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Solitude, figure héroïque de la résis­tance contre l’esclavage

Ce 23 août marque la Journée inter­na­tio­nale du sou­ve­nir de la traite négrière et de son abo­li­tion. Parmi les nombreux·euses résistant·es que compte ce pan de l’Histoire mon­diale, Solitude, figure emblé­ma­tique de la rébel­lion de 1802 contre le réta­blis­se­ment de l’esclavage en Guadeloupe.

On le sait, la contri­bu­tion des femmes à la résis­tance contre l’esclavage a long­temps été invi­si­bi­li­sée dans l'Histoire, écrite par les hommes. Pourtant nom­breuses ont été les femmes à y prendre part. Parmi ces héroïnes, Solitude, redé­cou­verte à la fin du XXème siècle. En cette Journée inter­na­tio­nale du sou­ve­nir de la traite négrière et de son abo­li­tion, l’occasion est belle de se rap­pe­ler cette femme qui a, depuis mai, une sta­tue à son effi­gie dans le jar­din qui por­tait déjà son nom, dans le 17e arron­dis­se­ment de Paris. Une sta­tue de bronze qui la repré­sente le ventre rond et le bras levé, por­tant la pro­cla­ma­tion de Louis Delgrès qui appelle à la résis­tance et au com­bat contre l’esclavage en Guadeloupe. Une lutte qu’elle y mena au début du XIXème siècle et qu'elle paie­ra de sa vie.

L'inauguration de l’œuvre est his­to­rique : il s’agit de la pre­mière sta­tue de femme noire éri­gée dans la capi­tale. Si l'effigie de Solitude est à ce point sym­bo­lique, c’est qu’elle est aus­si l’une des seules traces de son his­toire. Le peu que l’on sait d’elle tient en une quin­zaine de lignes écrites en 1858 par l’écrivain Auguste Lacour dans Histoire de la Guadeloupe. Mais c’est à un autre écri­vain, André Schwarz-​Bart, que l’on doit l’exhumation de son sou­ve­nir, plus d’un siècle plus tard, à tra­vers le roman La Mulâtresse Solitude (1972).

Le goût de la liberté

D’après les élé­ments avé­rés, Solitude – de son vrai nom Rosalie – est née en Guadeloupe, pile deux siècles avant la publi­ca­tion du roman de Schwarz-​Bart. Elle est l’enfant d’une esclave afri­caine vio­lée par un marin blanc sur le navire qui la dépor­tait aux Antilles. Raison pour laquelle Rosalie est sou­vent dési­gnée comme une mulâ­tresse, un terme péjo­ra­tif qui désigne à l’époque les per­sonnes métis­sées. Rapidement sépa­rée de sa mère et pri­vée de sa liber­té dès la nais­sance, elle est contrainte de deve­nir esclave de mai­son. Elle goûte pour la pre­mière fois de sa vie à la liber­té, quelques années plus tard, lorsqu’en février 1794, la Convention abo­lit l’esclavage et fait des hommes et des femmes peu­plant les colo­nies, des citoyen·nes français·es jouis­sant des mêmes droits.

Mais à peine la nou­velle a‑t-​elle le temps d’arriver en Guadeloupe que déjà, l’île est tom­bée aux mains des Anglais. L’occupation anglaise dure quelques mois pen­dant les­quels Rosalie rejoint une com­mu­nau­té mar­rone, for­mée d’anciens esclaves. Hélas, l’euphorie de la liber­té n’a duré que le temps d’un rêve. En 1802, Napoléon Bonaparte réta­blit l’esclavage et charge le géné­ral Richepance de se rendre en Guadeloupe pour mater toute rébel­lion et remettre aux fers les ancien·nes esclaves. Le 4 mai, quatre mille sol­dats débarquent donc à Pointe-​à-​Pitre. Ils se heurtent à une résis­tance orga­ni­sée menée par Louis Delgrès, un intel­lec­tuel d’origine mar­ti­ni­quaise. Avec lui, de nombreux·euses femmes et hommes prennent les armes pour lut­ter pour leur liber­té à peine trou­vée. Parmi eux·elles, une cer­taine Rosalie qui vient de prendre le pré­nom de Solitude.

Exécution

La répres­sion de la révolte est san­glante et fera des mil­liers de vic­times. Mais qu'importe, pour sa liber­té et celle de son enfant à venir, Solitude, enceinte, s’arme et par­ti­cipe à chaque com­bat. Après dix-​huit de jours de lutte inégale, la révolte prend fin, les insurgé·es sont vaincu·es. La rebelle est faite pri­son­nière avec trois cents résistant·es. Parce qu’elle est enceinte, Solitude, condam­née à la peine de mort, n’est pas exé­cu­tée immé­dia­te­ment. Elle accouche le 28 novembre d’un fils qui comme elle, naît esclave. Elle est pen­due le lendemain.

Si elle n’a fait qu’entrevoir briè­ve­ment la liber­té, Solitude est deve­nue par son com­bat achar­né, le sym­bole de la résis­tance des femmes contre l’esclavage. Celui-​ci sera défi­ni­ti­ve­ment abo­li quarante-​six ans après sa mort.

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