Ce samedi 4 juin, s’est tenue la deuxième édition de la pride des banlieues, à Saint-Denis. Causette s’est glissée dans la marche aux couleurs arc-en-ciel, à la rencontre des manifestant·es qui ont porté haut et fort leur fierté et leurs revendications.
Deux semaines avant la marche des fiertés de Paris, les drapeaux arc-en-ciel ont déferlé dans les rues de Saint-Denis, dans le 93. Pour la seconde fois depuis 2019, une quinzaine de collectifs pour les droits des LGBTQIA+ ont organisé ce rassemblement ce samedi 4 juin, avec des revendications bien spécifiques. Lutter contre le racisme et contre les LGBTQ+phobies, exiger un meilleur accès pour les personnes queer de banlieues à la santé et au logement, alerter sur le manque de service public, demander plus de reconnaissance du droit d’asile des LGBT+ persécutés… Les organisateur·rices ont pensé cette marche comme la façon de lutter contre le cumul des discriminations auquel iels font face.
« La rue, elle est à qui ? Elle est à nous ! », pouvait-on entendre dans le cortège de la marche. De la place René Dumont à la place Jean Jaurès, des milliers de personnes ont défilé dans la bonne humeur, au rythme des tambours, des danses improvisées et des slogans lancés au mégaphone, sous les regards intrigués des habitant·es du quartier. Devant la Mairie de Saint-Denis, le Village des fiertés attendait les manifestant·es pour une série de discours, d'activités dans les stands des différentes associations, et de performances artistiques jusqu’à 18 heures.
Léa, membre de l’association ARDHIS (Association pour la reconnaissance des droits des personnes homosexuelles et trans à l’immigration et au séjour) : « Je suis venue avec ma femme ici et je suis très contente, il y a une si bonne ambiance ! Je viens de Kinshasa, au Congo. Là-bas, quand on est lesbienne comme moi, on t’arrête si tu ne te caches pas. Alors quand je suis arrivée en France en 2014, c’était important pour moi de rejoindre une association. Je suis fière de qui je suis, et c’est fort d’être là aujourd’hui. »
Marion : « On devait être là, c’est hyper important. Les LGBT+ sont rarement représentés dans les banlieues, donc on est venues montrer qu’on les soutient. » Eole : « On veut aussi montrer aux personnes qui doivent se cacher à cause de leur identité qu’elles ne sont pas seules. Il y a beaucoup de personnes qui sont jetées de chez leurs parents parce qu’ils et elles sont différents. Moi je viens des Antilles et c’est quelque chose que je vois très souvent. »
Eloi, militant au sein de Act Up-Paris, association de lutte contre le sida : « On a participé à la coordination de la marche, pour qu’elle ait le plus de poids et de visibilité possible. Nous, on est concentré sur les questions autour des personnes malades, handicapées et séropositives. On veut montrer que les banlieues sont parfois des territoires oubliés en termes d’accès à la santé pour les personnes queer, surtout avec le Covid. On demande aussi le respect des séances d'éducation à la sexualité dans les collèges et les lycées, parce qu’on se rend compte que les élèves n’ont souvent eu qu'un seul cours dans toute leur scolarité alors qu’ils devraient avoir 3 heures par an normalement. Donc on souhaite qu’il y ait plus de formations des professeurs pour assurer ces cours-là, en plus des bénévoles d’associations, et surtout dans les banlieues. »
Tina, nigériane : « C’est la première fois que je viens à une marche des fiertés, et c’est magnifique. Au Nigeria, je n’aurais pas pu marcher comme ça, aussi librement. Je me sens moi-même, je peux enfin m’exprimer et j’adore être entourée de personnes comme moi, avec la même liberté. C’est incroyable de voir que je ne suis pas seule. »
Jonathan, 34 ans et Corentin, 22 ans. Jonathan : « On se devait d’être là, c’est tellement important de défendre la cause gay et toutes les causes LGBT+. On soutient cette pride parce que c’est crucial d’aller là où ça dérange, là où on est encore invisible, là où c’est encore tabou. Vous voyez la foule ? On est une grande famille ! » Corentin : « Avec les élections législatives qui arrivent, on veut aussi montrer qu’il y a besoin de plus de places d’hébergement pour les personnes queer en banlieue, qui peuvent être rejetées et faire face à de la violence. »
Spencer, Isa et Marion, étudiantes entre 23 et 25 ans et habitantes de Saint-Denis : « C’est tellement la joie d’être ici. C’est important d’organiser des pride des banlieues, en dehors de Paris, pour montrer qu’on existe aussi ici, que ce n’est pas seulement que des personnes riches, et qu’il y a une pluralité des causes queer. Surtout qu’il y a un rejet des LGBTQ+ beaucoup plus fort ici qu’à Paris. »