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Une piscine municipale © Flickr

Burkini dans les pis­cines de Grenoble : une déli­bé­ra­tion sous haute ten­sion ce lundi

La muni­ci­pa­li­té de Grenoble doit voter ce lun­di un chan­ge­ment du règle­ment inté­rieur dans les pis­cines, vou­lu par le maire éco­lo­giste Eric Piolle. Au cœur de la déci­sion, la ques­tion très épi­neuse du bur­ki­ni. Au point que le pré­fet de l’Isère enta­me­ra des pour­suites judi­ciaires si la modi­fi­ca­tion est adoptée.

Un conseil muni­ci­pal qui pro­met d’être explo­sif. L’été approche, et les mêmes polé­miques reviennent. La Ville de Grenoble déli­bère ce lun­di 16 mai à par­tir de 15h d’un nou­veau règle­ment dans les pis­cines locales, pour lever les res­tric­tions ves­ti­men­taires exis­tantes. Notamment la pos­si­bi­li­té de res­ter seins nus, ou au contraire, de por­ter un maillot cou­vrant pour se pro­té­ger du soleil ou par convic­tion per­son­nelle. L’autorisation, par exemple, du port du bur­ki­ni, ce vête­ment de bain cou­vrant le corps et por­té par cer­taines femmes musul­manes, qui serait auto­ri­sé Et ce der­nier point ne manque pas d’agiter toute la classe politique. 

Pour cause, le pré­fet de l’Isère a annon­cé hier soir dans un com­mu­ni­qué qu’il contes­te­rait une telle mesure devant le tri­bu­nal admi­nis­tra­tif si elle devait être adop­tée. En sui­vant les consignes du minis­tère de l’Intérieur, le pré­fet consi­dère qu’autoriser le bur­ki­ni « paraît contre­ve­nir au prin­cipe de laï­ci­té posé par la loi de 1905 » car « l’objectif mani­feste est de céder à des reven­di­ca­tions com­mu­nau­ta­ristes à visées religieuses ». 

“Une mesure pour l’égalité” selon Eric Piolle

Pourtant, le mot bur­ki­ni n’est pas men­tion­né une seule fois dans la modi­fi­ca­tion du règle­ment, qui pour­rait entrer en vigueur dès le 1er juin. Le 3 mai, le maire de Grenoble Eric Piolle déclare prendre cette déci­sion pour que « cha­cun puisse se rafraî­chir vêtu·e ou dévêtu·e comme il/​elle veut, tant que la loi (l'hygiène et la sécu­ri­té) est res­pec­tée”. Une mesure au nom de la liber­té et de l’égalité selon l’écologiste, qui voit le bur­ki­ni comme un « non-​sujet ». Pour lui, « ce n’est pas un enjeu de laï­ci­té mais d’accès au ser­vice public » et d’injonctions sociales faites aux femmes. 

L’initiative reste sou­te­nue par cer­taines asso­cia­tions et politicien·nes. Le 11 mai der­nier, le col­lec­tif Alliance Citoyenne, très actif sur la ques­tion de la léga­li­sa­tion du bur­ki­ni dans l’espace public, signe une tri­bune avec 113 autres per­son­na­li­tés natio­nales pour défendre ce chan­ge­ment de règle­ment. Parmi les signa­taires, les mili­tantes fémi­nistes Alice Coffin et Caroline de Haas, ou encore la conseillère de Paris Raphaëlle Rémy-​Leleu. Intitulé En mai, mets ce qu’il te plaît !, le texte sou­ligne : « Grenoble sera peut-​être la pre­mière muni­ci­pa­li­té à reven­di­quer haut et fort que les femmes musul­manes ont autant leur place à la pis­cine que n’importe quel·le autre citoyen·ne ; et que plus per­sonne ne doit être stigmatisé·e jusque dans les bas­sins en rai­son de son choix de maillot. »

Une déci­sion qui secoue la classe politique

Si Eric Piolle qua­li­fie ce matin cette démarche comme étant « de san­té publique », ses contradicteur·rices, à gauche comme à droite, invoquent plu­tôt une entorse à la laï­ci­té. Chez l’opposition, on s’étouffe. L’ancien maire de Grenoble et conseiller muni­ci­pal LR Alain Carignon dénonce au micro de RTL la volon­té du maire de « favo­ri­ser le com­mu­nau­ta­risme pour des rai­sons élec­to­rales ». Il appelle d'ailleurs les Grenoblois·es à rejoindre les mani­fes­ta­tions pré­vues en début d’après-midi pour pro­tes­ter contre la mesure. 

De son côté, Laurent Wauquiez, pré­sident LR de la région Auvergne-​Rhône-​Alpes, est caté­go­rique : plus aucune sub­ven­tion ne sera ver­sée à la ville par la région en cas d’adoption de la mesure. Il sou­tient : « Nous ne cau­tion­ne­rons aucune dérive com­mu­nau­ta­riste de la part des col­lec­ti­vi­tés. » 

Au Parti Socialiste, même oppo­si­tion, mais pas pour les mêmes rai­sons. Le PS est clair, il vote­ra « contre » lors du conseil muni­ci­pal atten­du cet après-​midi. Cécile Cénatiempo, cheffe de file du PS à Grenoble, per­çoit cette ini­tia­tive comme une « pres­sion sociale ». Pour elle, « ça veut dire que si vous êtes une femme musul­mane, pour aller à la pis­cine, vous n'aurez pas d'autre choix que mettre le bur­ki­ni. » 

Alors, pro­grès social ou entorse à la laï­ci­té ? Dans le propre camp du maire, on s’écharpe – un tiers de la majo­ri­té éco­lo­giste s’affichant contre la déli­bé­ra­tion. Face aux ten­sions pro­vo­quées par le débat, le conseil muni­ci­pal de ce lun­di sera fer­mé au public, mais reste dif­fu­sé sur la chaîne YouTube de la municipalité.

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