Little Simz : « J’aime les disques qui résistent à l’épreuve du temps »

La rap­peuse anglaise sort ce 3 sep­tembre l’excellent Sometimes, I Might Be Introvert, un qua­trième album vibrant et intros­pec­tif dans lequel elle raconte son par­cours et ses engagements.

LittleSimz 9 HR A
© Nwaka Okparaeke 

Little Simz est une grande dame. Par le talent, sans aucun doute. Pour la taille, on atten­dra de la voir en concert. Difficile de juger : elle est assise sur un cana­pé, emmi­tou­flée dans une volu­mi­neuse par­ka. Au moins, on sait qu’à Londres le ciel est gris. Exercer le sens de l’observation est l’un des rares mérites de l’interview en visio. Même si elle fait la pluie et le beau temps sur le hip-​hop anglais, Simbi Ajikawo, 27 ans, n’est pas devant son écran pour com­men­ter la météo, mais pour par­ler de Sometimes, I Might Be Introvert, son superbe qua­trième album.

Encensée par Jay‑Z et Kendrick Lamar, Little Simz n’est pas une débu­tante. Elle a com­men­cé le rap à l’âge de 10 ans. À la tête de son propre label, elle a pris de la hau­teur au fil des pro­jets en trai­tant de sujets per­son­nels ou socié­taux (fémi­nisme, racisme, iden­ti­té) sans céder à la faci­li­té. « Aujourd’hui, l’industrie musi­cale est cen­trée sur le pré­sent. J’aime les disques qui résistent à l’épreuve du temps. » Avant d’entrer en stu­dio, elle avait des réfé­rences éle­vées : What’s Going on, de Marvin Gaye ; Off the Wall, de Michael Jackson ; A Love Supreme, de John Coltrane, Nina Simone… 

L’écriture comme échappatoire

N’ayons pas peur des mots. Gorgé de soul et d’afro-beat, son disque est de la trempe des clas­siques. Difficile de ne pas être empor­té par son gran­diose mor­ceau d’ouverture (Introvert) où se mêlent cordes toni­truantes et chœurs soyeux. « Je vou­lais par­ler de mon carac­tère intro­ver­ti, de celle que je suis loin de la scène. Le confi­ne­ment a été dif­fi­cile, mais il m’a per­mis de me concen­trer sur mes sen­ti­ments, d’aborder des choses per­son­nelles que je n’avais jamais mises dans mes textes. J’ai tou­jours été à l’aise avec la soli­tude. L’écriture a été une échap­pa­toire, pour main­te­nir un équi­libre, res­ter saine au milieu de cette folie. »

Parents d’origine nigé­riane divor­cés quand elle avait 11 ans, ado­les­cence dans le quar­tier d’Islington, dans le nord de la capi­tale. Sa mère lui apprend très tôt que rien dans la vie n’arrive sur un pla­teau et qu’en tant que femme noire elle devra tra­vailler deux fois plus. Celle qui a décou­vert le rap avec les vidéos de Missy Elliott, Busta Rhymes ou Ludacris repense aux ani­ma­teurs sociaux du St Mary’s Youth Club qui ont su la com­prendre, à la dif­fé­rence de cer­tains pro­fes­seurs qui la regar­daient de haut. « Vous n’imaginez pas à quel point il aurait été facile pour moi d’emprunter une mau­vaise voie. »

Depuis, Simbi Ajikawo essaie d’être une figure ins­pi­rante pour les géné­ra­tions sui­vantes. Sur le mor­ceau Little Q, elle évoque un fléau qui affecte les villes anglaises et pour lequel aucun vac­cin n’a encore été trou­vé : les attaques au cou­teau qui ont cau­sé, en 2019, la mort de 90 per­sonnes dans la région de Londres. La chan­son raconte l’histoire de son cou­sin qui a failli rejoindre ces sinistres sta­tis­tiques. « Il aurait pu être un autre jeune Noir tom­bé dans une guerre des gangs. Ces vic­times sont pri­son­nières d’un sys­tème. Il ne faut pas les aban­don­ner. Il faut les trai­ter comme des per­sonnes, pas comme des numé­ros. L’amour et l’attention, c’est le début du remède. » On lui sug­gère d’envoyer son album au 10 Downing Street. 

Sometimes, I Might Be Introvert, de Little Simz. Age 101 Music/​Awal. Sortie le 3 sep­tembre. En concert le 28 jan­vier 2022 au Bataclan, à Paris.

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