Le ministre du Travail a choisi la date du 1er mai pour détailler les modalités de ce RSA sous condition de consacrer « 15 à 20 heures » de formation et d’insertion par semaine, actuellement testé par dix-huit départements.
« Vous ne proposez pas à une mère célibataire avec trois enfants une offre de formation de 17 à 20 heures ou alors vous lui proposez la solution de garde qui va avec, a lancé Olivier Dussopt lundi 1er mai dans un entretien donné à BFMTV. Si elle nous dit qu’elle ne veut pas jouer le jeu de l’insertion et du retour à l’emploi, nous faciliterons la sanction en matière de suspension. » Le ministre du Travail a choisi la Journée internationale des travailleurs pour détailler l'état d'esprit d'une réforme controversée, celle dite de « l'accompagnement rénové des allocataires du Revenu de solidarité active (RSA) », tout en annonçant qu'elle commencerait à être effective « progressivement » à partir de 2024.
Avec la réforme du RSA, qui s'inscrit dans le processus de transformation de Pôle emploi en « France Travail » comme annoncé par le gouvernement en avril, c'est tout un paradigme qui est renversé : si, jusqu'à présent, cette allocation de 607,75€ était versée comme un filet de sécurité sans condition aux personnes n'ayant aucune source de revenu, c'est sous condition qu'elle le sera désormais. En effet, l'allocataire devra s'acquitter de « 15 à 20 heures » par semaine d'heures de formation et d’insertion pour pouvoir y prétendre.
Radiations facilitées
Le gouvernement entend donner plus de moyens aux Départements, qui distribuent cette allocation, pour sanctionner les personnes qui ne respectent pas ces obligations. « Le président du Conseil départemental, qui est compétent en matière de RSA et de versement des allocations, pourra plus facilement qu’aujourd’hui suspendre le RSA dans un premier temps et ensuite éventuellement le radier comme c’est déjà le cas aujourd’hui, a indiqué le ministre. Depuis 1988, la loi prévoit la possibilité de supprimer le RSA. »
Répondant à la controverse, audible dans les rangs de la gauche, au sujet de la nouvelle conditionnalité d'une aide pensée à sa création comme un devoir de la société envers les plus fragiles, le ministre a d'abord convenu que « le RSA est un revenu de survie » et que « personne n'est riche ou ne vit avec ». Mais il a ajouté : « Je considère que dire que nous devrions verser le RSA sans nous intéresser à la contrepartie, aux parcours d’insertion est d’une immense hypocrisie car la société n’est pas quitte de son devoir de solidarité quand elle a versé 607 euros à un individu. Elle l’est quand elle l’a aidé à retourner en emploi car je n’ai pas trouvé plus efficace pour sortir de la précarité et retrouver de l’autonomie et de la dignité que d’avoir un emploi et d’en vivre. »
La Seine-Saint-Denis claque la porte de l'expérimentation
Le RSA sous conditions est actuellement testé dans dix-huit départements : l’Aisne, l’Aveyron, les Bouches-du-Rhône, la Côte‑d’Or, la Creuse, l’Eure, l’Ille-et-Vilaine, la Loire-Atlantique, le Loiret, la Mayenne, la Métropole de Lyon, le Nord, les Pyrénées-Atlantiques, la Réunion, la Somme, les Vosges, l’Yonne et les Yvelines. Fin mars, le Conseil départemental de Seine-Saint-Denis – département le plus pauvre de France – avait annoncé avoir refusé l'expérimentation sur son territoire. « La doctrine portée par le gouvernement en matière de conditionnalité des aides sociales […] me paraît une grave entorse à notre République », avait écrit le président PS du Conseil départemental, Stéphane Troussel, dans un courrier adressé à Olivier Dussopt, rapporte Libération.
En Italie, Giorgia Meloni supprime le revenu de citoyenneté
L'annonce a, elle aussi, eu lieu lundi 1er mai. « Nous réformons le revenu de citoyenneté pour faire la différence entre ceux qui sont capables de travailler et ceux qui ne le sont pas », a déclaré la première ministre italienne d'extrême droite Giorgia Meloni. Mis en place par le Mouvement 5 étoiles en 2019 pour « abolir la pauvreté », le revenu citoyen aurait permis de sortir un million de personnes de la pauvreté, selon l'institut citoyen de la statistique cité par Le Monde.
Cette aide sociale, d'un montant moyen de 550 euros, sera remplacée par un « chèque d'inclusion » à compter du 1er janvier 2024, a précisé Giorgia Meloni. Ce dispositif sera beaucoup plus restrictif : le gouvernement entend le réserver « aux familles ayant à leur charge des enfants, des personnes de plus 60 ans ou des personnes handicapées », détaille Le Monde, et sera plafonné à 500 euros par mois. Une manière « d’honorer les travailleurs en ce jour de fête », a ajouté la présidente du Conseil dans un communiqué. Pour Elly Schlein, figure montante de la gauche et cheffe du Parti démocrate interrogée par La Stampa, ce « décret travail » constitue une « condamnation à la précarité » pour les travailleur·euses italien·nes et une « insupportable provocation ».
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