Ce mercredi, c'est le retour de Blanche Gardin dans Tout le monde aime Jeanne, de Céline Devaux, Rodéo, un premier film dérangeant de Lola Quivoron et Plan 75, une dystopie poignante de la Japonaise Chie Hayakawa.
ELLE CARBURE AU MÉLANGE
Voilà un premier film hybride, donc intéressant ! « Mélancomique » à souhait, il dresse le portrait de Jeanne, une femme que tout le monde a toujours aimée, mais qui se déteste. Très vite, une expatriation à Lisbonne et la rencontre avec un ancien camarade fantasque vont achever de la déstabiliser… Oscillant entre humour (en surface) et chagrins (enfouis), dessins (très réussis) et images réelles (Lisbonne est fort joliment filmée), Tout le monde aime Jeanne carbure décidément au mélange. Côté pile, on pourra s’agacer des interventions de la voix intérieure de Jeanne dans le récit, systématiquement taquine et trash. Un procédé un brin éculé. Côté face, on appréciera la sobriété de Blanche Gardin dans le rôle de Jeanne et la douce fantaisie de Maxence Tual dans celui de son frère. Leur tandem incertain, décalé, crée une dynamique très attachante.
Tout le monde aime Jeanne, de Céline Devaux. Sortie le 7 septembre.
LA FILLE À LA MOTO
Il y a de grandes chances que ce premier film dérange. Déjà parce que Lola Quivoron, sa réalisatrice, nous immerge dans l’univers controversé du rodéo urbain, ensuite parce qu’elle s’est choisi pour héroïne une motarde solitaire fascinée par une bande de petites frappes adeptes du cross-bitume.
La jeune femme (remarquable Julie Ledru) finit par infiltrer le gang… Dommage pour elle, tant mieux pour nous ! De fait, si ce thriller vrombissant détone et décolle, par-delà sa mise en scène sensible et son suspense moyen, c’est parce qu’il sonde franco les sté- réotypes de genre dans un milieu viriliste, violent et fermé. Julia, son amazone singulière, se fout de tout, sauf de sa liberté. Elle n’a pas besoin des garçons au fond, et c’est bien là qu’est le vrai danger pour elle…
Rodéo, de Lola Quivoron. Sortie le 7 septembre.
UN MONDE SANS PITIÉ
Est-ce vraiment un film de science-fiction ? Ne serait-ce pas plutôt une fiction politique, qui nous embarque dans une dystopie à peine perceptible pour mieux pointer les aberrations actuelles de nos sociétés ? En l’occurrence, leur manque d’empathie pour les plus faibles ? Le fait est que Plan 75 s’empare d’un sujet crucial – le nombre grandissant de personnes âgées – de manière troublante. À la fois très calme et totalement déchirante…
Nul hasard si ce premier long-métrage, écrit et dirigé par la cinéaste japonaise
Chie Hayakawa, a reçu une mention spéciale au Festival de Cannes. La subversion tranquille de son récit n’en est que plus dévastatrice ! Il nous transporte ainsi dans un futur proche au Japon, alors que le vieillissement de la population s’accélère. Le gouvernement, qui estime qu’à partir d’un certain âge les seniors deviennent une charge inutile pour la société, met donc en place le « Plan 75 ». Un programme qui propose aux plus de 75 ans un accompagnement logistique et financier pour mettre fin à leurs jours…
Subtile, la réalisatrice dévoile ce pacte mortifère à travers le destin conjugué de trois personnages : une vieille dame très seule, une aide-soignante philippine et un jeune recruteur du gouvernement. Chacun, à sa façon, est victime de ce système absurde, constate sobrement Chie Hayakawa. C’est d’ailleurs l’une des grandes qualités de son premier opus : il n’est jamais spectaculaire, comme peuvent l’être les films d’épouvante (ou de science-fiction). Sa violence est plus diffuse et plus plausible. Donc bien plus effrayante !
Plan 75, de Chie Hayakawa. Sortie le 7 septembre.