Accusées de favoriser la propagation du coronavirus, les maisons closes sont dans le viseur des autorités en Espagne. Certain·es abolitionnistes en profitent pour passer à l’offensive et font pression pour qu’elles ferment, sans se soucier des conséquences sur le terrain. Sans alternatives, les prostituées qui y travaillaient ont été jetées dans une situation encore plus précaire.
Elle fait les cent pas sous la lumière pâle des lampadaires. Dans une petite rue de la zone industrielle de La Jonquera, première commune en Espagne après la frontière, près de Perpignan. Une voiture noire glisse lentement vers la jeune femme et s’arrête. « Hola », lance-t-elle à la fenêtre aux deux jeunes hommes qui apparaissent quand la vitre se baisse. À gauche, à droite, d’autres filles attendent leur tour. Le véhicule est immatriculé dans le Rhône, en France. La scène est banale dans cette ville, théâtre d’un intense tourisme sexuel en provenance de l’Hexagone, où la prostitution est interdite. Mais l’allée est inhabituellement calme ce soir. De l’autre côté du petit rond-point, les néons roses et verts du Paradise, une des plus grandes maisons closes d’Europe, ne brillent pas.
Depuis un mois, les établissements dans lesquels s’exerce la prostitution en toute légalité ont baissé les stores en Catalogne. Les autorités locales ont imposé cette mesure en raison de la résurgence préoccupante du Covid-19 en Espagne. Mais aucune solution n’a été prévue pour les prostituées, ce qui les plonge dans une situation plus précaire encore que de coutume.
Le sujet est sensible dans l’un des pays les plus prisés au monde pour le tourisme sexuel. L’amour tarifé n’y est pas formellement autorisé. Il n’est pas interdit non plus. Près[…]