La Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) a contraint la France, ce jeudi, à indemniser une femme condamnée pour avoir dénoncé un cas de harcèlement sexuel au sein de son lieu de travail.
Secrétaire dans une association d’enseignement confessionnel, Vanessa Allée avait dénoncé en 2016, dans un courriel adressé à six personnes – dont l’inspecteur du travail –, une “agression sexuelle” ainsi qu’un “harcèlement sexuel et moral” de la part du vice-président exécutif de l’association, rappelle la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) dans un communiqué. La justice française avait à l’époque estimé que les accusations de cette habitante de la région parisienne n’étaient pas fondées. En 2018, Vanessa Allée avait ainsi été sanctionnée en appel et condamnée à verser une amende de 500 euros pour “diffamation publique” à l’encontre de son supérieur hiérarchique. La sentence avait été confirmée en 2019 par la Cour de cassation, qui avait ordonné le versement de 2 500 euros au titre des frais de procédure.
Jeudi 18 janvier, la CEDH a finalement donné raison à la plaignante et a condamné la France à lui verser une indemnité de 12 750 euros. Dans son arrêt, la CEDH fait valoir que les États signataires de la convention européenne des droits de l’homme doivent “apporter la protection appropriée aux personnes dénonçant les faits de harcèlement moral ou sexuel dont elles s’estiment les victimes”. Elle souligne que “les faits dénoncés ont été commis sans témoins et que l’absence de plainte relativement à de tels agissements ne saurait conduire à caractériser [la] mauvaise foi” de Mme Allée. La France s’est donc rendue coupable d’avoir “fait peser sur la requérante une charge de la preuve excessive en exigeant qu’elle apporte la preuve des faits qu’elle entendait dénoncer”, selon le communiqué de la cour.
Concernant le courriel litigieux envoyé par Vanessa Allée, la CEDH estime qu’il s’agissait d’un texte “envoyé à un nombre limité de personnes, n’ayant pas vocation à être diffusé au public, mais dont le seul but était d’alerter les intéressés sur la situation de la requérante afin de trouver une solution permettant d’y mettre fin”. Ce message “n’a entraîné, en tant que tel, que des effets limités sur la réputation de son prétendu agresseur”. Les sept juges chargé·es de trancher estiment que la France a méconnu dans cette affaire l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme, qui garantit la liberté d’expression.