Le Canard enchaîné publie ce mercredi un article faisant état d'une main courante déposée à l'encontre d'Adrien Quatennens par son épouse, après un épisode de violences. Outre le fait que Céline Quatennens avait demandé expressément à la police que l'affaire ne soit pas ébruitée, l'hebdomadaire satirique s'est permis de lancer une pique à la députée Sandrine Rousseau, qui n'a rien à voir avec l'affaire.
Ce mercredi 14 septembre, la nouvelle édition du Canard enchaîné fait état d'une main courante déposée le 7 septembre par Céline Quatennens, à l'encontre de son mari, le député de la France insoumise (FI) Adrien Quatennens. Elle l'accuse de faits de violences commis fin août après qu'elle lui a annoncé sa volonté de divorcer.
Anticipant la publication, Céline et Adrien Quatennens ont décidé de publier un communiqué, via l'avocate du député du Nord, Me Jade Dousselin. Dedans, l'ex-couple explique vivre « une situation de divorce difficile » et décrit les faits qui ont mené au dépôt de la main courante comme « une dispute ». Surtout, le communiqué indique que Céline Quatennens avait précisé « aux policiers qui l'ont entendue qu'elle ne souhaitait ni porter plainte ni qu'il y ait de suites judiciaires à cette main courante et qu'elle exigeait que les informations ne se retrouvent pas dans la presse ». Une précaution qui n'a donc pas empêché Le Canard enchaîné de rendre l'affaire publique, considérant probablement que l'information – des soupçons de violences conjugales de la part d'un élu de la Nation – relevait de l'intérêt général. Et ce malgré la volonté des époux Quatennens de « protéger [leur] vie privée et celle de [leur] famille ».
Ce communiqué soulève un autre point : contrairement au souhait de Céline Quatennens, le parquet s'est saisi de l'affaire pour ouvrir une enquête. Cette situation résulte de la consigne donnée aux juridictions en août 2021 par le ministre de l'Intérieur dans le cadre de la lutte contre les violences conjugales et les féminicides. D'habitude, une main courante permet de faire enregistrer des accusations par la police et la gendarmerie sans porter plainte et donc sans que la justice ne donne suite. Mais face au nombre de femmes tuées par leur (ex-)conjoint qui avaient préalablement déposé une main courante, le ministère de l'Intérieur a exigé que ces signalements de victimes de violences conjugales soient remontés au parquet par procès verbal judiciaire des forces de l'ordre qui les recueillent. En se saisissant, le parquet a donc fait le travail attendu de lui.
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En ce qui concerne le traitement de l'affaire par le Canard, outre le non-respect de la volonté de Céline Quatennens de ne pas ébruiter sa main courante, le ton employé laisse songeur. Après avoir précisé que Céline Quatennens ne souhaitait pas voir l'affaire portée devant la justice, le ou la journaliste s'est permis une petite blague pour conclure : « Tout est donc bien qui finit bien. Et Sandrine Rousseau va sûrement applaudir. » L'occurrence du nom de la députée EELV, étrangère à l'affaire et constamment moquée et caricaturée dans la presse ou sur les réseaux sociaux, a fait bondir les militantes féministes.
« C'est incroyable, commente, sur Twitter, la Maîtresse de conférence en linguistique Laélia Véron. Un type est accusé de violences conjugales, mais c'est une féministe qui est ciblée à la fin. » La Conseillère de Paris EELV Raphaëlle Rémy-Leleu abonde : « L'article aurait pu conclure sur beaucoup d'autres choses : les hommes politiques violents, la problématique de l'accueil des victimes, les infos fuitées très vite dans la presse quand ça concerne certains alors que les autres victimes se battent aussi contre le silence… Mais non, le Canard choisit de taper, contre Sandrine Rousseau. Je choisis ce verbe à escient, malgré tout ce que ça a de dérangeant. Oui, c'est une forme de violence que de choisir de TOUJOURS profiter d'une histoire de violence sexiste pour mettre en cause une féministe. »
Contactée par Causette, Sandrine Rousseau déclare : « Lorsque j'ai vu l'article et sa conclusion, j'ai été vraiment choquée par cette saillie patriarcale mais ce n'est pas la première fois que le Canard écrit des saloperies sur moi. Ce que cette conclusion d'article dit, c'est qu'à la fin, en matière de violences de genre, c'est toujours la faute des femmes. Je suis sans doute particulièrement ciblée parce que je fais bouger les choses en la matière. » La députée explique faire face à la répétition de ces attaques gratuites en pensant aux mots de la Conseillère de Paris EELV Alice Coffin, qui lui avait dit : « Tiens bon le plus longtemps possible car chaque jour que tu tiens, tu ouvres la voie pour les autres. » N'en déplaise aux coups de becs du Canard.