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© Matias North / Unsplash

Nos trois recos bou­quins du week-end

Claire Berest, Salma El Moumni, Lilia Hassaine, Causette vous balade dans ses lec­tures d’octobre.

Adieu Tanger, de Salma El Moumni

Premier roman de Salma El Moumni, Marocaine de 24 ans, Adieu Tanger raconte très sub­ti­le­ment les deux facettes d’une femme, mais aus­si deux pays, deux amours… et beau­coup de har­cè­le­ments… Alia, lycéenne à Tanger, a com­men­cé à prendre des cli­chés pour défier l’injonction à l’invisibilité, mais ces images l’ont trans­for­mée en vic­time. Dans la rue, elle porte volon­tiers la jupe, les hommes la scrutent, la sifflent ou la suivent. Dans sa famille, on lui dit qu’elle ne doit ni agui­cher ni pro­vo­quer. Afin de com­prendre ces deux situa­tions, Alia décide de prendre en pho­to son corps dénu­dé, comme pour se l’approprier. Un rituel, chaque soir devant la glace. Les images auraient dû res­ter dans son smart­phone, mais, très vite, on lui apprend qu’elles sont sur Internet. Selon la loi maro­caine, elle risque la pri­son pour “nudi­té volon­taire”. Quand elle découvre qui l’a “mise en ligne”, elle sait que c’est une ven­geance. Mais elle est loin de se dou­ter que cette per­sonne la sui­vra jusqu’à Lyon, où elle a choi­si de se réfu­gier juste après avoir eu son bac et où cette his­toire la poursuit. 

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Adieu Tanger, de Salma El Moumni. Grasset, 180 pages, 18 euros.

L’Épaisseur d’un che­veu, de Claire Berest

La femme dont il est ques­tion chez Claire Berest, dans L’Épaisseur d’un che­veu, a aus­si à voir avec l’image : Vive Lechevallier, son héroïne, est pho­to­graphe. Son mari, Étienne, est un cor­rec­teur aigri au sein d’une mai­son d’édition pari­sienne. Mais il a un pro­jet. Plus on avance dans le récit, plus on plonge dans l’esprit d’Étienne, plus la machine s’emballe sur la nature de ce pro­jet. Encore (vous) faut-​il savoir si le des­sein devien­dra réa­li­té. Le com­ment et le pour­quoi consti­tuent le sus­pense du récit, mais aus­si le maté­riau psy­cho­lo­gique. À mi-​chemin entre fic­tion sur la folie et énigme poli­cière, le roman – le sixième de l’écrivaine – raconte com­ment un détail, fin comme un che­veu, fait bas­cu­ler un couple dans l’horreur. Tout en ques­tion­nant la fron­tière entre amour conju­gal et contrôle de l’autre.

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L’Épaisseur d’un che­veu, de Claire Berest. Albin Michel, 240 pages, 19,90 euros.

Panorama, de Lilia Hassaine

À l’injonction d’invisibilité dans Adieu Tanger répond l’obligation de trans­pa­rence du bien nom­mé Panorama, troi­sième roman de Lilia Hassaine. Cette fois, l’autrice, ancienne chro­ni­queuse télé, s’aventure dans le futur : l’histoire se déroule entre 2049 et 2050, dans une ville fic­tive cloi­son­née et ghet­toï­sée. Vingt ans aupa­ra­vant, la France entière a connu la révo­lu­tion « Transparence citoyenne », ladite trans­pa­rence est deve­nue abso­lue et… concrète : loge­ments, com­merces, admi­nis­tra­tions, pri­sons et hôpi­taux ont des murs en verre. Chacun·e sur­veille tout le monde, la déla­tion est géné­rale, les réseaux sociaux s’érigent en tri­bu­naux. Les flics sont des « gar­diens de la pro­tec­tion », et c’est le cas d’Hélène Dubern, notre nar­ra­trice, qui enquête sur un phé­no­mène qui ne devait jamais arri­ver dans un monde trans­pa­rent : une famille a dis­pa­ru. L’autrice ins­talle un décor et un contexte par­fai­te­ment réa­listes et cré­dibles, mul­ti­pliant les focales (et les fausses pistes), tout en réa­li­sant un por­trait de femme flic qui se débat contre les vio­lences faites à elle et aux autres. 

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Panorama, de Lilia Hassaine. Gallimard, 240 pages, 20 euros.

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