compte allouer 105 mil­lions d’euros sur la période 2020–2022 pour finan­cer la mesure, ain­si que ren­for­cer « la diver­si­fi­ca­tion des solu­tions de répit ».

En France, par­mi les 11 mil­lions d’aidant·es fami­liaux, 57 % conti­nuent une acti­vi­té professionnelle​*​. Mesure phare de la ren­trée du minis­tère des Solidarités et de la Santé, l’amélioration du « congé de proche aidant » était atten­due : faute d’être rému­né­ré et réser­vé aux salarié·es du sec­teur public, cet outil, qui per­met aux aidant·es de poser des congés de façon à s’occuper de leurs proches, était jusque là peu uti­li­sé. En même temps qu’il devient rému­né­ré, il vient d’être éga­le­ment élar­gi aux salarié·es du sec­teur pri­vé, indépendant·es et demandeur·euses d’emploi, tout autant concerné·es par le sujet.

« Être indem­ni­sé est fon­da­men­tal, sinon c’est la double peine… » 

Églantine Emeyé, mar­raine de l’association Je t’Aide

Le mon­tant de l’allocation jour­na­lière est de 52,08 euros pour une per­sonne vivant seule et 43,83 euros pour une per­sonne vivant en couple. Ce qui lui per­met­tra donc de pal­lier son absence tem­po­raire au tra­vail, sous cer­taines condi­tions, et dans un temps limi­té de trois mois maxi­mum, renou­ve­lable quatre fois au cours de la car­rière. Céline, 35 ans, accom­pagne son père atteint d’Alzheimer. « J’ai enten­du par­ler du congé indem­ni­sé pour les aidants, c’est une très bonne chose », considère-​t-​elle.

De son côté, Églantine Éméyé, jour­na­liste et mar­raine de l’association Je t’Aide, qui porte en France cette jour­née natio­nale, reste sur sa faim. « Être indem­ni­sé est fon­da­men­tal, sinon c’est la double peine, alerte-​t-​elle. Mais à par­tir d’un cer­tain niveau de salaire, cette nou­velle aide reste infé­rieure à un congé mala­die, qui est plus rému­né­ra­teur. La solu­tion est donc obso­lète avant même sa mise en place ! Et de nom­breuses per­sonnes ne sont pas éli­gibles à cette aide ou n’y trouvent pas leur compte. »

Petits moyens et solu­tion qui sont loin de concer­ner les 11 mil­lions d’aidant·es. Bien sou­vent, l’aidant·e doit renon­cer à tra­vailler, du moins en par­tie, pour se consa­crer à son proche. Céline observe : « Cette mesure va donc dans le bon sens, mais encore faut-​il que les aidants puissent conti­nuer à tra­vailler à temps plein, ce qui s’avère sou­vent com­pli­qué. Pour ce faire, il fau­drait mettre en place plus de moyens pour le main­tien des aidés à domi­cile. » 37 % de l’ensemble des aidant·es avouent ne béné­fi­cier d’aucune aide exté­rieure alors qu’ils ont 65 ans ou plus. Accompagner un parent est un inves­tis­se­ment moral, phy­sique, mais aus­si éco­no­mique puisque 66 % des per­sonnes impli­quées dépensent de leur poche 2 000 euros par an en moyenne pour pal­lier les besoins, notam­ment en trans­port, frais de san­té et aides à domicile.

Pour les per­sonnes concer­nées, ce nou­veau congé payé n’est donc qu’une pre­mière étape dans la recon­nais­sance du tra­vail qu’ils accom­plissent. Au centre des reven­di­ca­tions mises en lumière par Je t’Aide cette année, la ques­tion de la récu­pé­ra­tion et du répit.

« Nous avons un besoin urgent de pou­voir reprendre notre souffle ! » 

Églantine Éméyé, mar­raine de l’association Je t’Aide

Maman de Samy, jeune gar­çon autiste et poly­han­di­ca­pé, Églantine Éméyé dénonce ain­si l’épuisement de celles et ceux qui accom­pagnent qua­si en per­ma­nence leurs proches. « Nous avons un besoin urgent de pou­voir reprendre notre souffle ! Nous sommes très nom­breux et on craque… Avant d’atteindre un point de non-​retour, il faut être sou­te­nu. Et pou­voir par­tir en week-​end en sachant que des pro­fes­sion­nels prennent le relais en atten­dant. » 

Lire aus­si : « Mon tra­vail ? Veiller à tout… » : des aidant·es épuisé·es témoignent

En la matière, de bonnes pra­tiques com­mencent à être mises en œuvre. Le sys­tème de « balu­chon­nage », venu du Québec et expé­ri­men­té en France depuis 2018, tend à appor­ter des solu­tions pour per­mettre aux aidant·es de trou­ver un peu de répit. Le concept est simple : un·e professionnel·le de san­té vient prendre le relais à domi­cile, accom­pagne les aidant·es et leur per­met de par­tir quelques jours en assu­rant une veille 24 h/​24 auprès de la per­sonne aidée. Déjà pro­po­sé par quelques asso­cia­tions, le balu­chon­nage, ou « relayage » en France, n’est pas encore plei­ne­ment démo­cra­ti­sé ni connu de tous les aidant·es, qui sont 31 % à délais­ser leur propre san­té et bien-être.

C’est pour­quoi la jour­née de sen­si­bi­li­sa­tion du 6 octobre vise, en pre­mier lieu, à une prise de conscience col­lec­tive des dif­fi­cul­tés ren­con­trées par des aidant·es qui par­fois même s’ignorent : leur faire prendre conscience de leur sta­tut et, ensuite, por­ter à leur connais­sance les dis­po­si­tifs d’accompagnement exis­tants. Selon la DRESS​†​, ils seront un·e actif·ive sur quatre à l’horizon 2030. 


  1. *​
    * Tous les chiffres pré­sents dans cet article pro­viennent du baro­mètre BVA APRIL 2018 publié le 27 sep­tembre 2018 ; enquête réa­li­sée en mai-​juin 2018 par télé­phone auprès d’un échan­tillon de 2007 per­sonnes dont 456 aidants et 1551 non-​aidants, repré­sen­ta­tif de la popu­la­tion fran­çaise âgée de 15 ans et plus
  2. †​
    La Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques
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