Après un premier rapatriement collectif début juillet, une deuxième vague de retour de femmes djihadistes françaises et d'enfants détenu·es dans le camp d'Al Hol en Syrie a eu lieu dans la nuit de mercredi à jeudi.
15 femmes soupçonnées de djihadisme ont été « remises aux autorités judiciaires compétentes », a annoncé le ministère des Affaires étrangères, jeudi 20 octobre. À 4h du matin, un avion qui a atterri à l'aéroport militaire de Villacoublay (Yvelines) les a rapatriées de Syrie, de même que 40 enfants. Ces mineur·es, dont huit sont orphelin·es, ont été confié·es aux services sociaux. Les plus jeunes ont trois ans, d'autres sont adolescent·es et tous « feront l'objet d'un suivi socio-médial » assure le ministère des affaires étrangères. Les enfants comme les femmes étaient détenu·es dans le camp d'Al Hol, dans le Nord-Est de la Syrie, indique BFMTV.
Certaines femmes font d'ores-et-déjà l'objet d'un mandat d'arrêt pour des chefs de participation à une activité terroriste et seront donc directement présentées à un juge antiterroriste. Les autres vont être placées en garde à vue à la DGSI.
En juillet, le coordinateur du renseignement et de la lutte contre le terrorisme d'alors, Laurent Nunez, avait indiqué sur RMC qu'il restait encore une centaine de femmes et près de 250 enfants français·es dans les camps syriens. Dans certains de nos pays voisins (Belgique, Danemark, Finlande, Pays-Bas), les rapatriements ont été beaucoup plus rapides et systématiques.
La France condamnée par la CEDH
Le 14 septembre, la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) a condamné la France pour « violation du droit d’entrée de ses ressortissants sur son territoire », ainsi que le rapporte le Défenseur des droits. Deux familles de femmes détenues en Syrie, représentées par Me Marié Dosé et Me Laurent Pettit, avaient porté le cas des trois enfants de ces femmes nés sur le sol syrien devant la juridiction européenne. « Après plusieurs années de procédures et de détention dans ces camps mettant en danger la vie de ces enfants exposés à des traitements inhumains et dégradants, l’arrêt de la Cour permet enfin de franchir une étape dans la prise en compte de la situation de ces enfants français et de leurs familles présentes en France, de leurs droits et de leur nécessaire protection », commentait la Défenseure des droits Claire Hédon.
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En réponse, le Quai d'Orsay avait pris acte de cette décision et s'était dit prêt à « envisager » de nouveaux rapatriements « chaque fois que les conditions le permettraient ». Le 5 juillet dernier, un premier rapatriement collectif sur le sol français avait été mené, avec 35 enfants et 16 femmes soupçonnées de djihadisme évacué·es du camp Roj, lui aussi situé dans le Nord-Est du pays. Un changement de doctrine par rapport aux précédents retours au compte-goutte.
Lors d'une audition au Sénat, le garde des Sceaux Éric Dupond-Moretti avait indiqué qu'entre le 15 mars 2019 (après la chute du califat de l'État islamique) et le 4 octobre 2022, la France avait rapatrié 71 mineur·es de camps syriens. En 2021, l'ONG Save the Children avait recensé 74 décès de mineur·es dans le seul camp d'Al Hol. Si la majorité était décédée à cause des terribles conditions de détention, huit d'entre eux avaient été tué·es.
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