Dans Triste tigre, Neige Sinno, violée par son beau-père entre ses 8 et 13 ans, se rapproche au plus près de ses souvenirs traumatisants, dissèque les relations ambivalentes qui se tissent avec son bourreau et émaille ce récit d’analyses littéraires lumineuses.
« Elle sera sauvée par la littérature », prédit un jour un médecin. « Tu parles… », répond Neige Sinno. Violée par son beau-père entre ses 8 et 13 ans, l’autrice a un jour ressenti le besoin de traquer les récits d’abus sexuels dont la littérature déborde à un point insoupçonnable : chez Émile Zola, Vladimir Nabokov, Virginia Woolf, Claude Ponti, Toni Morrison… Dans Triste tigre, elle entremêle sa propre histoire à tous ces textes. Elle se rapproche au plus près de ses souvenirs traumatisants, dissèque les relations ambivalentes qui se tissent avec son bourreau et émaille ce récit d’analyses littéraires lumineuses. Elle interroge l’inimaginable, la façon dont son beau-père l’a « forcée à comprendre son point de vue », le pouvoir consolateur des livres, mais aussi leur insupportable insuffisance…
Avec une sincérité tranchante, une écriture à l’os, pure et organique, Neige Sinno nous fait entendre le « non » qu’elle a cherché à opposer à son agresseur et qui traverse, en fait, toute l’histoire de la littérature. Il faut, nous dit-elle, « entendre résonner la puissance de ce non impuissant ». Une œuvre littéraire sans équivalent.
Triste tigre, de Neige Sinno. P.O.L, 288 pages, 20 euros.