Ce scrutin propose un amendement à la Constitution locale qui permettra de déterminer la législation de l’Ohio concernant l’IVG, plus d’un an après l’annulation de l’arrêt Roe vs Wade. L’Ohio est un État crucial dans la bataille qui oppose les démocrates aux républicains en marge de la présidentielle de 2024.
Depuis l’annulation par la Cour suprême des États-Unis de l’amendement Roe vs Wade, garantissant le droit fédéral des Américaines à interrompre leur grossesse, l’Amérique connaît un retour en arrière faramineux en ce qui concerne l’accès à l’avortement. Depuis un an et demi, la question est entre les mains des États, à qui il appartient de légiférer en matière d’IVG. Plusieurs se sont empressés de restreindre, voire d’interdire l’IVG, d’autres ont au contraire renforcé sa protection. L’État de l’Ohio, dans le Midwest, est quant à lui appelé à se prononcer mardi 7 novembre, sur l’inscription ou non dans sa Constitution du droit à l’avortement. Un scrutin test qui devrait permettre aux démocrates et aux républicains d’affiner leurs discours et leur stratégie nationale sur cette question centrale, avant la présidentielle de 2024. À travers l’Ohio, les groupes pro et antiavortement se sont mobilisés dimanche pour appeler les électeur·rices à aller voter avant la fin du scrutin mardi soir.
“Nous aurons des gens dehors aujourd’hui, lundi et mardi jusqu’à la fermeture des bureaux de vote, pour appeler et frapper à la porte d’autant de personnes que possible afin de parler à chaque électeur”, a expliqué à l’AFP Jaime Miracle, directrice adjointe de l’association proavortement Pro Choice Ohio. Le scrutin se clôt mardi soir, mais les électeur·rices de l’Ohio votent par anticipation depuis des semaines déjà.
Cet amendement à la Constitution locale, intitulé “Issue 1” et présenté par une initiative citoyenne proavortement, prévoit que toute personne a “le droit de prendre et d’appliquer ses propres décisions” en matière notamment d’avortement, de contraception et de traitement lié à la fertilité ou aux fausses couches. Le scrutin se présente sous forme de “oui” ou “non”. Le texte précise que l’avortement peut tout de même être interdit une fois que le fœtus est considéré comme pouvant être viable en dehors de l’utérus. Mais un tel avortement ne peut être prohibé si le médecin juge que la vie ou la santé de la femme est en danger. Dans l’Ohio, une première loi était déjà entrée en vigueur et interdisait la plupart des avortements – même en cas de viol ou d’inceste – dès qu’un battement de cœur peut être détecté. C’est-à-dire vers six semaines, souvent avant même qu’une femme ait connaissance de sa grossesse. Ce texte est actuellement en suspens depuis qu’une fillette de 10 ans enceinte après un viol a dû se rendre dans l’Indiana voisin pour avorter. En attente d’une décision juridique à la suite de cette affaire qui avait ébranlé tout le pays, il est actuellement possible d’avorter jusqu’à environ vingt-deux semaines de grossesse dans l’État du Midwest.
Plusieurs autres votes sur l’avortement se sont soldés l’an dernier par la victoire du camp proavortement, comme dans le Kansas, au grand dam des républicains. Les antiavortement n’hésitent d’ailleurs pas à qualifier la proposition d’amendement de l’Ohio d’“extrême”. “C’est une proposition radicale, et que vous soyez pro choix ou pro vie, elle va beaucoup, beaucoup trop loin”, s’est exclamé dimanche le gouverneur républicain de l’État, Mike DeWine, sur Fox News. “Elle inscrirait dans notre Constitution le droit d’avorter jusqu’à la naissance, donc à tout moment de la grossesse”, a‑t-il poursuivi – une affirmation démentie par le camp adverse et dénoncée comme de la désinformation.
De leur côté, les démocrates ont choisi d’axer leur campagne sur la nécessité d’empêcher toute ingérence de l’État dans des décisions “médicales personnelles”. La coalition Ohioans United for Reproductive Rights a, par exemple, fait appel à un religieux dans l’un de ses spots de campagne. “En tant que pasteur, j’ai conseillé des familles sur les décisions personnelles les plus importantes, même l’avortement. L’avortement est une décision familiale privée. L’État doit rester en dehors de la prise de décision familiale”, y déclare le révérend Tim Ahrens.
L’État de l’Ohio revêt pour les deux camps une importance d’autant plus grande – en marge de la présidentielle de 2024 – qu’il a souvent été considéré comme un “swing state”, un de ces États cruciaux car oscillant entre démocrates et républicains et susceptibles de faire pencher la balance. En attendant 2024, l’issue du scrutin – qui se clôturera mardi soir – permettra de davantage fixer les habitant·es de l’Ohio quant à leur sort reproductif.