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© Vojtech Bruzek

Inde : une appli­ca­tion met faus­se­ment aux enchères plus d'une cen­taine de femmes musulmanes

En Inde, plus d'une cen­taine de femmes musul­manes ont vu leur nom et leur pho­to­gra­phie publié·es, au début du mois de jan­vier, sur une appli­ca­tion les met­tant vir­tuel­le­ment aux enchères.

« L'application de la honte. » C'est avec ces mots très forts que Sonia Devillers a ouvert son "Édito M", ce mer­cre­di matin, sur France Inter, consa­cré à une appli­ca­tion indienne met­tant faus­se­ment aux enchères plus d'une cen­taine de femmes musulmanes. 

Début jan­vier, des jour­na­listes, mili­tantes et femmes poli­tiques indiennes et musul­manes se sont en effet retrou­vées avec leur nom et une pho­to­gra­phie, publié·es sans leur auto­ri­sa­tion, sur une appli­ca­tion appe­lée « Bulli Bai ». Leur pro­fil, accom­pa­gné d'une légende humi­liante, avait pour but de les vendre vir­tuel­le­ment aux enchères, rap­portent plu­sieurs médias anglo­phones comme la BBC, The Indian Express et The Times of India.

« Les points com­muns par­mi toutes les femmes pré­sentes sur la liste sont qu'elles sont toutes musul­manes et qu'elles ont toutes fait entendre leur voix. Il s'agit prin­ci­pa­le­ment de jour­na­listes fai­sant leur tra­vail, d'activistes et de cer­taines per­sonnes, pas for­cé­ment connues, qui se sont expri­mées sur les réseaux sociaux. Le mes­sage ici est clair : nous sommes assez culot­tés pour vous faire subir ça, nous le ferons encore », a expli­qué une jeune jour­na­liste à l'Indian Express.

"Je me sens faible"

Car ce n'est pas la pre­mière fois que les femmes musul­manes sont har­ce­lées de la sorte en ligne. En juillet der­nier, une appli­ca­tion et un site inter­net inti­tu­lé « Sulli Deals » pro­po­saient plus de 80 pro­fils de femmes musul­manes, les décri­vant comme les « affaires du jour ». Le mot « Sulli » est un terme hin­di issu de l'argot « uti­li­sé par les trolls Hindous de l'extrême-droite pour dési­gner les musul­manes », explique la BBC. En mai der­nier, c'était sur Youtube que des hommes dif­fu­saient des pho­to­gra­phies de femmes musul­manes. En Inde, la popu­la­tion musul­mane fait l'objet de fortes dis­cri­mi­na­tions et de racisme, dans un contexte où le Premier ministre Narendra Modi, fer de lance du natio­na­lisme hin­dou, souffle sur les braises de la divi­sion religieuse.

Malgré des plaintes et une enquête de la police, aucune per­sonne n'a été condam­née dans cette affaire. « J'espérais que j'obtiendrais jus­tice, mais la police ne m'a jamais contac­tée », a expli­qué l'une des femmes visées dans la pre­mière affaire à l'Indian Express, avant d'ajouter : « J'ai appe­lé le poli­cier en charge de l'enquête à de mul­tiples reprises en vain. Ces hommes ont main­te­nant créé une nou­velle page. Ils vont conti­nuer parce qu'ils veulent nous réduire au silence et le gou­ver­ne­ment ne fait rien. Et ça marche peut-​être. Je me sens faible. Je ne veux pas aller tra­vailler et je n'arrive pas à dor­mir. Je fais que me deman­der pour­quoi ils ont uti­li­sé ma pho­to. Je n'ai jamais été en poli­tique ou par­ti­ci­pé à des débats. »

Concernant l'application « Bulli Bai », des enquêtes ont été ouvertes dans trois états indiens. Trois sus­pect, deux hommes de 21 ans et une femme de 18 ans, ont éga­le­ment été arrêté·es. La pla­te­forme GitHub, par laquelle l'application exis­tait, l'a, enfin, suspendue.

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