Le 19 août, la cheffe de gouvernement finlandais Sanna Marin a dû tenir une conférence de presse pour répondre à la polémique soulevée par la diffusion d’une vidéo la montrant en train de danser lors d’une soirée privée.
Une tempête médiatique dont Sanna Marin se serait bien passée. Diffusée sur les réseaux sociaux la semaine dernière, une vidéo privée montrant la première ministre finlandaise, 36 ans, en train de festoyer avec un groupe d'ami·es dans une ambiance gentiment exaltée, a suscité une salve de critiques dans le pays. À tel point que la figure de proue du Parti social-démocrate a dû se soumettre, le 19 août, à un test d’urine, revenu négatif, pour « dissiper les soupçons » et organiser une conférence de presse pour se défendre. « Je suis un être humain. J’aspire parfois aussi à la joie, à la lumière et au plaisir au milieu de ces nuages sombres » s'est-elle défendue en larmes, le 24 août, dans les locaux de son parti, le Parti Social Démocrate (SDP), à Lahti, dans le sud du pays.
Après les critiques, c'est une vague de soutien à Sanna Marin qui s'est déclenchée. Ainsi, le hashtag #SolidarityWithSanna a esseumé, tout comme un montage vidéo de femmes qui se filment en dansant, publié par le magazine féminin danois Alt for Damerne. En France, des voix féministes ont elles aussi affiché leur soutien à la Première ministre conspuée.
« Une stratégie de contrôle des femmes »
« Personne n’est sincèrement indigné par cette vidéo, mais les réactions participent d’une stratégie de contrôle des femmes et de leur corps » a martelé le 22 août, Mélanie Vogel, sénatrice Europe Écologie les Vert·e·s des Français·es de l’étranger dans une interview pour L'Obs. Si « ces techniques d’intimidation marchent encore » au point « où elle a subi assez de pression pour passer un test de dépistage antidrogue », « on a très peu parlé du fait que c’est avant tout une affaire de violation de la vie privée » a souligné la Sénatrice.
Par ailleurs, « en exerçant un métier traditionnellement masculin » et « en accédant à la tête de son pays en 2019 à 34 ans », « la jeune femme bouscule les codes patriarcaux à un point intolérable [pour ses détracteurs] » a avancé la journaliste féministe Fiona Schmidt, sur Instagram, le 23 août. En Finlande, même si en 2019, le Parlement est proche de la parité entre les sexes, comptant 93 femmes sur un total de 200 députés, « les normes comportementales pour les femmes sont très strictes » affirmait Iiris Suomela, dans Equal Times, la plus jeune députée du Parlement d'alors. Pourtant, « la classe politique française n’a pas de leçon à donner à la Finlande quant aux réactions sexistes et agistes » a préféré rappeler Raphaëlle Rémy-Leleu, Conseillière de Paris et porte-parole des Vert·e·s, le 20 août, sur Twitter.
Double-standard
Le flot de critiques reçu par Sanna Marin questionne au final le double standard auquel sont soumis·es les politicien·nes selon leur genre. Ainsi, lorsque l’ex-premier ministre anglais, Boris Johnson, cumulait les fêtes illégales en pleine crise sanitaire du Covid entre 2020 et 2021, il n'a jamais été question pour lui d'effectuer un test public pour consommation prétendue de stupéfiant. « C’est le pseudo-scandale politique bien sexiste comme on aime, abonde sur Twitter la réalisatrice Amandine Gay. Quand Boris Eltsine et Clinton étaient saouls, en fou rire et en représentation publique de chefs d’Etat, c’était potache. » « Les hommes réseautent en sortant et picolant […], si les femmes font de même : de grosses salopes incompétentes », résume, avec la verve qu'on lui connait, l'essayiste Valérie Rey-Robert le 25 août. « L’égalité des genres en politique (et ailleurs) est encore loin d’être atteinte, y compris dans les pays qui s’en approchent le plus. » conclut donc Fiona Schmidt.
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