La décision de justice de la Cour suprême de l’Alabama pourrait avoir des “conséquences dévastatrices” pour les procédures de fécondation in vitro dans cet État très conservateur du sud des États-Unis.
Dans une décision de justice rendue vendredi 16 février, la Cour suprême de l’Alabama a considéré les embryons conservés par congélation comme des “enfants”. Une décision vivement critiquée depuis. “À travers le pays, les femmes en viennent à subir les conséquences dévastatrices des actions des élus républicains”, a dénoncé, mardi 20 février, la porte-parole de la Maison-Blanche, Karine Jean-Pierre.
À l’origine de la décision de la Cour suprême de l’Alabama, une plainte de trois couples contre une clinique pratiquant des fécondations in vitro. Citant à l’appui une loi de 1872 sur les décès de mineur·es imputables à une faute, les couples ont porté plainte après qu’un autre patient, en entrant dans un lieu de stockage, a détruit accidentellement leurs embryons. Un tribunal avait d’abord écarté la plainte, estimant que les embryons ne pouvaient pas être qualifiés de “personne” ou d’“enfant”. Mais vendredi, avec une majorité de sept juges contre deux, tous et toutes républicain·es, la Cour suprême de l’Alabama a au contraire estimé que la loi sur les décès infantiles “s’applique à tous les enfants à naître, sans limite”, et a donc reconnu de fait ces embryons comme des enfants. “Cela s’applique à l’ensemble des enfants, nés ou à naître”, a ainsi écrit le juge Jay Mitchell dans le texte de la décision, parsemé de références bibliques.
Conséquences dévastatrices
“Le peuple de l’Alabama a déclaré que la politique de cet État est que la vie humaine à naître est sacrée”, a‑t-il ajouté en référence à l’interdiction de l’avortement au sein de cet État très conservateur du sud des États-Unis. “Nous estimons que chaque être humain, dès le moment de la conception, est fait à l’image de Dieu”, note-t-il encore dans sa décision de justice.
La décision de vendredi reflète “exactement le genre de chaos auquel on s’attendait quand la Cour suprême a renversé Roe v. Wade”, a déclaré la porte-parole de la Maison-Blanche, Karine Jean-Pierre. En juin 2022, la Cour suprême des États-Unis avait abrogé l’arrêt Roe v. Wade promulgué en 1973, qui accordait jusque-là aux Américaines le droit d’avorter dans tout le pays. La fin de la garantie constitutionnelle du droit à l’IVG avait alors conduit de nombreux États, dont l’Alabama, à restreindre ou interdire l’accès à l’avortement. La défense du droit à l’avortement est devenue depuis un cheval de bataille des démocrates, en amont de l’élection présidentielle de novembre.
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Surtout, ce jugement de la Cour suprême est sans précédent et pourrait avoir des conséquences néfastes pour la procréation médicalement assistée dans l’État de l’Alabama. “Ce nouveau cadre juridique pourrait rendre impossible des pratiques comme la fécondation in vitro”, a ainsi dénoncé l’association américaine Resolve consacrée à l’infertilité.
L’Association médicale de l’État de l’Alabama avait de son côté prévenu qu'une telle décision "pourrait mener à la fermeture de cliniques dédiées à la fertilité et au déplacement de spécialistes vers d'autres États afin de pratiquer" leur activité sans crainte d'ennuis judiciaires.