Un mobile, une minute, un film : c’est la contrainte du Mobile film festival qui fait son succès depuis 2005. Cette année, la thématique Women’s empowerment a mobilisé des réalisateur.trices de 91 pays. La présidente du jury Agnès Jaoui et son équipe ont eu du mal à départager les gagnant.es !
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Depuis 2005, le Mobile Film Festival célèbre des courts métrages tournés à l‘international avec un téléphone portable selon une trinité de contraintes inchangée : un mobile, une minute, un film. Cette année, les femmes ont été à l’honneur, en tant que réalisatrices, représentant 57% des 800 films proposés, mais aussi au cœur de la thématique donnée : Women's empowerment.
Le palmarès de cette édition a récompensé neuf courts-métrages, avec, pour les gagnant.es du Grand prix international et Grand prix France 20 000 euros à la clef, grâce au soutien de BNP Paribas. Il s’agit de la Britannique Alisa Tritenko pour Career Path, racontant les difficultés que les femmes rencontrent dans le monde du travail et comment la sororité peut les aider à les surmonter, et des Français·es Christabel Desbordes et Benjamin Clavel pour Une nouvelle page, qui à travers une animation en slow motion, narre avec humour l’Histoire des femmes avec un grand H. Les Prix du scénario pour la Nigériane Florin Clay Ejeh, récompensée pour The Bride, son court sur les mariages forcés par le prisme d’une jeune fille de 14 ans qui s’y prépare, et Prix de la Mise en scène qui revient à l’Iranienne Farideh Naderi, pour Divar (the Wall) sur les inégalités entre les filles et les garçons à l’école, permettront aux deux réalisatrices de repartir avec 3 000 euros.
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Si visionner les soixante vidéos sélectionnées et soumises au jury n’a pris qu’une heure, les départager ensuite a été une autre paire de manche. « C’est étonnant parce qu’on a des évidences qui ne le sont pas pour les autres, c’est vraiment rigolo de trouver des consensus. C’était trop court ce temps passé ensemble ! » s’exclame la réalisatrice Agnès Jaoui en évoquant la « formidable équipe » qui a composé le jury du Mobile film festival cette année : Chiara Corazza, directrice générale du Women's Forum, les frères écrivain et réalisateur David et Stéphane Foenkinos, la réalisatrice et journaliste Anastasia Mikova, la journaliste Marine Périn, le rappeur Oxmo Puccino, la directrice de Youtube France Justine Ryst, l’auteure Florence Sandis, la chanteuse Aloïse Sauvage, la productrice Anne-Dominique Toussaint, et l’autrice Tania de Montaigne, qui est tout aussi enthousiaste. « C’était super et on a bataillé, c’est vrai ! Certains étaient plus sensibles au fond que la forme, d’autres l’inverse. Mais finalement, le palmarès est représentatif de notre diversité de regards, et bien équilibré ». De Taiwan au Brésil, de jeunes réalisateurs, amateurs ou non, dont 57% de femmes, ont pu s’emparer de la cause féministe à travers les filtres culturels de 91 pays différents. « Chaque court-métrage nous racontait comment être une femme aujourd’hui à travers une multitude de perspectives, reprend Tania de Montaigne. Un véritable voyage ! Cela m’a enrichie personnellement. Certaines et certains ont attrapé le sujet du côté de l’empêchement, ce qui nous parle à toutes et tous. L’entrave faite aux droits des femmes, que ce soit en France ou au Nigéria par exemple. » Plusieurs ONG ont soutenu le projet cette année, en particulier la campagne Génération égalité d’ONU Femmes.
Avec son œil expert, Agnès Jaoui souligne quant à elle la difficulté d’une narration sur un format court. « La contrainte d’une minute, c’est passionnant ! C’est fou comme certains nous ont emmenés très loin en si peu de temps. Construire une narration aussi riche est un véritable défi. On peut perdre le spectateur en 2 secondes, ou le tenir tout du long et lui donner l’impression de regarder un long métrage, car on est pris dans une épopée à l’instant où elle commence ! » Paroles de réalisatrice de longue date, qui s’est laissée porter par cette expérience de jurée, et cette thématique de l’émancipation des femmes qui lui tient fort à cœur. Agnès porte un masque estampillé 50 /50 du nom du collectif qui défend l’égalité, la parité et la diversité dans le monde du cinéma et de l’audiovisuel. Le 25 novembre dernier, elle a tenu une tribune puissante et bouleversante à l’occasion de l’assise du collectif, notamment sur les injonctions faites aux femmes, dénonçant le jeunisme et la grossophobie, trop souvent imposés aux actrices. « Vous savez, j’ai souvent répondu à des costumières ou vendeuses, confrontée à leurs regards dépréciateurs, que je me trouvais belle. Les femmes peuvent aussi être vectrices de discrimination et je bataille pour plus de tolérance entre nous, pour une sororité et un lien intergénérationnel. C’est très important de tenir l’étendard toutes ensemble ! »
La présidente du jury est inscrite dans le combat pour le droit des femmes depuis toujours. « Aussi loin que je me souvienne, je suis féministe. » Et cela se ressent dans ses films. Dans un lapsus révélateur, Agnès Jaoui reconnaît toutefois qu’il lui a fallu du temps pour une « prise de confiance » pour investir d’autres terrains que le cinéma et s’exprimer haut et fort sur sa propre expérience pour servir celles des autres femmes. Le Mobile Film Festival à ce titre, a su choisir sa présidente de jury avec brio, et donner la parole à travers un palmarès brillant, aux talents cinématographiques de demain de tous horizons géographiques et culturels.