Incroyable mais vrai, Sweat et Le Prince, trois pépites très différentes à retrouver au cinéma ce 15 juin.
Incroyable mais vrai… Cette célèbre formule dépeint si justement l’univers barré de Quentin Dupieux qu’on pourrait presque croire qu’il l’a inventée ! De fait, ses films fables, tapissés d’absurde, sont souvent bien plus vertigineux qu’ils en ont l’air, même lorsqu’ils nous confrontent à un pneu tueur (Rubber, en 2010), à un type qui parle à son blouson (Le Daim, en 2019) ou à une mouche gОante (Mandibules, en 2020)… La preuve avec le nouveau et dixième opus de ce cinéaste culte. La folle intrigue d’Incroyable mais vrai s’ordonne autour d’un couple de quadras-quinquas, Alain et Marie, nouveau et nouvelle propriétaires d’un pavillon dans lequel se niche une trappe temporelle. Celle-là même qui leur permet de rajeunir de trois jours à chacun de leur passage… Marie devient très vite accro, sous le regard impuissant d’Alain, décidément très seul puisque son unique ami ne s’intéresse qu’au pénis électronique qu’il vient de se faire greffer ! L’enjeu est clair : cette histoire loufoque se moque aussi bien des injonctions actuelles (la jeunesse éternelle et le culte de la performance) que des sempiternelles obsessions masculines (tout tourne autour d’un trou et d’une bite, en fin de compte). Nul message lourdement asséné pour autant. Quentin Dupieux nous convainc et nous ravit par le seul flux original de son récit, qui oscille entre réalisme et fantastique, humour et effroi, douceur apparente et violence sous-jacente. Cet homme-orchestre a su s’entourer, il est vrai, de quatre comédien·nes virtuoses. Alain Chabat, Léa Drucker, Anaïs Demoustier et Benoît Magimel sont incroyables dans ce film. Vraiment !
Incroyable mais vrai, de Quentin Dupieux. Sortie le 15 juin.
Attention, pépite ! Et l’on ne dit pas cela parce que l’un des protagonistes de ce film allemand est diamantaire. Non, si Le Prince est précieux, c’est parce qu’il a la bonne idée de nous projeter dans une histoire d’amour complexe, adulte, élégante. De celles qui parviennent à interroger subtilement une réalité multifacettes. En l’occurrence, le premier long-métrage de Lisa Bierwirth est un drame, et même un mélodrame qui relate la rencontre entre Monika, curatrice dans une galerie d’art contemporain à Francfort, et Joseph, diamantaire congolais en attente de régularisation qui survit de combines plus ou moins légales. Autant dire qu’ils n’ont rien en commun ! Le coup de foudre est de mise pourtant. Persuadé·es qu’ils sont différent·es des autres, donc qu’il et elle surmonteront leurs écarts socioculturels comme les préjugés alentour, ces deux quadras entament très naturellement une relation. Mais la défiance va peu à peu s’immiscer dans leur amour… Sur un sujet des plus classiques, Le Prince prend donc le contrepied des comédies romantiques… pour mieux nous séduire. Grâce à sa qualité d’écriture, qui nous permet d’accompagner des personnages nuancés et traités à parts égales. Grâce à la finesse de sa réalisation, qui montre les incomprèhensions des deux côtés, même si, par souci d’authenticité, le film de Lisa Bierwirth interroge surtout les préjugés du « regard blanc » (le sien). Et grâce, enfin, au talent de ses interprètes. Ursula Strauss (qui fait penser à Olivia Colman) et le rappeur franco-congolais Passi Balende apportent force, mystère et vulnérabilité à Monika et à Joseph. Joli travail ciselé.
Le Prince, de Lisa Bierwirth. Sortie le 15 juin.
Elle est tellement solaire, Sylwia, et tellement positive ! Blondeur soignée, muscles galbés, sourire vitaminé, cette prof de fitness polonaise incarne la perfection aux yeux de ses fans. Entre séances d’entraînement, recettes de boissons protéinées, promotion de vêtements de sport et leçons de vie, cette Barbie tonique partage d’ailleurs quasiment chaque instant de son quotidien avec ses 600 000 follower·euses sur son compte Instagram. Les rendant toujours plus accros. Jusqu’au jour où son besoin viscéral d’être aimée la pousse à se confier sur sa solitude. Une vidéo modérément appréciée par ses annonceurs, mais « surlikée », en revanche, par l’un de ses admirateur·trices… Attention, le deuxième long-métrage de Magnus von Horn n’est ni un thriller pur jus ni une charge méchante contre les influenceur·euses ! En filmant celle qui ne cesse de se filmer, ce cinéaste suédois vivant à Varsovie veut surtout nous donner à voir l’envers du décor de ces vies consacrées aux likes et à la performance. Flirtant avec l’esthétique du documentaire, tout à la fois sobre et sensible, sa réalisation désacralise avec justesse, sans effet, la vie de pacotille de Sylwia. Lui restituant ses failles, sa solitude bien réelle… son humanité en somme. Reste que si Sweat (« sueur » en français) ne nous fait jamais suer, c’est en grande partie grâce à Magdalena Kolesnik, son actrice principale. Dans le rôle de Sylwia, cette poupée qui crie et que personne n’entend, elle dérange autant qu’elle fascine. Impeccable, décidément…
Sweat, de Magnus von Horn. Sortie le 15 juin.