Il forme un tandem atypique avec Laetitia Dosch dans Petite leçon d’amour, rom’com’ burlesque et savoureuse. Rencontre avec Pierre Deladonchamps, acteur caméléon – et féministe – qui a le chic pour bousculer les stéréotypes au cinéma.
Causette : Petite leçon d’amour est une comédie romantique qui se distingue par son côté loufoque et sa poésie, dans la lignée des classiques américains des années 1930 et 1940. Un vrai défi pour un comédien, non ?
Pierre Deladonchamps : Je ne l’ai pas ressenti comme ça ! Vous savez, je ne suis pas trop le genre d’acteur qui se nourrit de films ou de modèles pour un rôle. J’ai envie de me sentir libre, de me rendre disponible chaque fois. C’est vrai que je suis rentré dans le cinéma par le drame, avec L’Inconnu du lac, d’Alain Guiraudie, et que j’en ai fait d’autres depuis. Alors, j’ai cette image un peu grave. Mais j’aime aussi aller vers des choses plus légères. En apparence tout du moins ! Car, finalement, les deux antihéros de Petite leçon d’amour se sauvent eux-mêmes en essayant de sauver une tierce personne…
C’est la première fois que vous formez un duo de cinéma avec Laetitia Dosch. Alors… content ?
P. D. : Et comment ! Une des raisons pour lesquelles j’ai voulu jouer dans ce film, c’est parce que j’avais très envie de tourner avec elle. Je n’ai pas été déçu ! Elle dégage une telle singularité, une telle poésie ! Et puis je suis très admiratif de sa liberté. Il y a une forme de jolie détresse en elle que j’aime beaucoup. Ça s’est tellement bien passé entre nous que l’on a rejoué ensemble depuis, dans le nouveau film de Gilles Perret, le coréalisateur (avec François Ruffin) de Debout les femmes !
La dynamique de Petite leçon d’amour repose sur un duo qui se joue des stéréotypes de genre et propose un schéma inhabituel. La femme y est libre, ne s’excuse jamais et mène le jeu, tandis que l’homme se laisse bousculer, déborder, voire envahir par elle…
P. D. : Je pense que c’est un chemin nécessaire pour donner une place juste et égalitaire aux femmes. Nous vivons un moment clé dans notre société moderne. Si ce type de relation est envisagé dans l’art, dans la fiction, alors cela peut amener le public à y réfléchir. J’ai beaucoup discuté avec des amis et amies sur la question du féminisme. Moi-même, j’ai rejoint très tôt Le Collectif 50/50 pour l’égalité des hommes et des femmes dans le cinéma. On passe par un moment, aujourd’hui, où l’on a besoin de donner un coup de pied dans la fourmilière. Et puis ça fait du bien d’être bousculé, y a pas mort d’homme [rires] !
Dès vos premiers grands rôles au cinéma, vous avez incarné une masculinité alternative, parfois queer (Nos années folles), parfois repoussante (Les Chatouilles), parfois trouble (Vaurien). Est-ce un hasard ?
P. D. : J’ai longtemps cherché à ressembler à ce que je pensais être un homme, un vrai… Sans doute parce que j’ai eu ma puberté très tard, vers 16–17 ans. J’étais certainement complexé. Mais cela a été un mal pour un bien, car cela m’a fait prendre conscience, peu à peu, qu’être un homme, eh bien ça n’était pas seulement correspondre à cette image viriliste, loin de là ! J’ai la chance d’être dans une époque où l’on remet ça en question. Franchement, est-ce que l’on a envie de ne voir que des mâles alpha au cinéma ? Je ne crois pas !
Petite leçon d’amour, d’Ève Deboise. Sortie le 4 mai.