Cour de Cassation Paris 2 April 2014
La Cour de cassation sur l'ïle de la Cité à Paris © Wikimedia commons

Erreur judi­ciaire : Farid El Haïry réabi­li­té par la Cour de cassation

L'homme de 41 ans, condam­né à tort pour viol en 2003, devient la quin­zième per­sonne réha­bi­li­tée par la jus­tice sous la Vème République.

La cour de révi­sion de la Cour de cas­sa­tion – la plus haute juri­dic­tion de l'ordre judi­ciaire fran­çais – a solen­nel­le­ment recon­nu l'innocence de Farid El Haïry jeu­di 15 décembre, rap­porte Le Monde. Elle a donc annu­lé sa condam­na­tion pour agres­sions sexuelles et viol aggra­vé sur mineure, énon­cée il y a 19 ans, le 19 décembre 2003 par la cour d'assises des mineurs du Nord.

En 1998, Julie D., 15 ans, avait accu­sé l'adolescent de 17 ans de ces faits. Près de 20 ans plus tard en 2017, elle a avoué, dans une lettre envoyée au pro­cu­reur de la République de Douai, « avoir men­ti ». Dans ce cour­rier où elle pré­sente ses excuses à Farid El Haïry et à sa famille, elle assure avoir été vic­time d'inceste répé­té de la part de son grand frère entre ses 8 et 12 ans et porte plainte envers lui. Farid El Haïry, 41 ans, condam­né à tort pour viol en 2003, devient la quin­zième per­sonne réha­bi­li­tée par la jus­tice sous la Vème République.

Une peine légère reflé­tant les doutes du tribunal ?

Durant l'audience devant la cour de révi­sion, Me Anne-​Sophie Wagnon-​Horiot, avo­cate de Julie D., a esti­mé que la recon­nais­sance de cette erreur judi­ciaire invite à « ne pas sacra­li­ser une parole, dont le conte­nu doit être confron­té aux élé­ments d’un dos­sier, à ne pas se conten­ter d’une seule parole », opé­rant de fait un dis­tin­go entre la parole des vic­times reçue dans le cadre d'un sou­tien asso­cia­tif et la parole des vic­times reçue par la justice.

La chro­ni­queuse judi­ciaire du Monde, Pascale Robert-​Diard, fait part d'un cer­tain malaise lié à cette affaire : « Farid El Haïry a été condam­né par la cour d’assises des mineurs en 2003 à cinq ans d’emprisonnement, dont quatre ans et deux mois avec sur­sis, une peine qui cou­vrait sa déten­tion pro­vi­soire. Il y a deux façons de lire ce ver­dict : soit des juges et des jurés ont fait preuve d’une éton­nante bien­veillance, en déci­dant de ne pas acca­bler un jeune homme à l’aube de sa vie d’adulte, en dépit des faits très graves dont ils l’avaient décla­ré cou­pable. Soit ils ont dou­té, et ont enfoui leur trouble sous une peine légère, avec l’espoir que Farid El Haïry ne ferait pas appel, ce qui s’est pro­duit, au mépris du prin­cipe selon lequel le doute doit béné­fi­cier à l’accusé. » Elle sou­lève éga­le­ment un autre angle mort de cette affaire : n'ayant pas reçu de réponse à son cour­rier de 2017, Julie D. a dû écrire de nou­veau au pro­cu­reur en 2018 pour que la jus­tice s'empare de son aveux de men­songe et daigne se sai­sir à nou­veau du dos­sier de Farid El Haïry.

Indemnisation

De son côté, l'avocat du réha­bi­li­té, Me Franck Berton, va désor­mais lan­cer une demande d'indemnisation pour le temps pas­sé en déten­tion pro­vi­soire de son client (11 mois et 23 jours). Farid El Haïry avait par ailleurs été tenu de poin­ter chaque année au com­mis­sa­riat pen­dant quinze ans pour don­ner son adresse et avait été ins­crit au fichier natio­nal des délin­quants sexuels, peines qui ne peuvent pas offi­ciel­le­ment faire l'objet d'une indem­ni­sa­tion, rap­pelle Le Monde. Qui donne en exemple les mon­tants des indem­ni­sa­tions à la suite de la réha­bi­li­ta­tion de Loïc Sécher en 2011 – là aus­si une fausse accu­sa­tion de viol. Après avoir pas­sé 7 ans et 3 mois en déten­tion, il avait été indem­ni­sé par la cour d'appel de Rennes à hau­teur de 797 352 euros. Sa mère avait éga­le­ment été indem­ni­sée de 50 000 euros, ain­si que les trois membres de sa fra­trie, qui avaient reçu 30 000 euros cha­cun. Quant à la jeune fille qui avait accu­sé à tort Loïc Sécher, elle avait été tenue de rem­bour­ser les indem­ni­tés per­çues en qua­li­té de victime.

Lire aus­si l Erreur judi­ciaire : près de 20 ans après sa condam­na­tion pour « viol », vers un acquit­te­ment de Farid El Haïry

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