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© Netflix

« Pray Away : Désirs Martyrisés », un puis­sant docu­men­taire sur les thé­ra­pies de conver­sion du mou­ve­ment « ex-gays »

Disponible sur Netflix, le docu­men­taire dresse un por­trait édi­fiant d’ex-leaders et de survivant·es de ces pra­tiques qui cherchent à « gué­rir » les orien­ta­tions sexuelles. Entrecoupés de nom­breuses images d’archives, il donne la parole à ces per­sonnes LGBT+ per­sua­dées que la reli­gion peut les « sau­ver ».

A 16 ans, Julie Rodgers fait son coming-​out à sa mère, fer­vente pra­ti­quante chré­tienne. La jeune femme est alors inté­grée dans un groupe reli­gieux qui pro­met de lui faire chan­ger d’orientation sexuelle. Ce col­lec­tif est for­mé « d’ex-gays » qui, à tra­vers des lec­tures de la Bible, des encou­ra­ge­ments au chan­ge­ment de com­por­te­ments et de l’entraide, essayent et par­fois « deviennent » hétérosexuel·les. « J'espérais que Dieu me délivre de moi-​même (…), j’étais convain­cue d’être le Mal incar­né », explique Julie Rodgers face à la caméra.

Ce docu­men­taire poi­gnant, dis­po­nible sur la pla­te­forme Netflix depuis le 3 août, est pro­duit par Ryan Murphy et réa­li­sé par Kristine Stolakis, qui « [s'est] sen­tie très déter­mi­née à faire un film [lorsqu’elle a] décou­vert que la grande majo­ri­té des orga­ni­sa­tions de thé­ra­pie de conver­sion sont en fait diri­gées par des per­sonnes LGBTQ elles-​mêmes », a‑t-​elle expli­qué à NBC News. Il s’agit éga­le­ment d’un enga­ge­ment per­son­nel, son oncle ayant été vic­time de ces pratiques. 

Homophobie et trans­pho­bie internalisées 

Durant 1h40, une atten­tion par­ti­cu­lière est por­tée à Exodus, la plus grande orga­ni­sa­tion d’ex·gays chrétien·nes qui a ces­sé son acti­vi­té en 2013 et qui avait pour voca­tion de gué­rir l’homosexualité de ses membres. Le docu­men­taire donne d’ailleurs la parole à Michael Bussee, cofon­da­teur de l’association mais aus­si un des pre­miers à la quit­ter et à cri­ti­quer son idéo­lo­gie et ses méthodes.

Pray Away dresse le por­trait de plu­sieurs ancien-​nes lea­ders ex-​gays. Il y a notam­ment John Paulk, qui était la figure média­tique d’Exodus : un « ex-​gay » marié à une « ex-​lesbienne », qui affir­mait à qui vou­lait l’entendre que l’homosexualité est réver­sible et qu’il ne s’agit que d’un « com­por­te­ment ». Aujourd’hui, John Paulk vit avec un homme et exprime d’immenses regrets d’avoir ten­té de chan­ger sa propre nature et celle des autres.

Lire aus­si : Garrard Conley : se recons­truire après une thé­ra­pie de conversion

Si le docu­men­taire est aus­si bou­le­ver­sant qu’utile, c’est qu’il montre la réa­li­té de l’homophobie et la trans­pho­bie inter­na­li­sées. Basé sur de la pseudo-​psychologie et la reli­gion, le mou­ve­ment ex-​gays révèle toute l’ampleur de ces croyances. « Très sou­vent, en sor­tant des séances de thé­ra­pies, je m’automutilais, explique Julie Rodgers, je vou­lais brû­ler ce corps qui n’était pas celui d’une hété­ro et qui n’était pas aus­si fémi­nin qu’une bonne chré­tienne ». 

Victimes et bourreaux 

Les intervenant·es du docu­men­taire sont donc à la fois des vic­times et des bour­reaux. Pray Away ne mini­mise néan­moins pas le mal qu’ils et elles ont pu cau­ser dans leur rôle de lea­ders au sein du mou­ve­ment ex-​gays, en encou­ra­geant ces thé­ra­pies de conver­sion. Randy Thomas, ancien vice-​président d’Exodus, admet en pleurs qu’il a « du sang sur les mains » et qu’il a bles­sé « les gens de [sa] propre com­mu­nau­té ». Près de 700 000 per­sonnes ont subi des thé­ra­pies de conver­sion aux Etats-​Unis, et elles sont deux fois plus sus­cep­tibles de faire une ten­ta­tives de sui­cide, apprend-​t-​on dans le documentaire.

Au vision­nage, on découvre éga­le­ment le témoi­gnage de Jeffrey McCall, un « ex-​femme trans » qui a « arrê­té sa tran­si­tion grâce à Jésus » et qui pro­meut désor­mais cette « libé­ra­tion ». Il est à la tête de Freedom March, un groupe de jeunes ayant « quit­té le mode de vie LGBT ». Sa pré­sence dans le docu­men­taire per­met de mon­trer que ces pra­tiques sont tou­jours d’actualité et ne semblent pas dimi­nuer. « Tant qu’il y aura de l’homophobie, les orga­ni­sa­tions conti­nue­ront d’exister, tant que cette convic­tion per­du­re­ra, ça ne s’arrêtera pas », conclut ain­si le documentaire.

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