Ce dimanche 22 mai, la journée mondiale de la biodiversité est l’occasion idéale pour découvrir le nouveau film de Marie-Monique Robin, La fabrique des pandémies. Comme pour chacun de ses documentaires, la journaliste d'investigation s’attaque à un sujet choc. Ici, elle démontre les liens entre la perte de la biodiversité et le développement des pandémies.
![Marie-Monique Robin : « Montrer la beauté de la biodiversité, en donnant envie de la protéger » 1 5 Affiche p](https://www.causette.fr/wp-content/uploads/2022/05/5-Affiche-p-724x1024.jpg)
C’est une démonstration implacable. Suivant Juliette Binoche qui joue le rôle du « candide », Marie-Monique Robin nous entraine dans huit pays qui sont autant de points stratégiques pour découvrir la mécanique du développement des pandémies. Celles que l’on a déjà subies et, plus glaçant, celles qui sont en devenir. Dans chacun de ces pays, des scientifiques expliquent clairement, et de façon précieusement didactique, comment et pourquoi ces maladies se créent et se diffusent.
Dès le début du film, plongés au cœur de la plus grande forêt tropicale du monde, nous saisissons l’un des paramètres du mécanisme, qui tel un développement fractal, nous aidera à comprendre l’ensemble du phénomène. Il s’agit de « l'effet dilution ». En effet, lorsqu’une forêt est « sauvage », comme les forêts primaires, l’équilibre naturel fait que des agents pathogènes agissent et contiennent les infections. Lorsqu’on morcelle la forêt, qu’on l’éclaircie par des coupes, ces agents sont moins actifs, des virus se développent.
C’est la clef du processus, que l’on va observer tout au long du documentaire, répété en de multiples endroits à l’occasion de multiples atteintes à la Nature. Là où la biodiversité est en danger, le processus de la pandémie se met en place.
En Malaisie, nous allons assister à l’un de ces processus inexorable, qui vit apparaitre dans les années 90 le virus de Nipah, qui fit de nombreuses victimes humaines (et qui vient de réapparaitre en Inde).
C’est affreusement simple. Bornéo subit à l’époque une intense période de déforestation pour implanter des colonies de palmier à huile. Ceci perturbe profondément les chauves souris du coin ‑admirable mammifère par ailleurs, dont nous dépendons à plusieurs titres et qui a développé 1400 espèces, chacune magnifiquement adaptées à son biotop.
Les voici qui migrent pour se nourrir vers des plantations. Elles sont stressée, cela active encore le virus dont elles sont « porteur-sain » et qui, via leurs déjections, contaminent des élevages de porc à proximité. Contaminant les porcs, dont la complexion est proche de la notre, le virus apprend vite. Il « s’humanise », il devient compatible, et bientôt le voici apte à contaminer l’humain. Il est mortel à 70%.
Analysant ce mécanisme, La fabrique des pandémies nous fait découvrir des cas divers où il a pu se développer, avec des raffinements aussi précis qu’effrayant. La maladie de Lyme, le virus Ebola, et même le Corona Virus, dont une étude avait pointé le danger en 2018.
Mais ce documentaire est aussi l’occasion de découvrir les émouvants et si précis mécanismes de la Nature, et des professionnel·les passionné·es dont l’enthousiasme est communicatifs. Des femmes et des hommes, épidémiologues, biologistes, écologues, qui ont voué leur vie à la vie, à la bonne santé de la planète. Marie Monique Robin voulait donner la parole à ces spécialistes de terrain « qui ont, dit-elle, ont l’impression de prêcher dans le désert. Curieusement, l’impressionnante expertise qu’ils ont accumulée est largement ignorée des politiques qui se contentent de parer au plus pressé – avec des mesures sanitaires et des vaccins – sans s’attaquer aux causes qui sont à l’origine des pandémies. »
Malgré tout, La fabrique des pandémies ne tient pas un discours anxiogène. La réalisatrice souhaitait faire « un film qui fasse du bien, en remettant de la cohérence dans les désordres qui nous assaillent (…) montrer la beauté de la biodiversité, en donnant envie de la protéger. » Et en effet, on termine le film dans un état d’émerveillement et de révolte. Un bon terreau pour l’action.
La Fabrique des pandémies, de Marie-Monique Robin, est visible ce 22 mai sur Ushuaïa TV à 20h45 et en projections ciné-débats dans ces salles.