Le ministère de l’Intérieur britannique a donné son accord pour lancer une nouvelle campagne visant à décourager l’immigration clandestine à l’aide de contenus TikTok.
Le ministre de l’Intérieur britannique, James Cleverly, prévoit de rémunérer des influenceur·euses pour dissuader les candidat·es à l’exil en France, en Belgique et en Albanie, de traverser la Manche sur des bateaux de fortune. Selon des informations du Times, une liste de personnes albanaises approchées pour participer à cette campagne a déjà été établie et comprend “un rappeur, deux comédiens, des blogueurs lifestyle, des personnalités de la télévision et un écrivain voyageur”. Ces influenceur·euses vivant en Albanie devraient toucher 5 800 euros chacun·e pour ce service, qui implique notamment d’informer les migrant·es qui tenteraient de se rendre au Royaume-Uni de leur potentielle expulsion vers le Rwanda, souligne The Independant.
Une campagne en pleine expansion
L’initiative entière du gouvernement devrait coûter au contribuable 576 500 livres, soit 675 000 euros, d’après des documents consultés par The Times. Cela fait trois ans que le ministère de l’Intérieur britannique dépense de l’argent public pour financer des publicités sur les réseaux sociaux visant à dissuader les demandeur·euses d’asile de se rendre en Angleterre. Des discussions avec les gouvernements de l’Irak, du Vietnam et de l’Égypte seraient par ailleurs en cours pour étendre la campagne à ces pays. La Turquie et l’Inde pourraient être approchées par la suite.
“Les passeurs utilisent fréquemment les réseaux sociaux pour colporter des mensonges et promouvoir leurs activités criminelles, et il est essentiel que nous utilisions les mêmes plateformes pour dire la vérité aux migrants sur la traversée de la Manche, et les arrivées illégales au Royaume-Uni”, a rétorqué auprès de Sky News un porte-parole du ministère de l’Intérieur. Entre janvier 2021 et septembre 2022 déjà, le gouvernement avait versé à Meta au moins 35 000 euros pour la diffusion dans le nord de la France et de la Belgique de centaines de publicités Facebook et Instagram, selon des révélations de The Independent.
“Patchwork de profils”
Si le succès de ces initiatives est difficile à déterminer, le porte-parole du ministère affirme encore que “les mesures implacables [prises] ont permis de réduire les traversées de 36 % l’année dernière, qui a connu des conditions météorologiques similaires à celles de 2022”. Ce représentant du gouvernement ajoute encore : “Nous ne nous excusons pas d’utiliser tous les moyens nécessaires pour arrêter les bateaux et sauver des vies.”
Les internautes ciblé·es par les campagnes précédentes étaient sélectionné·es selon leur langue – notamment l’arabe, le kurde et le persan – et leurs “centres d’intérêt” déduits, à l’instar du football et du cricket afghans, du cinéma iranien, ou de la “cuisine irakienne”. D’après InfoMigrants, des chercheur·euses universitaires avaient pu démontrer que ces publicités touchaient en réalité des touristes et des hommes d’affaires en déplacement. Ben Collier, de l’université d’Édimbourg, interrogé par The Independant, estime quant à lui qu’il s’agissait d’un “étrange patchwork de profils”.
Si une baisse des arrivées de migrant·es en Angleterre sur le littoral est effectivement constatée, les tragédies en mer restent nombreuses. InfoMigrants cite en ce sens un drame survenu dans la nuit du samedi 13 au dimanche 14 janvier. Cinq personnes ont trouvé la mort dans une eau à 9 degrés alors qu’elles tentaient de rejoindre une embarcation. Deux adolescents, Abadah, 14 ans, et Mohamed, 16 ans, originaires de Deraa, en Syrie, figurent parmi les victimes. Ils vivaient sous un pont de Calais avant de tenter la traversée vers le Royaume-Uni.
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