Témoignages : fille des villes, gars des champs

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©Elizabeth Bick

Chaque mois, Causette donne la parole à un duo sen­ti­men­tal pour com­prendre com­ment les visions diver­gentes de chacun·e n’empêchent pas (tou­jours) le ménage de tour­ner. Charline est plu­tôt femme des villes, Simon homme des champs. 700 kilo­mètres les séparent quinze jours par mois. Après plus de vingt-​quatre ans de vie com­mune, ils ont adop­té une nou­velle façon d’être en couple en alter­nant vie en solo et vie à deux. 

Simon

64 ans

« Avec Charline, nous aurions pu ne jamais nous ren­con­trer ! On m’a pro­po­sé une pige, un same­di, et j’ai failli la refu­ser ! C’était un mon­tage dif­fi­cile sur la thé­ra­pie des per­sonnes accros à la dépense. On a fini vers 23 heures, alors Charline m’a invi­té à dîner dans une bras­se­rie toute proche. On s’est tout de suite plu et deux mois plus tard, on vivait ensemble. Nous sommes un couple assez fusion­nel, mais cha­cun a ses moments d’indépendance ! Charline voit sou­vent ses copines en solo et ne peut pas se pas­ser du tumulte pari­sien ; moi, j’aime vivre à pré­sent loin de la fré­né­sie de la sur­con­som­ma­tion. Cette ber­ge­rie a été notre pre­mière visite dans la région ! Coup de cœur immé­diat ! Je venais de prendre ma retraite. C’était une nou­velle vie qui commençait… 

Les deux pre­mières années, Charline me repro­chait de ne pas remon­ter à Paris assez sou­vent alors que je devais suivre les nom­breux tra­vaux. Quand elle arri­vait de Paname, elle véri­fiait les fini­tions en ins­pec­trice des tra­vaux finis, cela avait le don de m’agacer ! On a tou­jours sur­mon­té les crises, on en tire les ensei­gne­ments et cela nous per­met d’améliorer notre rela­tion. Nous avons deux carac­tères assez fiers et dif­fé­rents ! Je suis posé et réflé­chi ; Charline est impa­tiente et par­fois hyper­ac­tive. La deuxième année, il y a eu moins de tra­vaux. Je suis remon­té plus sou­vent à Paris, mais Charline bos­sait quo­ti­dien­ne­ment, on ne se voyait pas beau­coup. Alors, d’un com­mun accord, on a déci­dé que je res­te­rais le plus sou­vent dans le Sud. Nous n’avions jamais été sépa­rés plus de quinze jours, sauf quand Charline a réa­li­sé une série docu­men­taire à l’étranger. Donc, on était un peu déboussolés ! 

J’ai exer­cé un métier qui m’a pas­sion­né, mais à pré­sent, ­j’apprécie de vivre au gré des sai­sons dans une démarche éthique et res­pon­sable. Ici, nous avons cha­cun notre espace et nos acti­vi­tés. On s’est tou­jours par­ta­gé les tâches du quo­ti­dien sans pro­blème. Et moi, j’adore cui­si­ner les légumes des pro­duc­teurs du coin ! Charline a besoin de l’adrénaline que lui pro­cure son métier, de tra­vailler sur de nou­veaux pro­jets et elle n’est pas prête de s’arrêter ! Alors, il a fal­lu nous habi­tuer à cette vie frac­tion­née. Mais on a appris à gérer l’absence de l’autre en s’appelant tous les jours. Finalement, on a trou­vé le bon équilibre. » 

Charline

57 ans

« J’ai ren­con­tré Simon lors d’un mon­tage pour un repor­tage télé­vi­sé. C’était en 1996 et depuis, on a eu le temps de “s’apprivoiser” ! Je suis réa­li­sa­trice et Simon est chef mon­teur vidéo. Nous sommes inter­mit­tents du spec­tacle et on a tou­jours eu une vie pari­sienne sans rou­tine et sans horaires au gré de nos contrats de tra­vail. Simon a 64 ans, nous avons sept ans de dif­fé­rence et pas d’enfants. 

Il y a quatre ans, son départ anti­ci­pé à la retraite a coïn­ci­dé avec l’achat d’une vieille ber­ge­rie dans le Gard. Un rêve que nous par­ta­gions et que nous avons enfin réa­li­sé ! Depuis, il vit la majo­ri­té du temps là-​bas. Et moi, je conti­nue à tra­vailler à Paris où nous avons gar­dé un pied à terre. Je fais des allers-​retours en train en fonc­tion des mon­tages et des tour­nages. Un vrai casse-​tête niveau plan­ning. Il ne remonte que quelques semaines par an dans la capi­tale pour voir les amis et la famille. 

Nous avons des rythmes de vie dif­fé­rents : proche de la nature et ten­dance à pro­cras­ti­ner pour Simon (ça m’énerve !) ; cita­dine et sous pres­sion pour moi. Le rêve a par­fois viré au cau­che­mar ! La mai­son “idéale” avait des fuites de toi­ture, du sal­pêtre se pro­pa­geait dans le salon voû­té en pierres… 

Quand j’arrivais de Paris, nous n’avions plus les mêmes pré­oc­cu­pa­tions et centres d’intérêt, cela nous a par­fois éloi­gnés. Nous habi­tons une com­mune de 1 700 âmes entou­rée d’oliviers et de vignes, c’est très calme ! Simon par­lait de fuites d’eau ou de son quo­ti­dien buco­lique (vélo dans la gar­rigue, plan­ta­tions ou tir à l’arc) et moi de mes jour­nées sur­char­gées et de la fatigue des voyages. On était en déca­lage, j’avais du mal à me détendre ! Il me man­quait quand j’étais à Paris et lui me parais­sait heu­reux sans moi dans sa mai­son, pei­nard ! Je le lui repro­chais et cela finis­sait en disputes !

Heureusement, Simon m’a ras­su­rée sur ses sen­ti­ments : s’il ren­dait la mai­son plus confor­table, c’était sur­tout pour nous deux ! Petit à petit, j’ai fini par voir le bon côté de cette vie en alter­nance. À pré­sent, quand j’arrive dans le Sud, je lâche prise. On va se bai­gner dans le Gardon, on reçoit les amis, on va au Festival d’Avignon. Cette ber­ge­rie est deve­nue mon refuge. »

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