Marie-​Monique Robin : « Montrer la beau­té de la bio­di­ver­si­té, en don­nant envie de la protéger »

Ce dimanche 22 mai, la jour­née mon­diale de la bio­di­ver­si­té est l’occasion idéale pour décou­vrir le nou­veau film de Marie-​Monique Robin, La fabrique des pan­dé­mies. Comme pour cha­cun de ses docu­men­taires, la jour­na­liste d'investigation s’attaque à un sujet choc. Ici, elle démontre les liens entre la perte de la bio­di­ver­si­té et le déve­lop­pe­ment des pandémies.

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C’est une démons­tra­tion impla­cable. Suivant Juliette Binoche qui joue le rôle du « can­dide », Marie-​Monique Robin nous entraine dans huit pays qui sont autant de points stra­té­giques pour décou­vrir la méca­nique du déve­lop­pe­ment des pan­dé­mies. Celles que l’on a déjà subies et, plus gla­çant, celles qui sont en deve­nir. Dans cha­cun de ces pays, des scien­ti­fiques expliquent clai­re­ment, et de façon pré­cieu­se­ment didac­tique, com­ment et pour­quoi ces mala­dies se créent et se diffusent.

Dès le début du film, plon­gés au cœur de la plus grande forêt tro­pi­cale du monde, nous sai­sis­sons l’un des para­mètres du méca­nisme, qui tel un déve­lop­pe­ment frac­tal, nous aide­ra à com­prendre l’ensemble du phé­no­mène. Il s’agit de « l'effet dilu­tion ». En effet, lorsqu’une forêt est « sau­vage », comme les forêts pri­maires, l’équilibre natu­rel fait que des agents patho­gènes agissent et contiennent les infec­tions. Lorsqu’on mor­celle la forêt, qu’on l’éclaircie par des coupes, ces agents sont moins actifs, des virus se développent.

C’est la clef du pro­ces­sus, que l’on va obser­ver tout au long du docu­men­taire, répé­té en de mul­tiples endroits à l’occasion de mul­tiples atteintes à la Nature. Là où la bio­di­ver­si­té est en dan­ger, le pro­ces­sus de la pan­dé­mie se met en place.

En Malaisie, nous allons assis­ter à l’un de ces pro­ces­sus inexo­rable, qui vit appa­raitre dans les années 90 le virus de Nipah, qui fit de nom­breuses vic­times humaines (et qui vient de réap­pa­raitre en Inde). 

C’est affreu­se­ment simple. Bornéo subit à l’époque une intense période de défo­res­ta­tion pour implan­ter des colo­nies de pal­mier à huile. Ceci per­turbe pro­fon­dé­ment les chauves sou­ris du coin ‑admi­rable mam­mi­fère par ailleurs, dont nous dépen­dons à plu­sieurs titres et qui a déve­lop­pé 1400 espèces, cha­cune magni­fi­que­ment adap­tées à son biotop.

Les voi­ci qui migrent pour se nour­rir vers des plan­ta­tions. Elles sont stres­sée, cela active encore le virus dont elles sont « porteur-​sain » et qui, via leurs déjec­tions, conta­minent des éle­vages de porc à proxi­mi­té. Contaminant les porcs, dont la com­plexion est proche de la notre, le virus apprend vite. Il « s’humanise », il devient com­pa­tible, et bien­tôt le voi­ci apte à conta­mi­ner l’humain. Il est mor­tel à 70%.

Analysant ce méca­nisme, La fabrique des pan­dé­mies nous fait décou­vrir des cas divers où il a pu se déve­lop­per, avec des raf­fi­ne­ments aus­si pré­cis qu’effrayant. La mala­die de Lyme, le virus Ebola, et même le Corona Virus, dont une étude avait poin­té le dan­ger en 2018.

Mais ce docu­men­taire est aus­si l’occasion de décou­vrir les émou­vants et si pré­cis méca­nismes de la Nature, et des professionnel·les passionné·es dont l’enthousiasme est com­mu­ni­ca­tifs. Des femmes et des hommes, épi­dé­mio­logues, bio­lo­gistes, éco­logues, qui ont voué leur vie à la vie, à la bonne san­té de la pla­nète. Marie Monique Robin vou­lait don­ner la parole à ces spé­cia­listes de ter­rain « qui ont, dit-​elle, ont l’impression de prê­cher dans le désert. Curieusement, l’impressionnante exper­tise qu’ils ont accu­mu­lée est lar­ge­ment igno­rée des poli­tiques qui se contentent de parer au plus pres­sé – avec des mesures sani­taires et des vac­cins – sans s’attaquer aux causes qui sont à l’origine des pan­dé­mies. »

Malgré tout, La fabrique des pan­dé­mies ne tient pas un dis­cours anxio­gène. La réa­li­sa­trice sou­hai­tait faire « un film qui fasse du bien, en remet­tant de la cohé­rence dans les désordres qui nous assaillent (…) mon­trer la beau­té de la bio­di­ver­si­té, en don­nant envie de la pro­té­ger. » Et en effet, on ter­mine le film dans un état d’émerveillement et de révolte. Un bon ter­reau pour l’action.

La Fabrique des pan­dé­mies, de Marie-​Monique Robin, est visible ce 22 mai sur Ushuaïa TV à 20h45 et en pro­jec­tions ciné-​débats dans ces salles.

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