Pandore confirme l’excellente réputation des séries belges. Créé par trois autrices affutées, ce thriller politico-judiciaire, complexe et addictif, met en avant des héroïnes puissantes pour mieux scanner les dérives de notre société… et son sexisme ordinaire. A découvrir dare-dare sur Polar + !
A cran et accro : voilà l’effet que cette série, entièrement écrite et réalisée par des femmes, devrait avoir sur vous. Déjà parce que son récit, qui entremêle plusieurs intrigues et protagonistes, est très bien ficelé. Le minimum syndical, direz-vous. Oui, mais il est aussi sans concession, scannant à peu près tous les travers actuels de la société belge en dix épisodes, de la culture du viol au populisme, en passant par l’âgisme et la corruption, et ça c’est un peu plus rare. D’autant plus scotchant qu’il n’est pas besoin de connaitre les arcanes du système fédéral belge pour suivre : de l’autre côté de la frontière, en France, il se produit les mêmes violences, les mêmes collusions, les mêmes dérives… hélas.
Mais reprenons du début, puisque Pandore attaque très fort : nous voilà donc projeté.es à Bruxelles, à deux mois d’élections importantes. Un homme politique, au sortir d’une réunion agitée, est alors témoin du viol d’une activiste féministe, qu’il filme sans oser intervenir (sur un autre portable que le sien…), avant de déposer la jeune femme aux urgences, une fois ses agresseurs volatilisés, se faisant passer pour son sauveur auprès des médias. Peu après, tandis qu’une juge d’instruction s’engage à faire toute la lumière sur ce crime (une partie de la vidéo est balancée anonymement sur internet), ledit politique, jeune loup d’un parti de droite, n’hésite pas à rebondir sur sa nouvelle notoriété. Ils ne vont pas tarder à se croiser…
Quatre femmes de premier plan
Sale affaire ? Oui, mais passionnante aussi ! D’abord parce qu’elle sonde en profondeur les relations ambiguës entre justice et pouvoir (un sujet on ne peut plus sensible en France !). La série prend le temps d’avancer ses pions et de ménager son suspense : un rythme précis, méthodique, qui convient parfaitement à la complexité des situations. A noter que Yoann Blanc, comédien repéré notamment dans La Trêve, sait donner une épaisseur trouble, inhabituelle, à son député veule et menteur : une véritable performance ! Autre motif d’intérêt de cette série tortueuse, très atmosphérique : elle permet d’interroger avec force la place des femmes dans notre société, cela à travers quatre héroïnes de premier plan.
Soit la jeune activiste violée (Salomé Richard, aussi révoltée qu’inflexible dans ce rôle) ; sa copine apprentie journaliste (Mélissa Diara, justement piquante et fébrile) ; l’assistante parlementaire futée et finalement bernée du député (formidable Myriem Akkheddiou qui parvient, contre toute attente, à la rendre émouvante) ; et enfin la juge. Cette grande et belle femme, tenace quoique fragilisée par son âge (elle a une cinquantaine d’années et l’on comprend, peu à peu, que c’est un vrai sujet, pour elle comme pour les autres), est interprétée par Anne Coesens, actrice saisissante, également coautrice du scénario avec Savina Dellicour et Vania Leturcq.
Vous l’avez compris, c’est elle la Pandore du titre, qui ouvre la boîte et révèle les maux de notre mâle société. Avec sa voix douce, sa blanche chevelure flottant sur ses épaules et son visage tragique, cette juge bruxelloise n’est pas loin d’incarner la figure implacable du destin, donc de donner une dimension mythologique à ce thriller pourtant très contemporain. Le fait est qu’elle intrigue, émeut et captive comme rarement. Tellement qu’on aimerait que sa boîte maudite ne se referme pas tout de suite… Autrement dit, vivement la saison 2 (diffusion prévue courant 2024 sur la RTBF en Belgique) !
!["Pandore" : un thriller politico-judiciaire avec des héroïnes puissantes 2 PANDORE Saison1 KeyArt 1](https://www.causette.fr/wp-content/uploads/2023/12/PANDORE-Saison1-KeyArt-1-733x1024.jpg)
Pandore, d’Anne Coesens, Savina Dellicour et Vania Leturcq. 10 épisodes de 52 mn, à découvrir à partir du 6 décembre sur Polar + les mercredis à 20h55 (deux épisodes par soirée) et disponibles sur myCanal.