multicolored flag
Photo by daniel james

Sénat : une pro­po­si­tion de loi « sym­bo­lique » pour la répa­ra­tion des per­sonnes condam­nées pour homosexualité

Le séna­teur PS de l'Hérault Hussein Bourgi dépo­se­ra ce same­di une pro­po­si­tion de loi por­tant répa­ra­tion des per­sonnes condam­nées pour homo­sexua­li­té entre 1942 et 1982 en France. L'élu, ouver­te­ment gay, se confie à Causette sur la genèse de ce texte. 

Quarante ans après, les per­sonnes LGBT+ attendent tou­jours jus­tice et répa­ra­tion. Le 4 août 1982, sous la pré­si­dence de François Mitterrand qui en avait fait la pro­messe, une loi met fin à une dis­po­si­tion prise elle-​même qua­rante ans plus tôt, en 1942, sous Vichy, condam­nant les rela­tions homo­sexuelles avec une per­sonne âgée de moins de 21 ans. Une vic­toire face à « une légis­la­tion scé­lé­rate », comme la qua­li­fie le séna­teur PS de l'Hérault Hussein Bourgi, qui pro­fite de l'anniversaire du texte pour annon­cer une pro­po­si­tion de loi « sym­bo­lique », por­tant répa­ra­tion des per­sonnes condam­nées pour homo­sexua­li­té entre 1942 et 1982. Selon les esti­ma­tions de l'élu, envi­ron 200 per­sonnes en France pour­raient être concer­nées par cette politique.

L'homme poli­tique, ouver­te­ment gay, entend rap­pe­ler à la France qu'entre ces deux dates près de 10.000 per­sonnes, selon les tra­vaux des socio­logues Jérémie Gauthier et Régis Schlagdenhauffen, publiés en 2018, ont, d'une manière ou d'une autre, étaient inquié­tées par cette loi émise par le maré­chal Pétain le 6 août 1942. Une dis­cri­mi­na­tion qui ne s'appliquait évi­dem­ment pas aux rela­tions sexuelles avec quelqu'un·e du sexe oppo­sé, tant qu'il·elle avait 13 ans, l'âge de la majo­ri­té sexuelle, ou 15 ans à par­tir de 1945. « En 1945, le gou­ver­ne­ment pro­vi­soire abroge toutes les lois prises par Vichy à l’exception de celle-​ci, s'étonne Hussein Bourgi auprès de Causette. Elle est res­tée comme une épée de Damoclès au-​dessus la tête de toutes ces per­sonnes, qui savaient que leur mode de vie était pas­sible péna­le­ment. Il pou­vait se tra­duire par des arres­ta­tions, des condam­na­tions, des amendes et des peines de pri­son. La sanc­tion pénale était éga­le­ment accom­pa­gnée d’une sanc­tion sociale, car l’employeur pou­vait être mis au cou­rant, la famille aus­si…»

C'est à l'occasion de sa der­nière ren­contre avec le mili­tant LGBT+ lyon­nais Michel Chomarat, qui a fait par­tie des per­sonnes inter­pel­lées pour outrage public à la pudeur en 1977 au bar gay le Manhattan, que l'idée de la pro­po­si­tion de loi lui vient. L'homme, qu'il connaît depuis plu­sieurs années, lui confie vou­loir une seule chose : « La jus­tice ».

Des exemples internationaux

La pro­po­si­tion de loi d'Hussein Bourgi se com­pose de cinq articles. Le pre­mier fait état de la recon­nais­sance de la France concer­nant sa « poli­tique de cri­mi­na­li­sa­tion et de dis­cri­mi­na­tion mise en œuvre, entre le 6 août 1942 et le 4 août 1982, à l'encontre des per­sonnes homo­sexuelles ou pré­su­mées telles, et condam­nées ». Une recon­nais­sance qui ouvre à ces per­sonnes le béné­fice d'une répa­ra­tion détaillée dans l'article 3. À savoir une allo­ca­tion for­fai­taire fixe de 10.000 euros, une allo­ca­tion for­fai­taire variable en fonc­tion du nombre de jours de pri­va­tion de liber­té,
fixée à 150 euros par jour, et le rem­bour­se­ment du mon­tant de l’amende dont les per­sonnes LGBT+ se seraient acquit­tées. Une com­mis­sion indé­pen­dante visant à éva­luer les demandes en répa­ra­tion est éga­le­ment consti­tuée par l'article 4.

D'autres pays ont com­men­cé ce même tra­vail de recon­nais­sance et de répa­ra­tion. mémoire. Le Premier ministre cana­dien Justin Trudeau a pré­sen­té ses excuses aux per­sonnes LGBT+ en novembre 2017, de même que le Premier ministre nor­vé­gien Jonas Gahr Støre en avril der­nier. L'Espagne, dès 2007, et l'Allemagne, dès 2017, ont éga­le­ment mis en place des poli­tiques de répa­ra­tion pécu­niaire. En 2017, 116 Espagnols homo­sexuels avaient été indem­ni­sés, selon El Pais. Et en 2021, 249 Allemands homo­sexuels. Selon les esti­ma­tions de l'élu, envi­ron 200 per­sonnes en France pour­raient être concer­nées par cette politique.

Du côté du gou­ver­ne­ment, annonce de la créa­tion d'un poste d'« ambas­sa­deur aux droits LGBT »

En ce jour sym­bo­lique du 4 août 2022, la Première ministre Elisabeth Borne a annon­cé la consti­tu­tion d'un fonds de 3 mil­lions d'euros pour per­mettre la créa­tion de dix nou­veaux centres LGBT+. Elle a éga­le­ment pro­mis qu'un « ambas­sa­deur aux droits LGBT+ » serait nom­mé avant la fin de l'année pour défendre la dépé­na­li­sa­tion uni­ver­selle de l'homosexualité et de la tran­si­den­ti­té. Concernant la pro­po­si­tion de loi de Bourgi, sou­te­nue par une cin­quan­taine de sénateur·rices, elle a indi­qué l'avoir enten­due et qu'elle serait exa­mi­née. « Ce n'est pas un sujet simple. Ce n'est pas simple aus­si de savoir com­ment on répare des bles­sures qui ont pu être appor­tées en rai­son de dis­cri­mi­na­tions. Mais c'est vrai­ment un sujet pour lequel on va regar­der la pro­po­si­tion qui va être dépo­sée », a‑t-​elle pour­sui­vi. Hussein Bourgi doit la dépo­ser ce same­di, quatre-​vingt ans jour pour jour après l'entrée en vigueur de la dis­po­si­tion de Vichy.

Lire aus­si l Érotisme poli­tique : avec sa "Chanson de Baise", Sebastien Delage célèbre les sexua­li­tés LGBT

Partager
Articles liés

Inverted wid­get

Turn on the "Inverted back­ground" option for any wid­get, to get an alter­na­tive sty­ling like this.

Accent wid­get

Turn on the "Accent back­ground" option for any wid­get, to get an alter­na­tive sty­ling like this.