Afghanistan : les tali­bans imposent le voile inté­gral aux femmes

Le chef suprême des talibans, Hibatullah Akhundzada, a décidé samedi d’imposer aux Afghanes le port du voile intégral et veut les reléguer hors de l’espace public.

woman in blue hijab and abaya
©IsaaK Alexandre KaRslian

Malgré leurs promesses d’assouplissement, les talibans renforcent une fois de plus leur contrôle des Afghanes. Dans un décret publié samedi, le chef suprême du mouvement, Hibatullah Akhundzada, a ordonné aux femmes de se couvrir intégralement, de la tête aux pieds - de préférence avec la burqa - lorsqu’elles sortent de chez elles et ce dans l’ensemble du pays.

« Les femmes qui ne sont ni trop jeunes ni trop vieilles devraient voiler leur visage, à l’exception de leurs yeux, selon les recommandations de la charia, afin d’éviter toute provocation quand elles font face à un homme qui n’est pas membre de leur famille », ajoute le décret. Si elles n’ont pas d’importantes tâches à effectuer à l’extérieur, « le mieux pour elles est de rester à la maison », précisent également les talibans dans le communiqué. 

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En cas d’infraction, les femmes ne seront pas punies directement, précise le décret qui liste les sanctions auxquelles sont désormais exposés les chefs de familles qui ne le feront pas respecter. Les deux premières infractions seront sanctionnées d’un simple avertissement. À la troisième, ce sont les chefs de famille qui seront emprisonnés trois jours tandis qu’à la quatrième infraction, ils seront traduits en justice. Le décret des talibans précise également que toute employée gouvernementale ne portant pas le voile intégral sera licenciée sur le champ. 

Selon Saba, jeune journaliste à Kaboul, interviewée par RFI, cette mesure va exposer encore davantage les femmes aux violences conjugales. « Les talibans dressent les hommes contre les femmes », assure-t-elle au micro de RFI. La jeune femme affirme que la stratégie des fondamentalistes religieux pour faire plier les femmes est de semer la discorde dans les foyers afin de faire taire celles qui oseraient défier les règles du régime. « Les hommes ne défendront jamais les femmes de leur famille s’ils doivent en payer le prix. »

Neuf mois de répression des droits des femmes 

Conformément à leur interprétation ultra rigoriste de la charia, la loi islamique, les talibans avaient jusqu'ici exigé que les Afghanes portent au minimum un hijab, un foulard couvrant la tête mais laissant apparaître le visage. Mais ils recommandaient vivement le port de la burqa, qu’ils avaient déjà imposé lors de leur premier exercice de pouvoir entre 1996 et 2001. À l’époque, les agents du ministère de la promotion de la vertu et de la prévention du vice fouettaient ainsi toute femme surprise sans burqa.

En 2022 et neuf mois après le départ des troupes américaines et leur retour au pouvoir, les talibans qui avaient initialement promis de se montrer plus souples envers les femmes, n’ont cessé de renier leurs promesses, érodant à nouveau les droits des femmes et balayant ainsi deux décennies de liberté conquise pas à pas par les Afghanes. « Nous sommes extrêmement préoccupés par le fait que les droits des femmes et des filles afghanes et les progrès accomplis dans ce domaine au cours des vingt dernières années soient rognés », a ainsi réagi le porte-parole du département d’État américain (l’équivalent du ministère des Affaires étrangères). Washington et ses alliés sont « profondément troublés par les récentes mesures prises par les talibans contre les femmes et les filles, dont les restrictions concernant l'éducation et les voyages», a-t-il ajouté.

En Afghanistan, les femmes sont désormais largement exclues des emplois publics et ont l’interdiction de voyager seule. Les femmes et les hommes doivent aussi être séparé·es dans les parcs publics avec des jours de visite réservés. Le 23 mars, les talibans ont également fait refermer aux filles les lycées et collèges, quelques heures à peine après leur réouverture.

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Le décret publié samedi pourrait compliquer un peu plus la quête de reconnaissance des talibans, que la communauté internationale a directement liée au respect des droits des femmes. « La légitimité et l’aide financière que les talibans veulent obtenir de la communauté internationale dépendent entièrement de la façon dont ils se conduisent, principalement leur capacité à transformer leurs engagements en actions », a déclaré samedi le Conseil de sécurité nationale de la Maison Blanche dans un communiqué. Depuis la prise de pouvoir des talibans, l’Afghanistan s’est enfoncé dans une crise financière et humanitaire majeure. Selon l’ONU, environ 95 % de la population ne mange pas à sa faim. 

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