La défense de Gérard Depardieu par Emmanuel Macron a ravivé l’antagonisme entre le chef de l’État et les féministes.
Les relations s’étaient légèrement apaisées avec l’inscription de l’IVG dans la Constitution. Mais la hache de guerre est déterrée entre le chef de l’État et les féministes à la suite de l’entretien qu’Emmanuel Macron a accordé à l’émission C à vous, mercredi soir.
Dans cette interview, Emmanuel Macron s’est dit “grand admirateur” de l’acteur, visé notamment par deux plaintes en France pour viol et agression sexuelle, et mis en examen dans l’un des deux cas. Accusations que Gérard Depardieu réfute.
L’indignation des féministes est venue de tous les côtés. “Entre nous et le chef de l’État, ce n’est plus un fossé, c’est un trou béant”, a déclaré Maëlle Noir, de la Coordination nationale du collectif Nous toutes. Avant d’ajouter : “Les propos du président ne sont pas seulement scandaleux mais dangereux, cela envoie un signal qui est de continuer à ne pas croire les victimes, à piétiner leur parole en toute impunité.” Et de conclure : “C’est d’une violence
extrême, un énorme recul dans les prises de position politique contre les
violences commises contre les femmes.”
Un président aux "convictions masculinistes"
Même son de cloche à la Fondation des femmes, dont la présidente Anne-Cécile Mailfert épingle les convictions “masculinistes” d’Emmanuel Macron et indique ne “plus avoir d’espoir” ni “d’illusion” sur lui concernant les questions des droits des femmes. “On est clairement dans la culture du viol, dans le discours qui vise à renverser la culpabilité : ça n’est plus Gérard Depardieu le chasseur, le prédateur, ce sont les femmes qui chasseraient les hommes, qui les cibleraient.” Une réaction d’autant plus grave “qu’on parle du président de la République, sa parole engage notre pays et a un véritable impact”, estime-t-elle. “Il aurait pu dire que c’est insupportable de parler comme cela des femmes, que l’égalité entre les femmes et les hommes est inscrite dans la Constitution. Il aurait pu avoir un message pour les victimes de Gérard Depardieu et les femmes en général. Il ne l’a pas fait.”
Une position qui relève d’une “constante”, selon Anne-Cécile Mailfert, qui rappelle ses propos dénonçant, ces dernières années, “une société de l’inquisition” ou encore “l’ère du soupçon” lors d’accusations de violences sexuelles portées contre des hommes de pouvoir.
Pour Louise Delavier, de l’association “En avant toute(s), “faire tant de communication pour parler de la défense des femmes et de leurs droits [au moment des annonces sur l’inscription de l’IVG dans la Constitution, ndlr], et ensuite aller outrageusement défendre quelqu’un comme Depardieu, cela créé de la dissonance cognitive”. “C’est du +en même temps+ qui n’est pas heureux sur ces sujets-là”, indique-t-elle. Suzy Rojtman, porte-parole du Collectif national pour les droits des femmes, ne cache pas, elle aussi, sa désillusion : avec “le président, c’est un pas en avant, cinq pas en arrière”.