À par­tir du 4 novembre à 16 h 16, les femmes bossent gratuitement

Le salaire horaire moyen brut des femmes fran­çaises reste infé­rieur de 15,8 % à celui des hommes. Ce qui signi­fie que, sym­bo­li­que­ment, à comp­ter du 4 novembre, c’est comme si elles n’étaient plus payées. 

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© Annie Spratt

Et si les femmes aban­don­naient leur poste de tra­vail pour pro­tes­ter contre les inéga­li­tés de rému­né­ra­tion qui per­sistent dans le pays ? Si elles le vou­laient, elles pour­raient le faire à comp­ter d’aujourd’hui, mer­cre­di 4 novembre, à 16 h 16, date sym­bo­lique fixée par le col­lec­tif Les Glorieuses. Pour la cin­quième année consé­cu­tive, sa créa­trice, Rebecca Amsellem, s’est ins­pi­rée d’un mou­ve­ment ini­tié par des femmes islan­daises et a com­pi­lé les don­nées de l’office euro­péen des sta­tis­tiques Eurostat. Dans la zone euro, le salaire horaire moyen brut des femmes est infé­rieur de 15 % à celui des hommes. En France, cette dif­fé­rence est de 15,8 %. « Si on rap­proche ce chiffre du nombre de jours ouvrés dans l’année, on réa­lise que les Françaises perdent 39,2 jours ouvrés de tra­vail rému­né­rés, dénonce Rebecca Amsellem, éga­le­ment doc­teure en éco­no­mie. On essaie de frap­per les esprits avec une date et des chiffres sym­bo­liques, mais les choses n’évoluent pas. »

Le col­lec­tif a donc lan­cé une péti­tion pour lut­ter contre les inéga­li­tés sala­riales et pro­pose la mise en place de cinq mesures pour ten­ter d’enrayer ces dif­fé­rences sys­té­miques comme le fait de condi­tion­ner l’accès des entre­prises aux mar­chés publics au res­pect de l’égalité sala­riale ou la créa­tion d’un congé pater­ni­té aus­si long que le congé mater­ni­té. « Les récentes annonces sur l’allongement du congé pater­ni­té sont tota­le­ment insuf­fi­santes, dénonce Rebecca Amsellem. Ça ne chan­ge­ra rien pour les femmes et leur car­rière. La mater­ni­té, et les sté­réo­types qui y sont atta­chés, reste l’un des prin­ci­paux fac­teurs en matière d’inégalités de salaires. » Rachel Silvera, maî­tresse de confé­rences à l’université de Paris Ouest-​Nanterre en est, elle aus­si, convain­cue. « Les pré­sup­po­sés liés à une moindre dis­po­ni­bi­li­té des femmes vis-​à-​vis du tra­vail conti­nuent de jouer à plein, regrette-​t-​elle. Notamment lorsqu’on parle des dif­fé­rences de rému­né­ra­tion per­sis­tantes à com­pé­tences et poste égal, éva­luées à 9 % et qui relèvent de la dis­cri­mi­na­tion sys­té­mique. » Plus que la date sym­bo­lique des Glorieuses, l’économiste sou­haite mettre l’accent sur un autre chiffre : l’écart entre la moyenne du salaire des hommes et la moyenne du salaire des femmes dans le sec­teur pri­vé, qui s’élève à 28,5 % (source Insee). « Je pré­fère rete­nir cette don­née plu­tôt que le taux horaire comme Eurostat, car cela prend en compte le temps de tra­vail et le poids du temps par­tiel, sou­vent subi, dans la car­rière des femmes », pour­suit Rachel Silvera. 

Qu’importe les chiffres rete­nus, le constat reste le même : la situa­tion est acca­blante et la volon­té poli­tique, qua­si absente. Certes, depuis le 1er mars 2019, les entre­prises doivent publier leur index de l’égalité pro­fes­sion­nelle. Même si 97 % des grandes entre­prises et 52 % des petites et moyennes l’ont publié, selon le minis­tère du Travail, les fémi­nistes res­tent sur leur faim. « Il faut abso­lu­ment ren­for­cer cet index qui est insuf­fi­sant », réclame Rebecca Amsellem. De son côté, Rachel Silvera estime que l’outil « masque les inéga­li­tés sala­riales » avec des « biais de cal­cul ». « J’ai sur­tout peur que la situa­tion sani­taire et éco­no­mique soit peu pro­pice à une mobi­li­sa­tion sur ce sujet, regrette-​t-​elle. Or, on le sait, les crises aggravent tou­jours les inégalités. » 

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