La série de Xavier Giannoli D’argent et de sang sonde “l’escroquerie du siècle”, une arnaque géante sur la taxe carbone.
Et si la toute première série de Xavier Giannoli, cinéaste césarisé d’Illusions perdues, n’était pas, tout simplement, son grand œuvre ? On ne parle pas de longueur ici, mais bien d’ampleur, de souffle, d’accomplissement… Et de nerfs à vif, dans la droite lignée de Martin Scorsese, son modèle. Vous voilà prévenu·es : impossible de décrocher, dès lors que vous plongerez dans les douze épisodes de cette fresque magistrale qu’est D’argent et de sang !
S’inspirant de l’enquête (et du livre du même nom) de Fabrice Arfi, journaliste d’investigation à Mediapart, Giannoli sonde en fait ce que l’on a appelé “l’escroquerie du siècle”. Une gigantesque arnaque à la TVA sur la taxe carbone, survenue en France et en Europe entre 2008 et 2009, qui a permis à des petits escrocs de Belleville, associés à un trader des beaux quartiers, d’empocher des milliards sur le dos des finances publiques en profitant des failles d’un système censé lutter contre le réchauffement climatique. Compliqué ? Pas tant que ça.
Intransigeance
Mêlant habilement faits réels et personnages fictifs (les noms ont été changés), Giannoli trouve le ton, le rythme et l’angle pour nous… initier comme jamais. D’argent et de sang se présente ainsi comme le récit à rebours de Simon Weynachter (Vincent Lindon, au sommet), un magistrat enquêteur obsédé par l’idée de faire tomber ces arnaqueurs fraudeurs. Premier atout : son intransigeance rend hyper clairs les rouages de l’arnaque et du système dans lequel elle a prospéré. Deuxième atout : sa droiture ascétique, voire mystique, s’oppose judicieusement sur le plan dramaturgique à la débauche bling-bling de ses “adversaires” (un étrange trio emmené avec jubilation par Ramzy Bedia et David Ayala côté populo et par Niels Schneider côté bobo).
Nul hasard si ce thriller, jalonné de fanfaronnades, de passions humaines et d’ombres tragiques (Judith Chemla est remarquable en épouse sous emprise), distille un sentiment tenace d’indignation. De toute évidence, l’inflexible Simon incarne le point de vue de Xavier Giannoli, lui-même en quête de vérité. Hanté depuis ses tout débuts de cinéaste par la thématique du mensonge, il ne saurait être fasciné par ces escrocs. Mieux encore : leur arnaque lui permet de démasquer, au fond, les dérives de l’ultralibéralisme et l’avidité du consumérisme. En clair, D’argent et de sang est un pamphlet anticapitaliste sans concession.
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D’argent et de sang, de Xavier Giannoli. Série de 12 épisodes de 52 min. diffusée en exclusivité sur Canal+. Partie 1 (épisodes 1 à 6) à partir du 16 octobre, le lundi à 21 heures, et disponible sur MyCanal. Partie 2 (épisodes 6 à 12) en janvier 2024.
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