Le film de Béatrice Pollet donne à voir un thriller judiciaire passionnant sur un sujet délicat, vertigneux et souvent mal traité au cinéma : le déni de grossesse.
C’est peu dire que l’on redoutait le film-dossier, didactique et empesé, sur un tel sujet. On se trompait ! En s’attaquant à la question vertigineuse du déni de grossesse, si peu et souvent si mal traitée au cinéma, Béatrice Pollet donne à voir un thriller judiciaire passionnant. D’autant plus juste qu’il déroule sobrement son intrigue documentée et ménage son suspense sans effets de manches…
Toi non plus tu n’as rien vu s’ouvre ainsi sur une scène estivale, qui place littéralement dans la lumière ses deux héroïnes, Claire et Sophie, avocates et amies. Un court moment de répit avant que cette amorce d’intrigue, faussement quotidienne, ne bascule dans une nuit opaque, quasi irréelle. Claire (Maud Wyler, aussi troublante que troublée) est retrouvée ensanglantée et inanimée chez elle, après qu’un nouveau-né, dont on apprendra qu’il est le sien, a été récupéré par un voisin sur le couvercle d’un container, à l’extérieur. Très vite, alors que personne ne savait qu’elle était enceinte, pas même elle, Claire est accusée de tentative d’homicide sur enfant de moins de 15 ans, et c’est bien évidemment Sophie (Géraldine Nakache, épatante de densité) qui est chargée de la défendre…
À la fois grave, sensible et mystérieux, le récit de Béatrice Pollet ne cessera alors d’avancer avec précaution, interrogeant finement, par le biais du genre, le statut juridique du déni de grossesse (en droit français, l’état mental de la mère en déni n’est pas considéré comme un facteur atténuant en cas de mise en danger de l’enfant pendant ou après l’accouchement). Histoire de lever, peut-être, enfin, nombre de préjugés…
Toi non plus tu n’as rien vu, de Béatrice Pollet. Sortie le 8 mars.