La tribune signée par cinquante personnalités de la culture et publiée par Le Figaro lundi soir est une vague réactionnaire qui étonne par son envergure.
Depuis la tribune anti-#MeToo sur la “liberté d’importuner” en 2018, on n’avait pas vu offensive de telle ampleur. Stratégiquement diffusé en plein Noël, siphonnant une actualité plutôt creuse, ce dernier exemple en date de backlash (retour de bâton) prend des proportions inédites en France. Si l’on a pu en voir à l’étranger des exemples inquiétants (le procès Depp-Heard aux États-Unis, par exemple), chez nous, ce sont surtout des déclarations de soutien individuelles qui émergent d’ordinaire ça et là en faveur d’agresseurs présumés. Or, ce who’s who composé de cinquante noms éminents de la culture apparaît comme une défense massive en bande organisée. Seul motif de réjouissance : le fossé générationnel entre les jeunes artistes, absent·es de la tribune, et ces signataires, qui représentent pour la plupart un ancien monde agrippé à ses vieux privilèges.
On est également frappé·es, après les plaintes, les enquêtes comme celle de Mediapart et surtout les images accablantes du reportage de Complément d’enquête, que l’on puisse encore trouver des arguments pour disculper Gérard Depardieu. Surtout, ce texte qui débat des mérites artistiques de l’acteur paraît totalement anachronique : il n’a, en effet, rien à voir avec les faits reprochés, qui se placent sur le terrain juridique. On s’étonne qu’à force d’interminables débats sur la séparation de l’homme et de l’artiste, on en soit encore là, à utiliser le mérite artistique pour excuser des actes sanctionnés par la loi.
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