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Les produits menstruels réutilisables proposés gratuitement dans une pharmacie de Barcelone © A.C.

Pionnière dans le monde, la Catalogne dis­tri­bue gra­tui­te­ment des pro­duits mens­truels réutilisables

Depuis début mars, les phar­ma­cies cata­lanes dis­tri­buent gra­tui­te­ment des pro­duits réuti­li­sables pour les règles à toutes les per­sonnes en âge de mens­truer. Cette cam­pagne unique au monde lan­cée par le gou­ver­ne­ment régio­nal cata­lan vise à com­battre la pré­ca­ri­té mens­truelle et à réduire l’impact envi­ron­ne­men­tal des ser­viettes hygié­niques et tam­pons jetables. Reportage à Barcelone. 

Collé sur la devan­ture de la phar­ma­cie Mitre à Barcelone, un auto­col­lant en forme de goutte de sang. En son centre, on peut lire en cata­lan “La meva regla, les meves regles” (tra­duc­tion “Mes règles, ma règle), slo­gan de cette nou­velle cam­pagne pour l’équité mens­truelle. Il indique que cette phar­ma­cie, comme plus de 3 200 autres en Catalogne, est deve­nue un point de dis­tri­bu­tion gra­tuite de pro­duits mens­truels réutilisables. 

Monica, la phar­ma­cienne, étale un à un les pro­duits sur son pré­sen­toir. Elle explique : “Toutes les femmes, hommes trans ou per­sonnes non binaires en âge de mens­truer, ont le choix entre une culotte mens­truelle, une coupe mens­truelle, ou une ser­viette hygié­nique lavable”. Pour l’emporter, ils ou elles doivent pré­sen­ter un QR code dis­po­nible gra­tui­te­ment sur leur appli­ca­tion de san­té “Meva Salut”, l’équivalent de l’application fran­çaise Ameli. 

En trois jours, depuis le début de la cam­pagne, Monica a écou­lé vingt-​deux pro­duits, alors qu’avant, elle ven­dait au maxi­mum une ou deux coupes mens­truelles par an. ça conver­tit plein de nou­velles femmes. Par exemple, hier, une mère venue récu­pé­rer des culottes mens­truelles pour ses deux ados est repar­tie avec une coupe mens­truelle alors qu’elle n’en avait jamais uti­li­sé avant”, raconte-​t-​elle dans un sourire. 

Un bud­get ini­tial de 8,5 mil­lions d'euros

Allegra, la soixan­taine, entre dans la phar­ma­cie pour deman­der si elle peut récu­pé­rer une culotte mens­truelle pour sa fille, qui vit à l’étranger. Elle a vu le lan­ce­ment de la cam­pagne dans le jour­nal et s’est pré­ci­pi­tée. “Ma fille ne porte que des culottes mens­truelles. Au début, quand elle m’en a par­lé, j’ai trou­vé ça répu­gnant, mais je suis infir­mière à la retraite, et j’ai vite com­pris que c’était bien plus hygié­nique que les ser­viettes ou les tam­pons jetables. Et bien meilleur aus­si pour l’environnement. J’aurais tel­le­ment aimé qu’il y ait ce genre de pro­duits à mon époque !” s’exclame-t-elle. 

Le suc­cès de cette cam­pagne, mesure phare du “Plan d’équité mens­truelle et cli­ma­tique” lan­cé en 2023 par le gou­ver­ne­ment cata­lan, va bien au-​delà de cette phar­ma­cie de quar­tier. Durant la jour­née de lan­ce­ment, les 3 200 phar­ma­cies par­te­naires du dis­po­si­tif ont dis­tri­bué soixante-​trois pro­duits mens­truels réuti­li­sables par minute et en trois jours, le code QR a été télé­char­gé plus de 275 000 fois. Le dis­po­si­tif est pré­vu pour tou­cher envi­ron 2,5 mil­lions de per­sonnes et a coû­té 8,5 mil­lions d’euros à son démarrage.

Sa réus­site réjouit Tania Verge, la ministre du dépar­te­ment Egalité et Féminismes du gou­ver­ne­ment cata­lan, qui a por­té le pro­jet. Interrogée par Causette, cette poli­to­logue de for­ma­tion et acti­viste des droits des femmes estime que l’équité mens­truelle “doit être au centre de la lutte fémi­niste”. Elle pré­cise : “Le droit au contrôle sur notre propre corps est le plus impor­tant de tous. Et c’est l’esprit de notre slo­gan dans cette cam­pagne : je vis mes règles selon mes règles. Cette action est deve­nue une prio­ri­té quand nous avons consta­té qu’une femme sur quatre en Catalogne était contrainte d’utiliser un pro­duit mens­truel à usage unique deux fois de suite et que 44 % d’entre elles ne pou­vaient pas choi­sir le pro­duit de leur choix à cause de son coût.”

“Justice sociale et de genre”

Elle pour­suit : “Cette mesure répond donc à un besoin de jus­tice sociale, mais aus­si à un besoin de jus­tice de genre. Nous vou­lions géné­rer des conver­sa­tions publiques et pri­vées sur le thème de la mens­trua­tion, car il existe encore trop de tabous et un grand manque d’informations sur le sujet dans notre pays. Et nous sommes en train d’y arri­ver. Depuis que la cam­pagne a com­men­cé, on parle des règles dans les talk-​shows à la télé, mais aus­si au tra­vail et dans les foyers.” 

Avant la Catalogne, l’Écosse a dis­tri­bué des pro­duits mens­truels gra­tui­te­ment, mais ils n’étaient pas réuti­li­sables. Ce qui rend cette cam­pagne unique au monde, c’est son objec­tif envi­ron­ne­men­tal, qui vise à réduire les 9 000 tonnes de déchets géné­rées chaque année en Catalogne par les ser­viettes et tam­pons jetables. Selon des chiffres du gou­ver­ne­ment cata­lan, l’usage d’une coupe mens­truelle ne géné­re­rait que 3 kilos de déchets en tout durant la vie fer­tile d’une femme contre 180 kilos pour les pro­duits jetables. 

Cette cam­pagne doit durer au moins jusqu’en 2025, date des nou­velles élec­tions régio­nales en Catalogne.

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