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©Zoe Schaeffer

Oxfam France dresse un rap­port acca­blant sur l’ampleur des inéga­li­tés de genre dans le monde agricole

Selon un rap­port de l’Oxfam publié ce mer­cre­di, si les agri­cul­trices sont les plus vul­né­rables aux chan­ge­ments cli­ma­tiques, elles sont aus­si au cœur des solutions. 

À l’occasion du Salon de l’Agriculture qui se tient à Paris jusqu’au 5 mars pro­chain, l’organisation inter­na­tio­nale Oxfam France publie ce mer­cre­di 29 février un rap­port sur la situa­tion des femmes agri­cul­trices en France. Ce der­nier, résul­tat de plu­sieurs études récentes sur le sujet, porte sur deux axes : l’ampleur des inéga­li­tés de genre dans le monde agri­cole et l’adaptation des agri­cul­trices face au chan­ge­ment climatique.

Le rap­port s’est pre­miè­re­ment atta­ché à éta­blir le pro­fil des agri­cul­trices fran­çaises. Elles sont, en géné­ral, plus âgées que leurs homo­logues mas­cu­lins. Et plus diplô­mées aus­si. L’organisation constate une sur­re­pré­sen­ta­tion dans les éle­vages de che­vaux, de petits ani­maux ou encore les mou­tons. À l’inverse, les femmes sont quasi-​absentes dans les exploi­ta­tions de bois (1,6 %), les entre­prises pay­sa­gistes (4 %) ou la syl­vi­cul­ture (9,9 %). Enfin, les agri­cul­trices sont rela­ti­ve­ment plus nom­breuses dans les petites struc­tures (32 %) que dans les moyennes et les grandes exploi­ta­tions (25 %). 

Lire aus­si I L’âpre conquête des femmes agri­cul­trices pour leurs droits

En 2020, elles repré­sentent 29 % des actif·ves permanent·es agri­coles. Elles étaient 32 % en 2010. Le rap­port pointe d’ailleurs une baisse géné­rale des per­sonnes tra­vaillant dans l’agriculture. Mais la part des femmes a bais­sé davan­tage que celle des hommes. « Les fac­teurs pou­vant expli­quer cette baisse de repré­sen­ta­tion des agri­cul­trices pour l’ensemble des per­sonnes du sec­teur sont les inéga­li­tés struc­tu­relles dont elles sont vic­times », explique l’Oxfam dans son rapport.

Parmi ces inéga­li­tés per­sis­tantes, l’Oxfam pointe pre­miè­re­ment des inéga­li­tés de reve­nus pires que dans les autres sec­teurs. Les agri­cul­trices gagnent en effet en moyenne 29 % de moins que les hommes. « Cet écart est donc supé­rieur de 25 % à l’écart sala­rial homme/​femmes moyen en France », indique le rap­port. Ce der­nier pointe aus­si qu'environ 132 000 femmes d’exploitants n’avaient tou­jours pas de sta­tut en 2019, soit envi­ron 20 % de l’ensemble des femmes tra­vaillant dans le sec­teur agri­cole. Un sta­tut pour­tant essen­tiel, puisqu'il leur ouvre notam­ment le droit à la retraite ou à la mutua­li­té sociale agri­cole (MSA). 

En 2020, la retraite moyenne agri­cole des femmes est de 570 euros mensuels

Les inéga­li­tés finan­cières se pour­suivent au moment de la retraite. Dans le sec­teur agri­cole comme dans l’ensemble de la popu­la­tion, les écarts de pen­sion de retraites varient en fonc­tion du genre. Ainsi, en 2020, la retraite moyenne agri­cole des femmes est de 570 euros men­suels tan­dis qu’elle est de 840 euros par mois pour les hommes. 

À ces inéga­li­tés s’ajoutent celle de l’accès à l’installation, aux aides et aux for­ma­tions ou encore de la charge domes­tique. En ce qui concerne l’installation, les vendeur·euses d'exploitations seraient plus défiant·es vis-​à-​vis des femmes, pointe le rap­port qui ajoute que les agri­cul­trices font face à des sys­tèmes de pen­sée sté­réo­ty­pés et une remise en cause constante de leur légi­ti­mi­té et de leurs com­pé­tences. Elles béné­fi­cient éga­le­ment moins de la Dotation jeune agri­cul­teur (DJA). Ainsi, en 2020, les femmes repré­sentent près de 40 % des per­sonnes qui se sont ins­tal­lées en agri­cul­ture mais seule­ment 23 % sont béné­fi­ciaires de la DJA. Les agri­cul­trices par­ti­cipent éga­le­ment moins que les hommes aux for­ma­tions pro­po­sées, par manque de temps cau­sé par une charge domes­tique plus éle­vée, par manque de légi­ti­mi­té mais aus­si parce que le conjoint ou l’associé mas­cu­lin va plus faci­le­ment par­ti­ci­per aux for­ma­tions que l’associée ou la conjointe. Malgré cela, le rap­port indique que l’endettement des agri­cul­trices est moindre que celui des agriculteurs. 

Charge domes­tique

Les inéga­li­tés se réper­cutent aus­si éga­le­ment dans la sphère intime et fami­liale. Selon une étude de la Fédération natio­nale d’agriculture bio­lo­gique (FNAB) réa­li­sée en 2019, 66 % des agri­cul­trices bio en couple affirment prendre en charge la tota­li­té ou presque des tâches ména­gères. À ces der­nières s’ajoutent aus­si la comp­ta­bi­li­té, la ges­tion admi­nis­tra­tive de l’exploitation ou encore la vente des produits. 

Des inéga­li­tés de genre ren­for­cées par les poli­tiques sec­to­rielles. Oxfam pointe par exemple le manque de don­nées dis­po­nibles pour iden­ti­fier plei­ne­ment la nature et l’étendue des inéga­li­tés dont sont vic­times les agri­cul­trices. Notamment sur cette répar­ti­tion de la charge domes­tique au sein du foyer agri­cole. Ces don­nées « per­met­traient d’atténuer le pro­blème grâce à des mesures d’accompagnement ». Oxfam pointe aus­si que des études inter­na­tio­nales montrent que les vio­lences basées sur le genre sont sur­re­pré­sen­tées dans le monde agricole. 

Meilleures alliées du climat

La seconde par­tie du rap­port porte sur la grande vul­né­ra­bi­li­té des agri­cul­trices au chan­ge­ment cli­ma­tique. Elles sont, en effet, pro­por­tion­nel­le­ment plus pré­sentes dans les cultures les plus vul­né­rables aux effets du chan­ge­ment cli­ma­tique. Notamment la viti­cul­ture, le maraî­chage et, en fonc­tion de la zone géo­gra­phique, l’élevage.

Si les agri­cul­trices sont plus vul­né­rables aux chan­ge­ments cli­ma­tiques, ce sont elles qui sont motrices dans la réponse à l’urgence cli­ma­tique, affirme Oxfam. Elles sont ain­si plus nom­breuses à adop­ter des pra­tiques durables. Le rap­port démontre par exemple que les femmes sont à la tête d’un tiers des exploi­ta­tions bio­lo­giques. Plus lar­ge­ment, les exploi­ta­tions gérées par des femmes sont plus sou­vent tour­nées vers les cir­cuits courts et la vente directe que celles gérées par des hommes. 

Une dizaine de recommandations

Pour enrayer les inéga­li­tés de genre dans le sec­teur agri­cole, l’Oxfam pro­pose une dizaine de recom­man­da­tions. Parmi les­quelles, la for­ma­tion de tous·toutes les agent·es du minis­tère de l’Agriculture aux ques­tions de genre, la réa­li­sa­tion d’une étude finan­cée par l’État sur l’adaptation au chan­ge­ment cli­ma­tique vue sous le prisme du genre, l’adoption de poli­tiques publiques favo­ri­sant l’installation et les struc­tures gérées par les femmes ou encore réfor­mer la DJA afin que son attri­bu­tion et son mon­tant favo­risent l’installation des agricultrices. 

Lire aus­si I Révolution fémi­niste dans les campagnes

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